Lorsque Gonzague rentre dans ses pénates de fortune sur le côté du chantier de l’Archibald, il fait déjà nuit. Michel le Cogneur monte la garde, sa hache à la main.
- « Eh, capitaine, y a le Bosco qui vous attend dans vos appartement… »
- « Il avait l’air beurré quand il est arrivé ? » demande Gonzague.
- « Un peu ouais, il titubait grave. Mais bon, c’est mon supérieur lui aussi, hein… »
Gonzague ouvre la porte, et s’étonne de trouver la pièce obscure.
- « Gontran, t’es où mon couillon ? T’es encore raide comme une saillie, c’est ça ? » demande-t’il en allumant la lanterne à côté de la porte.
Il n’entend aucune réponse, tout juste un murmure, ou est-ce un gémissement ?
La lumière de la lanterne éclaire maintenant la petite pièce, et Gonzague a un sursaut en voyant, affalé contre le mur du fond un Gontran au visage plus blanc que neige. Tout autour de lui, son sang écarlate c’est répandu dans la pièce. Gonzague voit que la poitrine de son second bouge encore sous le coup d’une respiration sifflante, et pousse un hurlement :
- « Michel, va me chercher un chirurgien, fissa ! »
Ce cri semble réveiller le blessé. Ses yeux papillonnent, et lentement, se dressent vers le visage inquiet de Gonzague qui s’est penché sur le blessé.
- « Vous bilez pas patron, j’en ai plus pour longtemps… » chuchote le blessé.
- « Dis pas de conneries, Gontran, on va te sortir de là ! »
- « Patron, avant de partir, je veux vous dire pardon… »
- « T’as rien à te faire pardonner, qui ne s’est pas pris une lame d’ivrogne dans le bide n’a jamais connu de tripot… »
- « Patron, ils avaient ma sœur… depuis le début… »
- « Quoi ? De quoi tu parles ? Qui avait ta sœur ? »
- « Ils voulaient que je note tout. Les directions, les courants, tout… Pour pouvoir trouver Terre-Neuve… Le charpentier, c’est moi qui l’ai buté. Il avait découvert mes notes… »
- « Quoi ? »
- « Faut me comprendre… Ils ont ma sœur. Je voulais la sauver… »
- « De qui tu parles ? C’est qui ‘ils’ ? »
- « Faut sauver ma sœur, patron ! Je leur ai rien dit. C’est pour ça qu’ils m’ont planté… »
- « Mais de qui tu parles, bordel ? »
- « Faut sauver ma sœur, patron… »
- « Gontran, fait pas le con ! Gontran ! »
A ce moment là, Michel et Pierre font irruption dans la cahute.
Gonzague se retourne vers eux, le visage partagé entre tristesse et rage.
- « Trop tard… »
Mozart n'a pas écrit que le Boléro de Ravel. Mais aussi plein d'autres trucs beaucoup moins connus (comme le canon de Pachelbel). - Le Grümph
bravo !
ça change de la partie exploration, l'aspect politique est enlevé et j'aime l'idée du "traître insoupçonnable sur lequel on faisait pression et dont il faut en plus sauver la soeur"
on envie les joueurs.
1) tu veux pas venir habiter vers Genève pour que je puisse jouer avec vous ?
sinon j'adore, je trouve cela super intéressant. Je me demande juste quand est-ce que tu vas utiliser les règles de Reign sur la gestion des compagnies ?
La meilleure réponse que je puisse te faire est bientôt. Au stade de la narration où on était, la compagnie venait juste d'être constituée. On lui a attribué des scores à la fin de la session en cours de narration. La session suivante a vu un premier jet de compagnie. Donc patience sur ce point.
Quand à bouger à Genève, si ça se fait un jour, je te tiens au courant !!!
Mozart n'a pas écrit que le Boléro de Ravel. Mais aussi plein d'autres trucs beaucoup moins connus (comme le canon de Pachelbel). - Le Grümph
Je n'ai pas réagi plus vite car il me semblait bien que tu n'avais pas fini de poster. Différent mais toujours aussi interressant. Je te hais. Avec le temps la situation de manque / d'attente avait disparu. Avec ce nouveau shoot, je vais encore me connecter plusieurs fois par jour principalement pour vérifier s'il y a du nouveau sur ce CR (ou celui de Mouse Guard d'Udo). C'est malin ça.
