
annonce
Janvier 2025
Une campagne inédite !
avec
Trois tables de jeu
Deux meneuses
Neuf joueuses
Neuf personnages
Zéro substitution

Ma première est dite nourricière
Mon second est source de réclamations
Mon troisième divise en deux parties égales qui passe par lui d’un coup d’épée
Mon tout est le monde dans lequel nous avons erré sur LES SENTIERS DE L’OMBRE
Cet ouvrage rassemble un choix d'illustrations pour une campagne de jeu de rôle dans un univers médiéval fatastique jouée entre 2020 et 2024.
Cette série fut pour moi un terrain d’expérimentations à l’aquarelle.
MURET
L’orage menaçait. Il teintait le ciel d’un voile gris crépusculaire. Les grondements crépitaient et éclairaient l’horizon d’intenses zébrures lumineuses. Le déluge approchait. Il chargeait l’atmosphère de ce dernier jour d’été d’une moiteur insupportable. Mon front suait à grosses gouttes quand je finis de gravir la sente d’un pas lourd et atteignis le muret délabré qui cerclait mon exploitation. Posée sur le faîte d’une petite colline aux coteaux herbeux, elle avait étendu ses cultures sur ces douces pentes. Une vieille masure calcinée, blottie contre le tronc d’un chêne massif aux branches étoilées cramoisies, avait autrefois servi de remise aux outils de culture, mais aussi de séchoir et d’abri d’appoint. Cela avait été ici ! Comment oublier notre joie, avec Myrha, lorsque nous avions vu germer notre première pousse ? Depuis lors, l’eau avait abondamment coulé et les lunes s’étaient blanchies à foison… Cependant, en cet instant suspendu, je me souvins précisément de son exaltation lorsqu’elle m’avait hélé pour me montrer le germe téméraire au milieu du champ labouré. J’avais alors abandonné ma tâche de forçat consacrée à la reconstruction assidue de ce muret d’enceinte.
Désormais, sous ce ciel ténébreux, ce joyeux souvenir s’envola. Là, ferme et pousses, n’étaient plus. Saccagée et éventrée, la chaumière carbonisée s’écroulait sous sa charpente charbonnée. À ses côtés, le fier chêne ressemblait à un spectre décharné, si noirci qu’aucune feuille ne verdirait plus sur ses hautes branches, tout comme les rares plantations encore visibles qui jaunissaient et s’asséchaient sur les flancs pentus qu’il dominait jadis avec majesté.
J’enjambai le mur d’enceinte écroulé sur lui-même et, tout aussi abattu que lui, je maudis l’Ombre et ses séides venus dévaster mon domaine. Désormais, la force de l’Ennemi était telle, que sa hardiesse poussait ses sbires à s’aventurer effrontément jusqu’au plus près de nos terres. Comme un futile baroud, je me baissai et, d’une main ferme, saisis une pierre de bonne taille au bas du muret pour, rageur, la replacer au plus haut. Mais, à l’image de mon impuissance, elle ne tint que quelques secondes en équilibre et dégringola en ricochant jusqu’à mes pieds. Ce fut à cet instant que l’orage éclata et que je les vis.
Un torrent d’eau pissa sur mon être comme une vessie pleine trop longtemps retenue. La pluie diluvienne dégoulina sur mes sourcils et troubla ma vision des deux Wargs chevauchés. Immenses loups aux crocs menaçants, ils avançaient vers moi avec assurance, tels deux prédateurs certains de dévorer une proie patente. Sur leur échine, les Orques portaient un casque en fer rudimentaire qui masquait leur hideuse gueule. Une maille rouillée épousait leur torse et chacun empoignait une courte lance. La pluie redoubla d’intensité et son martèlement assourdissant couvrit le tintement mat que fit ma lame lorsque je l’extrayais de son fourreau. Là, trempé jusqu’aux os, suspendu au trépas, arqué sur mes jambes, je restais debout, mes deux poignes serrées sur mon pâle tranchoir, juste derrière un piètre muret affaissé. Un éclair zébra les cieux et les deux vilains avec fulgurance. Puis, le tonnerre grogna sa supplique et la furie débuta.
