[CR] Millevaux et autres jeux Outsider

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Pikathulhu
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Re: [CR] Millevaux et autres jeux Outsider

Message par Pikathulhu »

LA DERNIÈRE ASCENSION

Une hirondelle à épargner, une cordée sauvage et des araignées vengeresses. Un récit par Claude Féry.

(temps de lecture : 7 min)

Joué le 03/05/2020

Le jeu :Verticales, une folle ascension par Melville

Univers : La forêt de Millevaux


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James C Farmer, cc-by-nc-nd


Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).


L'histoire :

Suite de la partie intitulée L'Essai

Le Chroniqueur Liberté est venue étudier parmi nous le train de rouille. Elle a quitté sa cellule, désormais vouée à la destruction par les bergers du givre, les arianoï.
Elle doit porter sa voix au-delà du Lamantaou,
Elle doit être le satellite Liberté qui informera Cathédrale des mouvements arianoï.

A presque-aube, Kif ooh l'ancien, propose aux premiers de cordée de sacrifier rituellement une hirondelle devant l'assemblée des fuyards. Chacun doit l'égorger de ses dents. Si son compatriote, Pognefer, s'exécute sans hésiter, rejoint par leur guide, Cartage, très solennel, le chroniqueur libère l'hirondelle, qui s'éloigne d'abord vers la vallée ou les arianoï dressent le bûcher sacrificiel, puis remonte droit vers les hauteurs du Lamantaou pour se perdre dans les nuages.
Une bonne augure...
Alors, désignant le chroniqueur de sa sagaie, le torse bombé et les muscles saillants, le Kif ooh l'accuse de mener la communauté à sa perte en servant ses obscures intérêts.
Le Chroniqueur déclare atone que c'est un rituel inutile.
Puis gêné par la pointe accusatrice de la lance, le chroniqueur projette un éclair qui la noircie et roussi le poil du guerrier.
-« Couché ! A la niche le chien ! »
Celui-ci s'empresse de porter un genou en terre en signe de déférence et déclare se soumettre au « maître Chroniqueur ».
Alors Il tend la main pour sceller cette nouvelle alliance par un très naturel « tout est lié » et lui glisse à l'oreille, fielleux :
-« Tu ne perds rien pour attendre, on se retrouvera, gamine ! ».
Liberté est ébranlée.


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Ce regard, qui darde derrière le masque blanc du fléau ne lui est pas inconnu. Les circonstances lui échappent cependant. Les effets délétères des pollens de Pandora, le syndrome de l'oubli ? Non.
Cela remonte en elle, la bouscule, la chavire. Ce regard appartient au Fléau qui la vendit enfant aux maîtres de Cathédrale, celui qui incendia son village, tua ses parents, violenta les femmes et réduisit en esclavage les survivants. Son sort fut probablement plus heureux que celui de la plupart d'entre eux. Ne rien laisser paraître de son trouble, demeurer impassible derrière son masque, conserver son calme et son détachement, apanage de sa puissance…
Cartage après soutenu le rituel s'efface et la cohorte s'ébranle craintive sous la pinède. A la mi journée, Cartage tire les cartes au Chroniqueur pour resserrer leurs liens. La vérité est au bout de leur sente. Le Chroniqueur demeure dubitatif, mais ne s'épanche pas. Profitant de la réunion, le vieux Kif ooh se glisse jusqu'à elle discrètement et lui sussure : -« N'aies craintes je te suivrais et soutiendrait tes choix ! » Pognefer harangue les fuyards et décrète qu'il conviendrait de former deux groupes, la troupe très nombreuse est trop lente. Kif ooh tombe d'accord mais le défi pour déterminer qui mènera la cordée d'éclaireur. Si le jeune a la fougue, lui a l'expérience. Le combat qui s'ensuit est bref et sans appel. Kif ooh bascule cul par dessus tête pour manger la terre. Très vite il se redresse et organise les préparatifs. D'un ton sans appel il répartit les calcinateurs entre les hommes valides les plus costauds et répartit leur charge de vivres entre les enfants. Si bien que Pognefer peine à trouver un sherpa pour la cordée. Ce sera Dimitri, un pâtre assez grand et plutôt robuste. Pendant qu'ils négocient sous le regard impénétrable du Chroniqueur, Kif ooh revient vers ce dernier et lui glisse dans un souffle : « faudra qu'on ait une conversation d'homme à femme... » Liberté est rassurée de savoir le Kif ooh en charge de l'arrière garde... Puis l'ascension reprend en deux groupes distincts. Rapidement les éclaireurs distancent la troupe hétéroclite et inquiète


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L'après-midi est une longue et pénible ascension.
La masse de l'émetteur récepteur pèse cruellement sur les épaules de Liberté. Les sangles entament ses chairs, le poids la déséquilibre. Elle sollicite Dimitri qui est encombré des cordes et piton. Il regimbe et Cartage s'en mêle et porte son sac en plus du sien.
Parvenu au temps du bivouac il se refuse à lui restituer son sac.
Pognefer s'écroule comme une souche après un repas frugal.
Cartage s'éloigne pour s'abriter sous un vieux pin isolé aux racines tourmentées, non sans avoir craché dédaigneusement sur le chroniqueur interloqué mais mutique.
Le matin à son réveil il découvre un amas de toiles blanches. Non loin une araignée de la taille de ses deux poings réunis le contemple de ses yeux multiples.
Alors qu'il se redresse elle se jette sur lui. De sa cape il la repousse pour la saisir à pleines mains et l'écraser pour répandre sur le tapis d'aiguilles de pins son pus de corps.
Dimitri arrive alors et l'enjoint très inquiet et un poil suspicieux à s'assurer de ne pas avoir été mordu, la voie, le chemin de la sepsie, vers l'aberration de la brûlure et la disparition de toute humanité.