Au milieu de la nuit, les associés de la compagnie de Terre-Neuve se retrouvent pour une réunion de crise. La capitaine Gonzague est énervé, furieux même, Martin est préoccupé, Jehan inquiet et Pierre affligé. Jehan suggère qu’il est impératif d’accélérer les opérations pour pouvoir repartir au plus vite. Il va même jusqu’à sous-entendre qu’il pourrait être envisageable de quitter Concorde alors que les réparations ne sont pas tout à fait terminées. Mais Gonzague ne veut rien entendre.
- « Il est hors de question qu’on parte sans avoir fait payer aux bâtards qui ont fait ça. J’ai promis à Gontran que je retrouverais sa sœur, je veux retrouver sa sœur. Gontran est mort parce qu’il m’est resté loyal jusqu’au bout du bout. Alors oui, tu te bouges les miches pour qu’on soit prêt à partir au plus tôt Jehan. Pierre, tu te charges de recruter un équipage avec Jehan. Je me charge de trouver un nouveau Bosco. Mais surtout, Martin et moi on va enquêter et on va retrouver les salauds qui ont troué Gontran. »
Ainsi dit, ainsi fait. Dès le lendemain matin, Gonzague et Martin se rendent à la petite bicoque insalubre qui servait de domicile à Gontran et sa mère, au cœur de Marquette. Gonzague tient à annoncer personnellement la nouvelle à la vieille femme, qui s’écroule en pleurs à la nouvelle…
- « D’abord ma fille, maintenant mon fils ! » hurle-t’elle au désespoir.
Gonzague essaie de la consoler en lui donnant une somme d’argent qui correspond au double de la solde que Gontran aurait normalement du recevoir, mais c’est sans effet. Martin, plus fin, parvient à la faire parler sur son fils, et au passage à glaner quelques informations.
Il apprend qu’effectivement, juste avant le départ de l’Archibald il y a presque un an, Annie - la sœur de Gontran - a disparu. Gontran était très agité, mais il a tout de même tenu à partir avec l’Archibald, malgré les circonstances. A l’époque, sa mère en avait été désespérée, mais le retour de son fils il y a quelques jours lui avait redonné du baume au cœur. A ce moment du récit, elle s’effondre de nouveau.
Martin la ramène à ces dernières semaines, lui demandant de raconter les faits et gestes de Gontran depuis son retour. Sa mère explique qu’elle l’avait trouvé changé. Plus sombre, plus sérieux. Elle avait même compris après quelques jours qu’il avait arrêté de boire. Elle avait pensé que c’était plutôt une bonne chose, mais elle avait également senti qu’il avait perdu sa joie de vivre…
Jehan et Martin font amener le corps de Gontran à sa mère et Gonzague prend en charge tous les frais liés aux obsèques. Pendant ce temps, Martin file des piécettes aux gamins du quartier pour qu’ils lui disent des choses sur Gontran. Il finit par apprendre que Gontran ne se rendait plus à son rade de prédilection à Marquette, mais qu’il traversait le port presque tous les soirs pour aller dans un rade à Vervin appelé le Nœud de Huit.
Avec ces informations, Martin revient aux chantiers Goudre pour retrouver ses acolytes.
- « J’ai bien réfléchi, et je pense que j’ai un plan », leur dit-il, « mais il va falloir la jouer fine. Ces gars nous espionnent de toute évidence depuis avant notre départ. On peut donc supposer qu’ils connaissent les commanditaires de l’expédition. Par contre, il y a de bonnes chances qu’ils ne connaissent pas le rôle qu’à pris Pierre dans notre compagnie. Voici ce qu’on va faire… »
Mozart n'a pas écrit que le Boléro de Ravel. Mais aussi plein d'autres trucs beaucoup moins connus (comme le canon de Pachelbel). - Le Grümph
Toujours aussi excellent!!
Ça fait plaisir de voir le fil reprendre vie! C'est vraiment l'ambiance Guildes, je trouve!
Et bon courage pour la rédaction!
Artesia: le retour au pays
Un pays sans loi, des brigands les mains ensanglantées, des livres qu'il vaut mieux ne pas lire, des cultes secrets et un chevalier de retour chez lui.