Je ne sais comment ma première passe fut digne d’un maître d’armes aguerri. Le premier loup bondit sur moi. J’évitai sa morsure d’un mouvement contraint et défensif, me plaquant au bas du muret lorsque la bête le survola. Les jambes fléchies, je saisis l’aubaine de son abdomen découvert et y plantai profondément Nimgalgôr. Emporté par l’élan de la bête mortellement blessée, je n’eus pas le choix : je lâchai ma lame pour, de toutes mes forces, empoigner de mes deux mains libérées la lance ferrée de son cavalier et éviter l’éventration. Entraîné dans la chute de sa monture, l’Orque brisa net sa lance et dégringola sur moi de tout son poids. Déséquilibré par le choc de notre collision, je ne pus éviter la bascule et partis en arrière. Mon dos heurta rudement les pierres moussues du muret. Je rebondis comme un pantin désarticulé et mes poumons se vidèrent en un souffle rauque. Néanmoins, chanceux, je réussis à tournebouler et me retrouvai à califourchon sur mon assaillant. Groggy, je retournai maladroitement l’empan pointu de la lance brisée et, fermement tenue, l’enfonçai sèchement dans sa gorge découverte. Un flot sanguin aspergea mon visage lorsque, hargneux, je l’extirpai de la plaie béante. Le visqueux liquide se répandit en abondance sur le sol boueux pour s’y noyer. Ma gorge cracha un cri victorieux. Pauvre idiot ! Dans mon dos, j’entendis grogner le deuxième loup qui venait de franchir sans peine la muraille pierreuse. Je me retournai et, assis sur mon céans, reculai piteusement jusqu’à m’adosser au fragile fronton. La bête m’approcha, lentement, emprise d’une sérénité prédatrice. Son affreuse gueule s’entrouvrit sur deux rangées de canines acérées. Et, lorsque son cavalier cracha sa belliqueuse injonction en langue noire, elle se jeta sur moi avec une vitesse prodigieuse. Je fermai mes yeux tout en projetant fermement en avant ma piteuse arme de pointe. Insolemment, celle-ci s’engouffra dans la gueule assassine qu’elle transperça jusqu’au crâne du loup, le tuant net. Sa lourde masse s’avachit instantanément et recouvrit pesamment mes jambes et mon torse. Immédiatement privés d’oxygène, mes poumons s’enflammèrent. Tel un rat pris dans une ratière, allongé, coincé et suffocant sous ce poids gourd, l’incessante pluie ruisselait sur mon visage terreux. Essoufflé par mes vaines tentatives libératoires, j’expectorai bruyamment et tentai encore de me dégager. Sans succès. Soudainement, l’eau cessa de tambouriner ma face époumonée… Je levai un regard incrédule face à l’évidente évidence : jucher sur sa créature, le dernier Orque me recouvrait de sa hauteur et me toisait. Doucement, très doucement, sûr de sa domination, il se courba légèrement vers moi et abaissa son poignard vers ma glotte. Derrière la nasale de son minable heaume, ses deux yeux pétillèrent d’une exaltation meurtrière et ses lèvres esquissèrent un rictus carnassier. Désarmé et entravé, las et vaincu, inondé d’une pluie battante, mon regard se troubla. La silhouette de mon bourreau se flouta à travers le rideau d’eau et devint celle, terrifiante, d’un spectre noir, aussi noir que le plumage d’un corbin. Son poignard égorgeur n’était plus la vilaine dague crénelée d’un Orque piteux, mais maintenant la terrible lame effilée du Roi-Sorcier, prête à s’abattre pour trancher à jamais le fil une destinée saugrenue, la mienne. Je criai mon impuissance et pleurai ma quête inassouvie. Je hurlai mon dégoût de périr si futilement, sans bravoure ni honneur… Non, gauchement étendu et vaincu !
L’incessante pluie tapageuse ne couvrait plus mes vociférations rageuses, nées de mon infinie frustration. Elles devinrent soudainement si intenses, qu’elles vrillèrent mes propres tympans. Sans échappatoire, j’agitais frénétiquement ma dextre restée libre de ses mouvements, tel un étêté parcouru de ses derniers tremblements nerveux. Labourant le sol boueux, ma main cogna brusquement une pierre moussue, celle rétive et narquoise qui avait chu au pied du muret juste avant l’orage. Je l’agrippai de mes doigts terreux et frappai, frappai, frappai encore, de toute ma hargne. Inlassablement, pour ne cesser que lorsque ma pogne cogneuse s’empoissa d’un sang chaud. Je ne sus quand la pluie cessa.