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Gabrielle joue Cartage


Liberté s'était éloignée afin de manger à l'abri des regards. Mais Dimitri se glisse auprès d'elle et la surprend, tête nue, sans son masque ni sa capuche.
-« Je ne savais pas que vous étiez une dame. Si j'avais su j'aurais pas refuser de porter votre fardeau.. C'est entendu je m'en charge dorénavant. Je vous protégerai aussi » et il lui montre sous sa vareuse un pistolet bien huilé.
Vous n'êtes pas obligée de demeurer seule... « C'est quoi votre p'tit nom ? Moi c'est Dimitri, je suis un ancien voïvode...  »
Avisant la nuque pale de Liberté et son code barre tatoué,« c'est votre nom ? »
-« Euh non, enfin oui, mais ne m’appelez plus madame. »
-« C' est quoi votre nom Madame ? »
-« Liberté, mais... »
-« Vous inquiétez pas votre secret sera préservé, mais vous ne serez plus seule »
Puis il s'est emparé de son sac détenu par Cartage lui a restitué.
Avant de dormir Liberté s'est connectée et a capté une porteuse, un message étrange en provenance du sud, sud est, qu'elle a enregistré.
Le lendemain au réveil, elle découvre une fleur de montagne épargnée par le froid, au creux de son gant, fraîchement coupé.
Mais très vite, ce sont les cris de panique de Pognefer qui captent son attention.
Une araignées augure, une araignée du givre le menace.
Sans hésiter elle la grille de sa canne électrique.
Dimitri les rejoint.
Il a perdu les noisettes qu'il avait récoltées pour elle dans la précipitation.


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La nature de la montagne change. Une neige duveteuse couvre le sommet. Non ce ne sont pas les flocons mais les amas de pollens de la forêt fractale. Un mur réputé infranchissable.
Ce jour, c'est du géant de granit dont ils entreprennent l'ascension.
Une journée de crainte, d'efforts, de privations et de tensions.
Dimitri déséquilibré par le poids du sac de Liberté manque de dévisser.
Pognefer le repêche de sa sagaie.
Puis des pierres, un éboulement manque de peu de les emporter.
Pognefer est épuisé.
Enfin, la main hasardeuse de Cartage déniche un essaim de passereaux perce-peaux tente les déloger.
Et tout le jour, sous un soleil blanc et aveuglant la soif les taraude, et la faim griffe leurs viscères.
A presque nuit ils trouvent un étroit surplomb où bivouaquer, sans feu, dans la froide nuit d'Oural
Ils entendent de l'eau couler.
Cela provient d'une crevasse.
Pognefer s'y coule armé de son pistolet et de sa matraque.
Il glisse et tombe sans véritable heurt dans un gouffre où coule une rivière.
Il étanche sa soif, remplit sa gourde et tente de remonter.
Il ne trouve pas de prises, et tintent les pattes d'une araignée.
Pris de panique à l' idée de devenir moins qu'un homme, il tire sa seule balle dans sa tempe.
Ses amis s'inquiètent et Liberté se risque dans l'obscurité avec son filtre magnificateur de lumière.
Elle découvre cinq araignées autour du cadavre du Kif ooh qu'elle abat de sa canne électrique.
Elle revient vers les autres et relate ses découvertes.
Dimitri veut aller chercher l'outre.
Liberté le retient. l' eau doit être souillée.
Cartage tire les cartes.
Seule la mort, des bombes gisent au dessous.
Ils renoncent.
Commence une nuit interminable.


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Gabrielle joue Cartage


Bilan :

Gabrielle moins enthousiaste tandis que Xavier et Alex étaient ravis.
Nous avons joué l'histoire et moins joué poétique.
Globalement nous sommes heureux de notre expérience et jouerons la suite prochainement, Xavier jouera les échos du passé.

A jouer également une session de réminiscences des enfants de la Lumière Noire avec 3:16 carnages dans les étoiles


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Xavier joue Pognefer


Commentaires de Thomas :

Encore un grand merci pour ce retour de partie !

B. Où la situerais-tu géographiquement ?

C. « A presque-aube, Kif ooh l'ancien, propose aux premiers de cordée de sacrifier rituellement une hirondelle devant l'assemblée des fuyards. Chacun doit l'égorger de ses dents. Si son compatriote, Pognefer, s'exécute sans hésiter, rejoint par leur guide, Cartage, très solennel, le chroniqueur libère l'hirondelle » : Cool :)

D. Si j'ai bien compris, le chroniqueur et Liberté sont la même personne. Pourquoi Liberté cachait son identité et son genre ?

E. Elle est vraiment trop belle cette araignée du givre. Dommage qu'elle ait été éclatée sans autre forme de procès.

F. « Enfin, la main hasardeuse de Cartage déniche un essaim de passereaux perce peaux tente les déloger. » Je ne comprends pas cette phrase.


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Alex joue Liberté


Réponse de Claude :

B. Au pieds des Mont Oural, portion méridionale, près du lac Tourgoïak puis en direction du Mont Lamantaou
C. L'un des rituels de départ proposé par Melville.
D. Un Chroniqueur est un Chroniqueur. Il assure son pouvoir, sa sa substance aussi par la crainte qu'il inspire au sein des masses superstitieuses. Il détient le savoir des artefact d'avant l’Eschaton, l'Apocalypse.
Les femmes dans les clans soumis aux raids des fléaux ont tôt fait d'êtres réduites en esclavage.
E. La partie n'est pas finie... Elles reviendront...
F. En cherchant à assurer une prise à tâtons, Cartage dérange une nichée de passereaux perce-peaux. Et ces derniers très mécontents de leurs becs acérés ont tenté de les faire dévisser.


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Xavier joue Pognefer


Thomas :

A. Donc c'est le même nom que la partie précédente jouée avec The Quiet Year ?


Claude :

Oui, de fait la partie jouée avec Une année de répit correspond au premier choix collectif de world building que propose Verticales. Le tableau propose un cadre géographique et une atmosphère. Cela a permis d'établir les souvenirs communs de la cordée et de partager les éléments qui donneront la couleur de la session de Verticales
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Message par Pikathulhu »

DE LA GUERRE DES OURS À LA COUR CORBELLE

Le résumé de trois séances de fin de la campagne, entre sentier de la guerre, visions chamaniques, arbres maudits à brûler et réconfort et malaise à la Cour Corbelle. Un récit par TapisVirginia, merci à lui.

(temps de lecture : 13 min)

Joué en ligne du 01/02 au 25/02/2021

Le jeu : L'Ordre et le Sauvage, la campagne de la guerre entre l’humain et l’animal dans le chaos forestier de Millevaux


Image
carolyngifford, cc-by-nc


Avertissement :

Les notes de Tapis démarrent à la moitié de la campagne et il prenait ces notes pour le groupe et non pour un public. Il est fort possible que beaucoup d'éléments manquent à la compréhension.
Tapis fait parfois quelques références méta. Tapis, c'est bien sûr lui-même (jouant Feuille) et Thomas, et bien c'est moi (le MJ).


Au service de Shub-Niggurath :


Résumé de la séance du 01/02

Dans l’épisode précédent:  Raboliot le goupil soigné de la pelade. Feuille et Porphyre sont allés voir les ours. Euthanasia la cheffe fanatique anciennement humaine contrôle les ours. 

