Le jeu ? Usagi Yojimbo
Le scénario ? Les remords du comte Arnulf, un vieux truc de Casus Belli, antépénultième formule, pour GURPS à l'origine, transposé trop rapidement par mes soins.
Les joueurs ? Black & White, Bakemono et Banshee (soit, deux Casus Nonistes, deux tric-traquistes, dont un bi-classé Voix de Rokugan et l'autre avec un L5R3 sous le bras). Ma belle-sœur qui dormait sur le canapé ne compte pas. Les haikus ont été composés par Christian, rokuganiste de passage, si je ne me trompe pas sur le prénom.
Les personnages ?
Shin, un ours yamabushi.
Hiroshi Ma Sanitaka, une putois yojimbo.
Saburo, un rhino jardinier, en réalité du clan ninja Toki.
Ryu, un renard fuyard au passé dangeureux.
Mais que s'est-il passé en définitive ?
Tout commence une soirée de printemps, dans la province de Tosa. Alors que le soir tombe doucement, deux silhouettes déguenillées arrivent à l'auberge ... [White plaisante déjà sur le fait que toutes les aventures commencent dans une auberge, Black amorce un petit somme à la table]. Le village de ... porte les stigmates de la guerre récente, le daimyō local, Yoshi Takitada, ayant choisi le mauvais camp. Franchissant le pas de porte, Shin et Hiroshi remarquent que les autres clients de l'établissement sont un groupe de gardes et quelques ashigarus démobilisés qui rentrent chez eux. Si, dans un premier temps, personne ne fait attention à eux, l'odeur d'Hiroshi attire rapidement les regards ; quelques murmures désobligeants auxquels se joignent diverses grimaces agitent un instant l'assemblée. Impassible, nos deux compères prennent place et commandent de quoi se sustenter ; on ne leur sert qu'une soupe au miso plutôt légère, tout le riz ayant été donné aux gardes [ici, le MJ (moi) espérait, histoire de bien démarrer l'aventure, partir sur un duel, mais la provocation n'a pas pris, avec un joueur qui dort et l'autre qui reste sourd à toutes mes insultes voilées
]. Shin parcourt la région dans le cadre d'un pèlerinage, tandis qu'Hiroshi, rōnin désargentée de son état, cherche un employeur. Pour ce qui est du manque de ressources fiduciaires, Hiroshi en ajoute une couche en jouant avec les gardes et perd ses dernières pièces [échec critique, je n'ai pas eu besoin d'être méchant].Tous deux vont se coucher et passent, ma fois, une fort mauvaise nuit, continuellement dérangés par les ahanements incessants provenant d'une pièce voisine. Les cloisons en papier, c'est esthétique mais ça n'isole pas beaucoup [voilà pour l'ambiance japonaise, merci]. Shin envisage un instant de faire cesser, séance tenante, ces accouplements sonores et malvenus, mais la silhouette d'un garde en faction dans le couloir suffit à l'orienter sur la voie de la non-action. C'est ainsi que Bouddha est grand.
Voilà donc le soleil qui se lève et, avec lui, tous les occupants l'auberge. À quelques heures de là, Saburo inspecte le jardin de la forteresse de Tagame et quelle n'est pas sa surprise de découvrir deux éléments perturbateurs dans son agencement pourtant quotidiennement soigné. D'un côté, près du bassin aux carpes, trois galets noirs ont été disposés en triangle. Saburo les éparpille rapidement, mais il sait que ce soir, sous le saule en bordure des remparts, quelqu'un viendra lui donner de nouvelles instructions. De l'autre, un étrange fruit pend à la branche d'un cerisier : oui, il s'agit bien d'un renard, ligoté, la tête en bas, et qui achève sa nuit comme si de rien n'était.
Fleur de cerisier
Choit de son arbre au printemps
Et renard de même ?
Intrigué, Saburo s'approche de l'arbre, le secoue un peu, et commence à discuter avec l'intrus, tête-bêche. Ryu était venu au château retrouver une amie d'enfance, Izumi Takitada, la fille du daimyō, mais il s'est fait refouler par les gardes à l'entrée, au prétexte que le daimyō n'avait jamais eu de fille ! Décidé à percer ce mystère, il s'est introduit durant la nuit mais a été capturé. Trahi comme ninja par certaines pièces de ses bagages, il ne dut de ne pas être aussitôt exécuté qu'en raison de l'absence de l'intendant Hirozuge, les gardes préférant attendre son retour.
[Nous avions commencé sans lui, il a bien fallu que je trouve une façon de l'introduire, le renard, déjà que je ramais comme un fou pour les lancer dans le scénario et les rassembler tous les trois...]