Muret
L’orage approchait, assombrissant le ciel d’un gris crépusculaire. Des grondements résonnaient, et des éclairs illuminaient l’horizon. Le déluge se profilait, rendant l’atmosphère lourde et moite en ce dernier jour d’été. La sueur perlait sur mon front alors que je gravissais la sente d’un pas pesant, chaque mouvement alourdi par la chaleur étouffante. En atteignant enfin le muret délabré qui entourait mon exploitation passée, je ressentais le poids de la nature qui s'apprêtait à libérer sa fureur.
Établies au sommet d’une colline aux coteaux verdoyants, mes cultures s’étendaient sur ces douces pentes en contrebas, jusqu’à atteindre une vieille masure calcinée, blottie contre le tronc d’un chêne majestueux aux branches étoilées de teintes cramoisies. Autrefois, ce lieu m’avait servi de remise pour les outils agricoles, de séchoir et d’abri d’appoint, un refuge chargé de souvenirs. Oui. Que de souvenirs ici ! Comment oublier la joie partagée avec Myrha en voyant germer notre première pousse ? Depuis lors, l’eau avait coulé à flots et les lunes s’étaient succédé. Pourtant, en cet instant suspendu, je me remémorai précisément son exaltation lorsqu’elle m’avait hélé pour me montrer le germe téméraire au milieu du champ fraîchement labouré. J’avais alors mis de côté ma tâche de forçat, consacrée à la reconstruction acharnée de ce muret d’enceinte.
Or, sous ce ciel sombre, ce souvenir joyeux s’évanouissait. La ferme et ses pousses n’étaient plus. Dévastée et éventrée, la chaumière calcinée s’effondrait sous le poids de sa charpente consumée. À ses côtés, le fier chêne ressemblait à un spectre décharné, si noirci qu’aucune feuille ne verdirait plus sur ses hautes branches, autrefois majestueuses. Les rares plantations encore visibles sur les pentes qu’il dominait jadis dépérissaient, jaunissaient et se desséchaient, témoignant d’un passé révolu.
Je franchis le mur d’enceinte écroulé, aussi abattu que lui, maudissant l’Ombre et ses sbires venus ravager mon domaine. Désormais, la force de l’Ennemi était telle que sa hardiesse entraînait ses éclaireurs à s’aventurer sans vergogne jusqu’aux confins de nos terres. Dans un geste désespéré, tel un dernier baroud, je me baissai et, d’une main ferme, saisis une pierre de taille au bas du muret, que je tentai de replacer avec rage à une meilleure hauteur. Mais, reflet de mon impuissance, elle ne parvint à tenir qu’un bref instant avant de chuter, rebondissant jusqu’à mes pieds. C’est alors que je les vis et que l’orage éclata.
Un torrent d’eau s’abattit sur moi, telle la vessie d’une vache se soulageant après une trop longue attente. La pluie diluvienne ruisselait sur mes sourcils et troublait grandement ma vision des deux Wargs qui s’avançaient avec assurance, tels deux prédateurs convaincus de dévorer une proie facile. Leurs chevaucheurs, deux Orques, arboraient un casque en fer rudimentaire, masquant leurs horribles faciès. Une armure en maille rouillée épousait leur torse, et chacun tenait une courte lance. La pluie redoubla d’intensité et son martèlement recouvrit le bruit sourd de ma lame que j’extrayais de son fourreau. Trempé jusqu’aux os, suspendu à la mort derrière un muret affaissé, les jambes fléchies, je restais là, les poings serrés, l’épée au clair.
Un nouvel éclair zébra le ciel, illuminant mes ennemis, suivi du grondement du tonnerre qui annonçait l’inévitable confrontation. Dans ce décor chaotique, où l’éclat des éclairs se mêlait à l'obscurité des nuages, déformés par l’ombre et la pluie, si proches, ceux-ci m’apparurent plus menaçants que jamais.
Ma première passe fut digne de celle d’un maître d’armes aguerri lorsque le premier loup bondit sur moi. J’évitai sa morsure d’un mouvement contraint et défensif, me plaquant au bas du muret lorsque la bête le survola. Les jambes fléchies, je saisis l’aubaine de son abdomen découvert et y plantai profondément Nimgalgôr. Emporté par l’élan de la bête mortellement blessée, je n’eus pas le choix : je lâchai ma lame pour, de toutes mes forces, empoigner de mes deux mains libérées la lance ferrée de son cavalier et éviter l’éventration. Entraîné dans la chute de sa monture, l’Orque brisa net sa lance et dégringola sur moi de tout son poids.