Une fois le groupe retourné au convoi, rencontre de Neige par Asphodèle. Lui et son groupe sont des espions. Situation tendue, les humains en veulent aux goupils. S’ensuit une baston qui coûte  un bras à une humaine. 

Le groupe a vu une corax (Ratiboise) demandant des vaccins contre la pelade et des souches de la maladie. Feuille est revenu au convoi pour voir et tuer le Capitaine Brochet après une intense discussion. Le chef local des scientistes. « Vous souvenez-vous que je vous ai interdit de mourir ? Maintenant je vous y autorise » - Feuille tue le capitaine

On a donné les vaccins à Ratiboise mais pas la pelade. Elle nous propose d’aller à la cour corax.  Le chemin sera apparemment jonché de serviteurs du bouc au mille chevreaux.

Début de la partie : Il faut prendre une décision. Feuille propose que les goupils partent voir les ours. « Choisir un camp en son âme et confiance c’est quand on a à manger sur la table et du temps à perdre en réflexion" - Feuille.
« On veut que vous soyez conscient que nous suivre c’est aller du côté des ennuis » - Asphodèle
Thomas : « Tu peux regarder ce renard trop mignon et lui dire que tu veux pas d’eux »

Porphyre et Asphodèle veulent garder les goupils avec eux. Feuille renonce mais prévient : « Si la question se pose entre eux et nous, je prendrais systématiquement nous »

Les goupils suivants nous accompagnent :Renard d'eau, Craquogne, Croustille, Raboliot

Ratiboise : « Nous allons passer par la forêt des cauchemars. Vous allez affronter vos propres ténèbres. Vient le moment d’affronter les premiers cauchemars, mais les cauchemars de qui ? Cela sera Porphyre. Feuille attrape Croustille pour pas qu’il ralentisse le groupe

Le cauchemar de Porphyre est un rappel du rêve de la 1er séance. Les corax qui jugent les âmes. Avec la petite fille, sa fille ? Ou elle-même ? Elle réclame de l’aide, elle doit être sauvée, de qui, de quoi ? Nul ne le sait encore. Un cauchemar. Polymorphe, Polysémique. Porphyre se souvient de la marâtre qui la battait. Cette petite fille, c’est Porphyre. Elle se trouve face à elle-même.

La Chiquaude, la marâtre, tombe sur le dos de Porphyre : « Tu n’es rien, tu n’es qu’une bouche inutile, tu ne mérites pas tout ce que je te donne » Plein de corax volent ici et là. Le chœur des corax accuse Porphyre :  « Mauvais fille, tu es mauvaise. » « Tu nous ralentis, tu ne ramasses pas assez de bois ».


Feuille arrive voir Porphyre qui est dans un état végétatif. Porphyre demande « Qui je suis ? Qu’est-ce que j’ai fait ? » Du sang coule sur ses mains. Feuille « Tu peux pas rester te lamenter ici, même si tu serais dans ton droit », prend Croustille. 

Une scène force Porphyre à repartir se venger de ses souvenirs.
Dans la scène, Chipie : « Vous nous avez abandonnées dans la Voie Déchue, les écorcheurs nous ont trouvés. »
Feuille et Asphodèle tentent de ramener Porphyre. Asphodèle : « La forêt essaie de te garder ici. Avance. Viens, suis-moi«  « Je t’en supplie il faut que tu me suives ». Le corps de Porphyre se craque, il y a de la poussière. Porphyre suit Asphodèle. 

Une main sort de la terre pour attraper Porphyre (sans parvenir à le faire). Une main robot. Le décharné : « Je suis désolé ma fille, je t’ai laissée à la marâtre, je voulais te mettre à l’abri du besoin »  Feuille attrape Porphyre pour le mettre sur les épaules. 

Les arbres s'effondrent, ça projette de la boue et des écorces partout. La fin de la grotte est visible, la lumière au bout du tunnel. A la toute fin Porphyre dis à voix basse : « Je te pardonne ». Le décharné se met à pourrir rapidement, une petite fille en sort.

Le groupe est sorti du cauchemar. Asphodèle va vers Porphyre, Porphyre tombe en poussière pour de vrai. «  Qu’est-ce qu’il se passe Porphyre ? » demande-t-elle. « T’es ma fille maintenant » Feuille qui arrive comme un con « HÉ LES DEUX IL FAUT AVANCER »

Vous arrivez dans un endroit avec des déchets, des vieilles boîtes, des emballages de burger, des friteuses. Des déchets de plus en plus présents. « C’est envahi de manimaux ». Des humains sauvages qui deviennent animaux. Le groupe arrive dans une groupe rempli d’humains se comportant comme des animaux.  Ratiboise insiste pour aller voir l’alpha, Rax.

Feuille prend les devants. Iel parle pour expliquer sa vie, etc. Rax explique qu’il n’aime pas les humains, et qu’il n’aime pas la guerre. Il propose d’aller prendre des racines de la vérité ( Chamane grours sur le côté) 

Ratiboise. « Je suis un jeune corax, je suis parti voir le monde, tester des drogues »
Feuille « Je me porte volontaire ». Asphodèle qui accepte aussi la drogue parce que … Parce que.
Les tambours des manimaux sonne, les deux persos ont des réflexes vomitifs, la chamane force.  On vomit. « C’était une première potion qui servait juste à se nettoyer ». ( C’est vraiment des trous du cul)

Elle apporte alors le limon, les forces de la terre, pour rencontrer qui nous sommes vraiment.  « Il y a un mauvais moment à passer au début ». La chamane se met à faire des trucs chelou dont Thomas à le secret.  Thomas dit: « On dirait le nom d’un très ancien ». Tapis répondit « T’es vraiment un bâtard" Vous avez l’impression que votre tête explose, que vous êtes dans la 15eme dimension.
Asphodèle commence : Elle rencontre pourpre: « Tu me laisse pas assez de place » « Pourquoi je t’en laisserais ? » « Je suis ta sœur quand même, je vais te refaire vivre le jour de notre naissance. » Elles passent par un terrier.Il fait chaud, serré.