En fin d’après-midi, Pierre repasse au Nœud de Huit et discute brièvement avec Malbert. Il ressort quelques minutes plus tard, et, quelques rues plus loin il retrouve un Martin encapuchonné.
- « Ca y est, ils m’ont fait une proposition pour le carnet. Je dois me rendre ce soir à l’extrémité du quai de la Vierge juste après la fermeture du port. Ils sont ferrés ! »
A la tombée de la nuit, Pierre, Martin et Michel le Cogneur s’avancent à proximité du quai de la Vierge. Michel a sa hache à la main, et Pierre et Martin ont leurs épées au côté. Ils s’avancent discrètement et silencieusement vers l’extrémité du quai. Sous le couvert de la nuit, Michel et Martin se cachent derrière des grosses caisses en bois laissées à l’abandon sur le quai. Pierre lui s’assied sur une des caisses et attend en fumant une pipe.
A l’heure dite, Martin commence à scruter le quai sur toute sa longueur, mais personne n’approche. Soudain, Pierre entend une voix qui le hèle en contrebas.
- « Eh, l’artiste ! C’est toi Pierre le Chirurgien ? »
Pierre jette un œil et aperçoit une chaloupe. Il y a six hommes aux rames et un septième à la proue. Il fait trop noir pour qu’il puisse distinguer des traits de visage.
- « Oui, c’est moi… » répond-il.
- « Bon ben saute à bord, on a rendez-vous ! »
Pierre hésite un instant. Il voudrait parler à Martin, mais il ne peut pas le faire sans se trahir. Il jette un regard en arrière, mais en raison de l’obscurité il ne voit pas l’homme d’arme qui lui fait de grands gestes de ne pas y aller. Finalement, il se décide et s’apprête à descendre à l’échelle située à l’extrémité du quai.
Martin s’énerve, il ne sait pas quoi faire. Finalement, il se tourne vers Michel :
- « Balance leur une caisse sur la tronche, on en repêchera un pour le faire parler ! »
Michel s’exécute. Il soulève une lourde caisse de cordages et, de toute sa hauteur la jette sur la chaloupe. Pierre qui s’apprêtait à sauter de l’échelle à l’embarcation se plaque contre les barreaux lorsqu’il aperçoit cette ombre énorme au-dessus de lui. La caisse éclate au milieu de la chaloupe, avec force cris et hurlements. La chaloupe semble partiellement brisée, et les hommes s’éparpillent dans les flots. Sur le quai, Martin et Michel se tiennent, une corde à la main, pour jouer les sauveteurs d’un des marins. Pierre remonte en quatrième vitesse, l’air confus.
- « C’était ça le plan ? », demande-t’il interloqué à Martin.
- « Non, espèce de cruche. Mais toi t’allais te jeter dans la gueule du loup sans qu’on ait aucun moyen de te suivre. Enfin, tant qu’on en chope un pour l’interroger, tout ne sera pas tombé à l’eau… »
- « Euh, chef », dit Michel d’une voix pataude, « ils ont pas l’air de couler, les gars, ils ont l’air de nager… »
Martin regarde incrédule les marins de la chaloupe s’éloigner à la nage dans les ombres nocturnes du port.
- « Ils savent tous nager ? C’est pas possible… »
Il reste quelques instants interloqué puis il se tourne vers ses compagnons :
- « Pas de temps à perdre. L’aubergiste, c’est la seule piste qui nous reste. Il faut se grouiller avant qu’il soit prévenu ! »
Mozart n'a pas écrit que le Boléro de Ravel. Mais aussi plein d'autres trucs beaucoup moins connus (comme le canon de Pachelbel). - Le Grümph
BlackJack a écrit :Excellent le coup des marins qui se barrent en nageant ...... mon fou rire de l'apres midi
Toujours aussi agréable a lire tes comptes rendus
C'est pas si stupide que ça, en fait. Au moyen-âge, peu de marins savaient nager, et Martin fait la supposition (qui me va bien) qu'il en est de même à Concorde.
Comme on le verra par la suite, il est donc significatif que tous les marins se soient enfuis en nageant...
Mozart n'a pas écrit que le Boléro de Ravel. Mais aussi plein d'autres trucs beaucoup moins connus (comme le canon de Pachelbel). - Le Grümph