Déséquilibré par le choc de notre collision, la bascule fut inévitable et je partis en arrière. Mon dos heurta rudement les pierres moussues du muret. Je rebondis comme un pantin désarticulé et mes poumons se vidèrent en un souffle rauque. Chanceux, je réussis à tournebouler et me retrouvai à califourchon sur mon assaillant. Groggy, je retournai maladroitement l’empan pointu de la lance brisée et, fermement tenu, l’enfonçai sèchement dans sa gorge découverte. Un flot sanguin aspergea mon visage lorsque, hargneux, je l’extirpai de la plaie mortelle. Le visqueux liquide se répandit en abondance sur le sol boueux pour s’y noyer. Ma gorge cracha un cri victorieux.
Pauvre idiot ! Dans mon dos, j’entendis grogner le deuxième loup qui venait de franchir sans peine la muraille pierreuse. Je me retournai. Toujours assis sur mon séant, je reculai piteusement jusqu’à m’adosser au fragile fronton. La bête m’approcha lentement, emprise d’une sérénité prédatrice. Son affreuse gueule s’entrouvrit sur deux rangées de canines acérées. Et, lorsque son cavalier cracha sa belliqueuse injonction en langue noire, elle se jeta sur moi avec une vitesse prodigieuse. Un bête réflexe me fit instantanément fermer les yeux tout en projetant fermement en avant ma piteuse arme de pointe. Insolente, celle-ci s’engouffra dans la gueule assassine qu’elle transperça jusqu’au crâne du loup, le tuant net. Sa lourde masse s’avachit instantanément et recouvrit pesamment mes jambes et mon torse. Je me retrouvai piégé sous cette carcasse inerte, le souffle coupé par le poids de la bête. Tel un rat pris dans une ratière, allongé, coincé et suffocant, mes poumons se débattaient dans un effort désespéré pour aspirer l'air. La pluie s’en moquait bien, elle continuait de tomber sans discontinuité, se mêlant à l’odeur du sang qui imprégnait l’air. Il fallait me libérer, je savais que le cavalier de ce loup n'allait pas tarder à réagir. Je me contorsionnai avec effort. Sans succès. Essoufflé, j’expectorai bruyamment et tentai encore de me dégager.
Soudainement, l’eau cessa de tambouriner ma face époumonée… Je levai un regard incrédule devant l’évidente évidence : juché sur le cadavre de sa monture, le dernier Orque me recouvrait de sa hauteur et me toisait. Doucement, très doucement, sûr de sa domination, il se courba légèrement vers moi et abaissa son poignard vers ma glotte. Derrière la nasale de son minable heaume, ses deux yeux pétillèrent d’une exaltation meurtrière et ses lèvres esquissèrent un rictus carnassier.
Désarmé et entravé, las et vaincu, inondé d’une pluie battante, noyé dans la boue, mon regard se troubla. La silhouette de mon bourreau se flouta à travers le rideau d’eau et devint celle, terrifiante, d’un spectre noir, aussi noir que le plumage d’un corbeau. Son poignard égorgeur n’était plus la vilaine dague crénelée d’un Orque piteux, mais maintenant la terrible lame effilée du Roi-Sorcier, prête à s’abattre pour trancher à jamais le fil d’une destinée saugrenue, la mienne. Je criai mon impuissance et pleurai ma quête inassouvie. Je hurlai mon dégoût de périr si futilement, sans bravoure ni honneur… Non, gauchement étendu et vaincu !
L’incessante pluie tapageuse ne couvrait plus mes vociférations rageuses, nées de mon infinie frustration. Elles devinrent si intenses qu’elles vrillèrent mes tympans. Sans échappatoire, j’agitais frénétiquement ma main libre, tel un corps sans tête agité de derniers spasmes nerveux. Labourant la terre boueuse, ma main heurta soudain une pierre moussue, celle-là même qui avait glissé au pied du muret avant l’orage, retorse et moqueuse. Je l’agrippai et frappai, frappai, frappai encore, libérant toute ma hargne. Inlassablement, pour ne cesser que lorsque ma pogne cogneuse s’empoissa d’un sang chaud. Je ne sus quand la pluie cessa.