Quand elle sort du ventre de sa mère, la mère est maigre, très maigre. Elle commence à casser la nuque de ses renardeaux avec les mâchoires, en pleurant. Juste avant de mourir, Pourpre se réfugie dans la tête d’Asphodèle, Asphodèle est le seul renardeau préservé.
Asphodèle dit : « Je veux toujours être là pour elle ». Elles retrouvent leur corps d’adulte. 
« Comment j’ai fait pour t’oublier ? » « Je ne voulais pas que tu te reproches d’avoir survécu »

Côté Feuille ; Il fait froid, très froid.  C’est oppressant. Rax demande à Porphyre d’aider Feuille. Feuille se relève dans des feuilles mortes, la forêt est vide. Les racines viennent vers Feuille, se redressent, leur radicelles en avant, Approchent de la tête comme pour faire de la télépathie. Feuille ressent alors l’arbre. L’arbre dis « Je .. suis...Feuille » Il me fait plonger dans la forêt. « Je suis la forêt » « Tu es égoïste « « Je suis millevaux. »

Les manimaux proposent d’aller plus loin. Feuille n’en a pas l’envie mais la corax insiste sur la nécessité de cela. Discussion intense entre les deux.  Asphodèle annonce qu’elle s’est réconciliée avec sa sœur.

Le groupe arrive dans un arbre (genre séquoia géant). Hydra, Une femme aveugle est en train de prier « Je suis la boue, je suis la chair, …. Je suis la pourriture… Ya, ya, ya, Shhhhhbbb Nggggrrrrttt  » Le groupe laisse la parole à Ratiboise. « Nous sommes devenu écouté votre sagesse. » 
« Nous avons découvert Shub-Niggurath, qui est le principe de ville et le principe de mort. La chose appelle l’emprise,et l’égrégore. Il voit tout, il est tout. Tout ce qui est vie vient de Shub-Niggurath. Il n’a pas de message, il est une masse vivante. Gorgé d’emprise et d’égrégore. Nous sommes aux portes de l'apocalypse. Ce jour-là, il n’y aura plus d’angoisse, il n’y aura plus de haine. Hydra et la corax s'embrassent.
La chamane Rugne est un peu gênée.

« Qu’est-ce qui va déclencher cette apocalypse ? L'intensité de vie et de mort. »
Il ne faudra pas que l'apocalypse soit provoquée par la guerre.
L'apocalypse au sens révélation. Asphodèle n’a pas envie que Feuille et Porphyre tuent les cultistes. 

Feuille come again to save the day.

Choix entre défouloir ou sagesse ? 


Résumé du 09/02


Asphodèle vient voir Feuille, il lui explique son plan. « Tuez les plus possibles de cultistes ». Rugne, la chamane grourse, nous accompagne pour voir Hydra. Porphyre et feuille y vont franco.
Feuille étrangle Hydra et se souvient d’avoir vu et même fusionner à travers Shub-Niggurath.
Feuille a l’impression de s’être noyé, il regarde sur le côté et voit le cadavre de Rugne au Pied de Porphyre. 

« J’ai froid Porphyre, il faudrait pas faire un bon feu ? »

Ratiboise qui vient : « Qu’est-ce qu’il se passe ? » Feuille invente une explication toute pétée.
« Je vous renouvelle une dernière fois ma confiance »
  

Craquogne nous annonce un secret: « Quand j’étais plus jeune j’ai été capturée et dressée à débusquer les renards. » « Vous avez le droit de m’en vouloir » Asphodèle lui pardonne. Feuille dit que c’est pas grave, et il se parle à lui même sur ce qu’il a fait plutôt .


La Cour Corbelle :

On arrive chez les Corax, ils se situent dans l’Arbre-Monde dans un volcan éteint.
Le groupe avance dans un escalier, Porphyre pousse Croustille qui est lent

Il y a des mésanges anthropomorphes et habillées, comme les autres, qui sont ici et là.

Certains ont des perruques, ils jouent du cor. Le groupe est accueilli au sein de l'Arbre-Monde. Le groupe se présente.

Porphyre : « On veut en savoir plus sur ce qu’il se passe ici. »

Geai, un Corax défiguré du visage, est le sénéchal, et c’est à lui de faciliter la prise de décision du peuple corax. Une décision concertée doit être prise. Il y a 8 nobles, un par voie philosophie Corax.

Le groupe est représentant, émissaire, c’est un droit et non un devoir. Sagesse est notre guide.

Le groupe va au bain, après s’être une première fois décrassé. Le groupe décide d’aller rencontrer les nobles, notamment dans les bains communs

La personne qui s’occupe des bains, c’est une stryge. Une Corax mais intelligence d’animale.

Rencontre avec Ivoire :  « Le plus important pour un Corax est la forme humaine »


Résumé 15 /02 /2021


Ellipse, balcon d’opéra. Le groupe est bien habillé pour regarder un opéra qui s’appelle « Les noces de la plume et de la chair ». 

Une corax tient le rôle principale (Romance), elle possède un chant diphonique, elle tient les deux rôles-titre. C’est l'histoire d’un homme qui tombe amoureux d’une corbelle, Romance incarne les deux en portant deux moitiés de costume. Chef-d’œuvre magnifique, tragique et beau. Roméo et Juliette be like. 

Il y a un bal. Les domestiques, tailleurs, etc, nous ont aidés.

Un kimono pour Asphodèle, un mélange de marron et végétal pour Feuille, et une robe bleue pour Porphyre


Décor de branche d’arbre dorée.

Croustille est en tenue militaire rouge, il bégaie en voyant Asphodèle ainsi vêtue. Vermeil, disciple de la voie du Cercle noir, les interrompt. Il est plutôt beau gosse.


Vermeil à tout de suite vu qu’elle était une sorcière. Il la drague puissance mille. Il est magister en haute couture.

Geai m’arrête, « je n’ai pas de temps à perdre » « Très bien gagnons du temps, les nobles vont voter plus vite que prévu. Je vais vous donner une petite liste. » 

Geai, quant à lui veut transformer tout le monde en corax. Striscia s’est laissé se faire habillée.


Feuille part voir Corneille, de la voix de l’extase. Corneille cuisine. La discussion était intéressante. On est pas sûr que ça change quelque chose. Les corax ont une vie courte, et leur peuple n’est pas si puissant qu’il le laisse paraître.


Pourpre a fait un petit combat avec Basalte, la maîtresse d’arme.

Passation de pouvoir avec Vermeil, avec pacte de non-agression. Porphyre a guéri de la lèpre en déchargeant son mal sur l’ancien soi, le décharné. Porphyre atteint alors une autre phase de son personnage.


Résumé 25/02


Bal à la mode médiévale. Romance interprète une chanson à la harpe. De nouveau le demi costume.

On écoute une chanson. 

Un moineau vient chercher Feuille. Le groupe va au chevet de Corneille. On se retrouve seuls avec Corneille.

Corneille donne la suite à Romance. Ils ont changé d’avis pour faire la paix. Corneille propose de nous faire assister à son enterrement céleste.