Cela dit, notre renard élude toutes les questions et ne mentionne pas Izumi. À défaut de comprendre ce qui a pu amener Ryu au château, Saburo, pragmatique, décide de le décrocher et de l'employer à creuser une tranchée dans son jardin ; au moins celui-ci aura gagné sa pitance et un peu de soulagement à pouvoir contempler le monde dans le bon sens. Le soleil poursuit sa course dans le ciel...
Parfum de Fennec
Recouvre fraîche rosée
Au petit matin
Les roseaux apprécieront
L'alchimie de ces fragrances
Pendant ce temps, à l'auberge, Shin et Hiroshi absorbent leur maigre pitance en silence. Un grassouillet personnage, le kimono mal fermé, les yeux mal ouverts, titube à travers la pièce et s'installe à son tour à une table. Quelques instants passent, uniquement troublés par les déglutitions sonores du riche individu, qui ne semble pas avoir remarqué nos deux héros dégueunillés. N'écoutant que son estomac, et au mépris de toute convention, Shin s'approche du mangeur mâtinal et entreprend de nouer la conversation. Hiroshi, surpris autant que choqué, reste la bouche ouverte sans bouger. Contre toute attente, Shin reçoit un accueil favorable ; sans doute ses ébats nocturnes, dont nos compères ont fait les frais, sont-ils pour quelque chose dans la bonne humeur de Kenichi Hirozuge, intendant de son état. Quelques chuchotements plus tard, Shin revient s'asseoir aux côtés d'Hiroshi, sourire au lèvres et faisant sauter joyeusement quelques pièces dans sa main. Sans attendre, Hiroshi se précipite à son tour auprès de l'іntendant, faisant état de ses compétences de garde du corps, et tout, et tout. Las ! Celui-ci le congédie sans guère considérer son rang, non sans lui avoir jeté une poigné de pièces, charge à lui de consulter le moine (Shin) pour savoir ce que l'intendant attend de lui. Bien dure est la vie d'une putois rōnin.
"Vois-tu, explique Shin, le seigneur Hirozuge souhaite servir son maître, le daimyō Takitada, qui est bien malade. L'avenir du clan Takitada est menacé, car il n'y a pas d'héritier mâle, ni d'héritier tout court. Or, Hirozuge se souvient que le daimyō a eu une fille, qu'il a répudiée pour s'être entichée d'un palfrenier. C'est une bien terrible histoire, que tous ont oubliée, car Hirozuge a tout fait pour effacer l'existence de cette fille. Mais aujourd'hui, le retour de cette descendante pourrait sauver l'avenir du clan. Bref, toi et moi n'avons qu'à la retrouver, et notre fortune est faite !"
"Hum, rétorque Hiroshi, à qui cette affaire ne plaît guère, et pourquoi ne la recherche-t-il pas lui-même ?"
"Tout simplement parce qu'Izumi (la fille du daimyō) a été tellement persécutée qu'elle se méfie certainement encore aujourd'hui des hommes de son père. D'ailleurs, le seigneur Takitada n'est lui-même pas au courant de l'initiative de son intendant. Il faut le placer devant le fait accompli, c'est le seul moyen de lui faire accepter la réhabilitation de sa fille."
Sur ce, Shin et Hiroshi se mettent en route vers la forteresse, où ils comptent bien retrouver des traces d'Izumi. Le soleil poursuit sa course dans le ciel...
Arrivés aux portes de la forteresse, Shin et Hiroshi ont beau insister, les gardes refusent de les laisser entrer. Si on devait laisser passer tous les gueux qui prétendent avoir été embauchés par l'intendant, autant laisser les portes ouvertes. Heureusement, un cavalier à la mine sévère intervient, et nos deux héros pénètrent à sa suite dans l'enceinte du château. Ce cavalier n'est autre que Fumetsu, le chef des gardes de la forteresse. Il accompagnait l'intendant dans son périple mais, ce matin, un messager est venu lui parler de ce renard, ninja putatif, capturé la nuit même. Impatient de tester sa lame et son art de la décapitation, Fumetsu a rebroussé chemin. Le soir arrive, tandis que Shin et Hiroshi peinent à trouver une piste: Shin prête main forte aux cuisine, dérobant tout ce qu'il peut dans les plats à droite et à gauche, Hiroshi sue à grosses gouttes dans la forge du maréchal-ferrant ; mais d'Izumi, point de trace. Nul n'a entendu parler d'une quelconque fille du daimyō.
Pour Saburo, il est temps de raccrocher le renard...
Ryu gardera-t-il sa tête sur ses épaules ?
Quelle est donc la mission secrète de Saburo ?
Shin finira-t-il l'aventure le ventre plein ?
Hiroshi saura-t-elle faire oublier son odeur ?