Asphodèle rencontre Aurore ( qui ne joue pas le jeu du thème du bal). Asphodèle laisse Pourpre parler. Aurore propose de faire disparaître la notion de pouvoir.  (Le communisme monsieur)

Croustille et Asphodèle se parlent. Galatée la stalke. Pourpre s’amuse.

Geai vient rend visite à Feuille, il a des espions et il a su qu’il y a un changement de vote. Onyx a changé, elle est devenue le horla Charogne, c’est toujours elle qui vote (et votera pour la suprématie corax, ce qui fait ce vote devient majoritaire).

Asphodèle va voir Vermeil, elle se renseigne sur comment défaire un horla.

Le groupe exorcise Onyx.  Cela fonctionne, elle votera pour la neutralité potentiellement.

Asphodèle et Galatée vont voir Crépuscule. Elle accepte de voter pour l’aide humanitaire, car elle pourrait y acquérir beaucoup de pouvoir vu qu’elle pratique une magie malsaine autour du soin. 

C’est donc finalement le vote humanitaire qui l’emporte. Mais à quel prix ? 

Feuille et Galatée choisiront l’exil, Feuille pour se transformer, Galatée pour vivre seule son immortalité qui est une malédiction. Asphodèle passera du temps auprès de Crépuscule comme elle s’y est engagée, mais reviendra régulièrement retrouver du réconfort auprès de Galatée. Elle connaîtra une belle histoire d’amour avec Croustille.


Feuilles de personnages :

Feuille :

Point de destin : 1
Peuple : Horsain
Description : Humain androgyne verdâtre, corne végétale, lierre.
Malédiction : Sorcellerie
Force: Jamais malade
Handicap :
Penchant: Ambivalence

Objectif : Trouvez des réponses sur les corax

Phrases de souffrance : Je suis chopé des agissements de pourpres.
    • J’ai laissez tombé la non-violence. 

Slameur amateur

Souvenir : 1. Une nuit d’accueil chaleureuse qui me restera dans la chair.
2. Je me souviens du sang sur mes poings qui exprimé ma colère ( Le décharné)
3. J’ai retrouvé Lydie, j’ai eu une romance.
4. J’ai une haine féroce contre les écorcheurs.
5. Suite à la libération de mon oiseau de pierre, je me suis renforcé psychologiquement.
6. J’ai un souvenir qui n’ai pas le mien : Je passe le seuil de la sorcellerie le moment où les gardes on emmené mon mari. 
7. J’ai tué mon  père
8. Sous le séquoia géant, il y a un escaliers, j’ai vu Shub-Niggurath.


Phrases :
Je sais tirer au fusil.
- Je pense avoir amélioré ma relation avec Asphodèle, car je l'ai protégé plus jeune, elle a eu de la compassion pour moi quand j'ai vue le cadavre de Lydie. 
-  Pour Lydie : J'ai de la peine, mais je suis heureux d'avoir un souvenir heureux, je n'ai avais plus.
 - Face à une personne voulant se transformer : Je pourrais vouloir l'aider. Découvrir qu'est-ce qu'un objectif. Je ne me suis jamais posé la question. Sans doute que le décharné voudrait lui redevenir humain.
- Shub-Niggurath m’a fait changé.

    • Souvenir du capitaine, injecte un remède à un gosse plutôt qu’à lui.
    • Je suis au dessus du bien et du mal.
    • je veux bien aider ours mais pas au dépit de moi même

Durant le trajet je cherchais le passé du décharné.
Je suis stressé mais rassuré pour Lydie


Object & Servent:
    • Fusil
    • porte bonheur de cristouille.
Une clefs universelle
Parchemin transfert de souffrance Rituel: Capture des tiques noires des bois et scolopendres mangeur de chaire, maudit une personne, les incestes proliférer sur son corps pendant un jour et une nuit en récitant un message de haine, faire un jet de svg contre la mort. S'il est réussi, on survit et l'objet de notre haine connaît une souffrance éternelle que seul un rapport sexuel fréquent avec le sorcier peut apaiser.


Nombre de phrases :  27


Le décharné / Porphyre / Galatée :


Description :             humanoïde sans peau, écorché artificiel
        
Espèce: Maletronche ?
        
Penchant : Collectionner les Visages
            
Malédiction : Tueur
        
Force : grande force musculaire        
            
Handicap :     Pourrissant        

TRAITS DISTINCTIFS

- Artificiel (ne ressent pas la douleur)
- Apathie (ne ressent aucune émotion)
- J’ai un nouveau visage !
- J’ai trop confiance en moi

TRAITS RELATIONNELS
    • Je commence à ressentir de la tristesse
    • Le Rêve d’Icare

POUVOIRS
-


COMBAT
Armes : 
Armure :

SOUVENIRS & SORTS EN MÉMOIRE

1 Ma transformation (expérience traumatisante)
2 Biquette était ma fille !...
3 Le mensonge d'Asphodèle
4 Varous … Ecorcheurs !


OBJETS & SERVANTS

1 Collection de Visages (de tous types)
2 -
3 Batterie de couteaux
4 Sac de plumes de Corbeau
5 Visage de Porcelaine 
6 Médaillon de la Chair Pure


Asphodèle :

DESCRIPTION

Nom : Asphodèle/Pourpre
Espèce : Goupil
Penchant : Ordre
Malédiction : Sorcellerie
Force : Inspire confiance
Handicap : Double personnalité

SOUVENIRS & SORTS EN MÉMOIRE
    1. Je me suis pardonnée mon mensonge…;
    2. ( choc mental) souvenir du vieux : trouve renardeau avec patte coincée dans un piège à loup, le soigne...et le relâche. Pourpre le tue pour le crime de la pie « mort et désolation...il y a toujours un sacrifice » ;
    3. ( choc mental) Souvenir de Martogne : construire la maison dans la souche quand ils sont jeunes et beaux, grondement dans la forêt, trouve une ourse qui agonise (flèches) et il y a un ourson qu’ils recueillent…;
    4. ( choc mental) Souvenir de Faraud : se sert de la bile d’ours pour ses pieds et voit une ombre qui se jette sur lui…( horla qui doit roder dans les souvenirs).
    5. (choc mental) Souvenir de Mylène : souvenir chaotique , cors de chasse, terriers enfumés, Mylène qui est plus jeune qui porte deux de ses renardeaux, patte avec une flèche, ses enfants en meurt ;
    6. (choc mental) Souvenir de crassousse : Lumière magnifique dans la forêt, arrive dans les ruines d’une cathédrale, regarde les statues et les vitraux et est fascinée par la beauté ds lieux ;

OBJETS & SERVANTS
    1. Parchemin de transe : Consomme la sève de l’arbre-fou et entre en transe pendant trois heures. Lors du prochain combat, ton mental te dira invulnérable. Sous le coups des armes, tes chairs ne s’altéreront pas, tes os ne se briseront pas ;
    2. Sac avec des fioles et petits sacs contenant des « choses »… ;
    3. Mandragore ;
    4. Poupée de paille avec yeux brillants ;
    5. Médaillon de la chair pure ;
    6. Plume de Corine ;
    7. 1 bouteilles d’alcool fort ;
    8. couteau sacrificiel;

TRAITS
    • Prudente;
    • Je ressens comme une blessure la perte de la connaissance de la métamorphose ;
    • Double, je suis double...et entravée (par Oriente) ;
    • Je suis hantée par les fantômes des morts : Martogne et Faraud (2 phrases);
    • Je souffre de la faim ;
    • le horla s’incarne dans la réalité… ;
    • je suis obsédée par le fait d’avoir laissé les autres membres de la caravane derrière moi ;
    • je chante pour ma fille Porphyre ;
    • Asphodèle a combattu Pourpre ;
    • Souffrance : pierre mousse ;
    • Je communie avec la nature, la forêt s’ouvre à moi (calme) ;
    • La guerre est à notre porte, je dois faire un choix (incertitude, confusion) ;
    • j’ai fais la paix avec moi même, je suis une avec Pourpre ;

LIENS AVEC LES AUTRES PERSOS
Décharné : notre protecteur
Feuille : mon apprenti

SCÉNARIO 2 : OBJECTIF(S)
    • Scénario 4 : Je cherche à correspondre avec mon double ;

Avec quel personnage-joueur penses-tu pouvoir améliorer ta relation ? Comment ?
Sans doute avec le Décharné qui me fait un peu peur autant par son physique brut et étrange que par son obsession désespérée et cruelle d’un nouveau visage. Je pense essayer de dialoguer plus régulièrement avec lui et d’explorer la perte de ses souvenirs. Pratiquement, j’aimerais découvrir/apprendre un rituel qui lui permette de se reconnecter à celui qu’il a été.

Quel ressenti as-tu envers Lydie, le PNJ qui avait réconforté Feuille et que vous avez retrouvé morte dans le cauchemar ?
Je ressens pour elle de la tristesse,une étrange mélancolie quand on l’évoque ou que je la vois, comme ce qui est perdu ou inaccompli. Je ne sais pas ce qui motive ce sentiment chez moi, une intuition ou le miroir de ma propre incomplétude. Sa mort dans le cauchemar m'attristait sincèrement même si la jalousie que j’ai ressentie quand j’ai vu Feuille lui accorder autant d’attention, a coloré de noir mes sentiments.

Le prochain scénario consistera à suivre quelque temps la trajectoire d’une personne tiraillée par le souhait de devenir un oiseau. Quel genre d’objectif pourrais-tu dans ce cadre assigner à ton personnage ? En quoi cet objectif est-il lié à un autre personnage-joueur ?
Je reste profondément intéressée par les différents aspects que revêt la sorcellerie, et si l’occasion m’est donnée d’étudier la métamorphose, je la saisirai. Mais surtout, l'analyse de la psyché des personnes que nous rencontrons, m’attire également. Qu’est ce qui me définit, mon aspect de goupil ou mes manières d’humain.e ? Si je n’ai pas conscience de Pourpre, elle/il l’est à chaque instant. Chaque expérience que je vis est consignée dans sa mémoire mais pas la mienne. D’ailleurs, Pourpre se parle en « Nous », somme des deux personnes qui habitent un même corps. 
Le fait de me « chercher » au travers des expériences des autres peut influencer la relation que j’ai avec mon apprenti Feuille. Effectivement, je vais orienter mes recherches magiques autour des thèmes de la métamorphose, de ce qui est double, qui vit et meurt dans deux mondes. J’espère pouvoir explorer avec lui le voile qui couvre les choses et qui nous empêche d’en percevoir l’essence réelle. Toutefois, cela peut être dangereux, le chemin que j’emprunte est-il vraiment fait pour lui ?



 
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Message par Pikathulhu »

LA FRONDE D'ASTRALE

Une partie d’Hiver Nucléaire en mode GN virtuel à 5 joueuses marquée par son intensité ! Un récit par Milouch.

(temps de lecture : 2 min)

Joué en ligne le 06/11/2020

Le jeu : Les Sentes, drames forestiers dans une réalité sorcière (jeu de rôle et GN)

Le scénario : Hiver Nucléaire, un périple post-totalitaire autour de la mort et de la réconciliation (la version en ligne pour 6 personnes)

Univers : la forêt de Millevaux


Image
Asa Hagström, cc-by & pietplaat, Tasmanian Archive and Heritage Office, ww2gallery, cc-by-nc & claire munier par courtoisie & Petar Marjanovic, Silsor, domaine public



Bilan :

Petit retour sur une partie d'hiver nucléaire en ligne à 5 joueuses : 
On a joué la partie à 5 joueuses. Ça a très bien fonctionné, 4 des joueuses n'avaient jamais rien joué de l'univers de Millevaux. 
Un peu de difficulté de prise en main au début (sur les rituels, l'univers...) mais au bout de la première demi heure, les gens étaient bien dedans. 
Une opposition sur le Bloc entre Astrale et le Commissaire plutôt constructive en terme de jeu et amenant les persos à se placer du coté Commissaire ou du coté Astrale 
Avec une Astrale qui reprend l'idéologie du Bloc pour elle. 
Un basculement très cool d'Escarboucle suite à sa résurrection du coté de chez Astrale
Un Sycophante qui reste fidèle malgré tout et est prêt à se tuer pour montrer sa fidélité au Bloc 
Un Besogne qui se fait soigner par tous le monde pour prouver la puissance du Bloc ou de Astrale
Pas de Saltarelle mais du coup un Commissaire qui entend la voix de Saltarelle qui lui parle. 
J'ai jouée le Commissaire perso et j'ai vraiment senti le moment où les ouailles lui ont échappé, ce qui était très intense. 
Pas mal de très belles scènes de jeu (et c'est ce qui est ressorti majoritairement du debrief, comment en 1h de jeu on avait pu avoir des scènes aussi intense). 
Merci pour ce jeu en tout cas !


Thomas :

Super merci d'avoir joué et de m'avoir fait un retour ! ça avait l'air bien cool !

Ah oui au fait, vous n'avez joué que 1 H ? Avec 5 persos, vous étiez censés jouer 1h40 (20 mn/perso) :)


Milouch :

Ah !  On a joué un peu près une heure en effet. Après, au moment où on a coupé, ça correspondait assez bien a une fin.
D'ailleurs, on s'est posé la question, mais de manière générale, comment tu adaptes quand le nombre de perso est réduit ?  Là on a créé une Saltarelle imaginaire, mais est ce que tu redispatches les problématiques des persos et leurs relations ? 


Thomas :

Idéalement, dans les liens du perso, il faut remplacer les noms des persos manquants par des persos présents, ou supprimer ces liens
 
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Message par Pikathulhu »

LE MESSAGE

Suite de l’ascension vertigineuse. Un récit par Claude Féry.

(temps de lecture : 2 min)

Joué le 09/05/2020

Le jeu : Verticales, une folle ascension par Melville

Univers : la forêt de Millevaux


Image
H.Adam, cc-by


Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).



Les parties précédentes jouées avec Verticales :

1. La cordée
Les enfants de la Lumière Noire parviendront-ils à escalader le Mur de la Honte qui les enferme dans Millevaux ? Réponse dans ce récit de partie par Claude Féry. (temps de lecture : 2 min)

2. La dernière ascension
Une hirondelle à épargner, une cordée sauvage et des araignées vengeresses. Un récit par Claude Féry. (temps de lecture : 7 min)


Image
Gabrielle joue Cartage, Alex joue Liberté


L'histoire :

La terre
Le temps
Ici, la terre est faite d'une compression d'instants, l'humus de toutes les paroles, depuis le premier cri.

Ici, les arbres plantent leurs racines dans la mémoire des hommes.

Ici, le Chroniqueur s'érode de ses souvenirs


Cet après-midi nous avons joué la suite de notre partie de Verticales intitulée « Le message »



Écoutez-le qui grignote à petit bruit, admirez sa patience
Il cherche, cherche à tâtons, mais cherche.
Saura-t-il du moins mettre en ordre,
Débarrasser, décrasser, les coins et les recoins
De cette tête encombrée qui est la sienne
Où il tourne en rond sans trouver sa voix,
Sinon quand le vent souffle à travers bois,
Que la mer roule fort, couvre d'écume les digues,
Quand la nature met la langue à sa rude école
Et lui enseigne des harmonies sauvages,
Suaves aussi parfois comme la flûte d'un oiseau,
Qu'elles viennent de cet oiseau même ou du roulis d'un
ruisseau.
Dirait-on qu'il faut accorder sa voix à celle des éléments
Mais soit qu'on dise l'inverse, c'est les deux fois ne rien dire.



Louis-René des Forêts, extrait du poème « Écoutez-le qui grignote à petit bruit… »


Liberté a franchi le col du Lamantaou et relayé l'étrange message auprès des siens.
Cartage a dévissé et Dimitri a péri avec une créature de la sepsie dans une gerbe de fongicide.


Image


Bilan :

La partie fut agréable et féconde.
Verticales a convaincu la table

L'oubli et la forêt furent continûment présents lors de cette seconde phase de l'ascension.
Peu d'aléas furent mis en jeu, mais le phénomène d'accumulation a provoqué la seconde chute.
Le jeu de Jenga et les règles de retrait des blocs ont soutenu la tension, soulignant les éléments dramatiques.
Le choix exercé par Xavier lors de la précédente session lui a permis d'explorer le potentiel des voix du passé.
Cette dimension du jeu est très intéressante et peu clairement interférer avec les actions du Mur.
Le jeu est une réussite de mon point de vue et parfaitement adapté aux paradigmes de Millevaux, impliquant néanmoins une tonalité moins sombre ou désespérée.
Une belle expérience.
La prochaine session intégrera à nouveau Liberté.
Peut-être utiliserons nous Dread afin de demeurer dans ce type de tension.


Image


Commentaire de Thomas :

Un grand merci pour ce retour et pour continuer à expérimenter toutes sortes de jeux intéressants en les adaptant à l'univers de Millevaux !

Image
Extrait du jeu de rôle Degenesis
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Message par Pikathulhu »

UN TRAMWAY NOMMÉ MARTYRE / LE TRÉSOR DU VORGNE

Deux scénarios du recueil Hurler dans les forêts zero joués en solo par Damien Lagauzère ! Sale temps pour les héros solitaires.

(temps de lecture : 4 min)

Joué le 07/12/2019

Le jeu : Hurler dans les forêts zéro, supplément de scénarios pour Millevaux Sombre (jouer l’horreur post-apocalyptique forestière avec le jeu de rôle Sombre)
Univers : la forêt de Millevaux

Image
(C) Thibault Boube

UN TRAMWAY NOMME MARTYRE

Chemin Rouge est un chasseur de trésors. Il erre dans la forêt depuis… un moment en quête de tout ce qui peut avoir un semblant de valeur à ses yeux. Il récupère des choses au fil de ses voyages. Il en garde certaines, en vend ou en échange d’autres. Et celles dont personne ne veut, il les donne ou les jette.
Bien que « chétif » (dommages = toujours 1), il a de la chance. C’est un véritable « miraculé » même (1 fois par partie, les dommages subis sont réduits à 1).
Mais miraculé ne veut pas dire chanceux.

La dernière chose dont Chemin Rouge se rappelle est d'avoir été touché par une fléchette manifestement anesthésiante. Là, il se réveille et réalise qu'il a été transporté dans un endroit inconnu, l’intérieur d’un… tramway ? Dehors, des tambours de guerre résonnent.
Chemin Rouge fait un rapide tour des lieux. On ne voit presque rien. Toutes les sorties du véhicule sont condamnées par des planches et de la ferraille. Les vitres ont toutes été brisées en mille morceaux. Le sol est jonché de fragments de verre et de matières visqueuses. Une fois quelques planches arrachées, la lumière montre que l’intérieur du tramway est maculé de sang séché. Les matières visqueuses au sol sont des fragments de peau, de cervelle, de membres et d’yeux humains. Une bonne partie des tubulures de métal qui servent de points d’accrochage a disparu.
Quand il regarde par une ouverture, Chemin Rouge se rend compte que le tramway repose au milieu d’une clairière de terre brûlée. Au bord de la clairière, il y a un arbre avec une massue suspendue à ses branches. Un parchemin est enroulé autour du manche de la massue. Et dehors, les tambours de guerre résonnent. Toujours.

Une sortie « discrète » semble difficile. Manifestement, les joueurs de tambours l’observent et l’attendent au tournant. Pourtant, cette massue est bien tentante. Non seulement parce qu’il s’agit d’une arme mais ce parchemin, que raconte-t-il ?
A défaut de jouer la discrétion, il peut jouer la surprise et la rapidité. Alors, il se jette par une des ouvertures et fonce vers l’arbre à la massue. Mais à peine a-t-il fait un pas dehors que des flèches sifflent, venant de partout.
Miraculé ne veut pas dire chanceux. Deux flèches l’atteignent. Pourtant, Chemin Rouge serre les dents et continue sa course. Mais, alors qu’on lui tire toujours dessus, un autre adversaire fait son apparition. Il s’agit d’un… sanglier qui lui fonce dessus. Mais la bête, dans son élan, ne parvient pas à modifier sa trajectoire quand Chemin Rouge fait un bon de côté. Il atterrit alors dans une espèce d’angle mort et aucune des flèches tirée ne l’atteint. Et en plus, il s’est malgré tout rapproché de l’arbre. Finalement, même avec deux flèches dans le buffet, il a de la chance. Mais est-ce que ça va durer ?
Il reprend sa course mais déjà le sanglier revient. Mais Chemin Rouge l’évite une fois de plus et parvient même à s’emparer de la chaîne qui pend à son cou. Il ne parvient pas à l’immobiliser mais, dans un large geste du bras, il parvient à enrouler la chaîne autour du cou de la bête qui, si elle le traîne derrière lui, ne fait finalement que resserrer la chaîne autour de son cou.
Concentré sur le sanglier, Chemin Rouge en a oublié les archers. Une flèche le fait trébucher. Il maintient pourtant sa prise sur le sanglier qui le traîne toujours derrière lui. Chemin Rouge s’accroche. En réalité, il n’espère plus atteindre la massue. Il espère surtout que le sanglier va quitter cette clairière et lui permettre ainsi de se mettre à l’abri des archers. Et quand il parvient à poser son regard dans la direction où court l’animal, il semblerait bien que ce soit le cas. Rassemblant ses dernières forces, il s’accroche et se laisse traîner, il l’espère, hors de portée des flèches.
Alors, un cri retentit : « C’est une initiation ! Vous devez tuer l'un d'entre vous pour la réussir ! »
C’est ridicule, se dit Chemin Rouge, puisqu’il est seul. Dans tous les cas, il meurt. Et, effectivement, alors que sous le coup de ses blessures il est saisi d’un vertige, trois silhouettes armées apparaissent dans son champ de vision et achèvent de le cribler de flèches.

LE TRÉSOR DU VORGNE

C’était avant le tramway, Chemin Rouge, alors, portait le nom de La Brindille. Mais déjà, il cherchait des trésors. Et il en avait trouvé un. Ou plutôt, ils en avaient trouvé un puisqu’il était en compagnie de deux autres chasseurs de trésors quand ils avaient mis la main sur ce coffre rempli d’or. Oui, de l’or !
Sauf que l’un d’entre eux avait décidé de ne pas partager. Aussi, un matin, le groupe s’était réveillé avec un membre en moins et… sans le coffre. Heureusement, ses traces étaient encore fraîches et on pouvait le suivre dans la forêt. Mais, il y a eu comme un pépin. Courant dans les bois, voila que l’autre chasseur tombe dans une espèce de trou.
Le trou est une immonde pétaudière acide au milieu de laquelle émerge un arbre creux d’où émerge un bec qui ne cesse de claquer. Partout, il y a des cadavres de rongeurs et de renards à moitié décomposés par les substances visqueuses et puantes dont le trou est rempli. Un cadavre de cerf et une souche d’arbre surnagent également. Et déjà, un espèce de tentacule se saisit de l’autre chasseur de trésor et le tire jusqu’au tronc d’arbre ! Là, il est pris en charge par le bec qui le hache méthodiquement. L’horreur.
La Brindille tente de faire demi-tour et de remonter, mais le terrain est très glissant. Et déjà, des tentacules serpentent dans sa direction. Heureusement, il parvient à les éviter et à gagner un peu de terrain. Derrière les hurlements du chasseur de trésors ont cessé. La Brindille parvient alors à regagner le bord. Elle observe la scène. Elle fait un pas en arrière, ayant trop peur de basculer de nouveau dans le trou.
La créature (un Horla ?) qui vit là continue de jeter des tentacules dans sa direction. La Brindille est tétanisée et ne sait plus quoi faire. L’espace d’un instant, il lui vient l’idée de redescendre dans le trou pour en finir avec ce monstre. Il ne peut pas laisser un truc pareil sévir dans la forêt. Mais il se dit qu’il a déjà bien de la chance. Alors, si, finalement, il va laisser cette chose vivre. Mais, avant de quitter définitivement les lieux, il ramasse quelques bouts d’écorces qu’il fixe avec des racines autour de certains troncs autour du trou. Avec un vieux feutre qu’il gardait sur lui, il a écrit dessus :
« Attention, Danger ! »

Commentaires de Thomas :
A. Déjà, c'est très cool de voir un de mes scénarios Millevaux Sombre joués, et j'attends de voir ce que ça va donner à la sauce Lagauzère :)

B. Je me disais justement que jouer ce scénario en solo est doublement problématique, d'une parce qu'un seul perso dans un scénar Millevaux Sombre, c'est la promesse d'une espérance de vie très courte, mais aussi parce que ce scénario est un Battle Royale. Mais tu donnes la conclusion logique de façon admirable :)

C. « C’était avant le tramway, Chemin Rouge, alors, portait le nom de La Brindille. Mais déjà, il cherchait des trésors. » Donc tu lui as donné une immunité narrative pour ce scénario ?

D. J'aime bien la conclusion du Trésor du Vorgne avec cet « héroïsme réaliste » dont fait preuve La Brindille :)
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Re: [CR] Millevaux et autres jeux Outsider

Message par Pikathulhu »

LA MARQUE ET LA SEPSIE

L’étrangeté des Balkans de Degenesis mêlée aux contreforts du mur de Verticales servent d’arrière-plan à l’aventure de trois personnages hauts en couleur. Un récit par Claude Féry.

(temps de lecture : 10 min)

Joué le 16/05/2020

Le jeu : Inflorenza, héroïsme, martyre et décadence dans l’enfer forestier de Millevaux


Image
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Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).


L'histoire :


Nous jouons aujourd'hui la suite du cheminement de Liberté
Gabrielle joue Nabuchodonosor, un néolybien. Alex joue Liberté et Xavier joue aux Playmobil
Je joue Siobhan, un anabaptiste.

Voici le récit de notre partie. Bonne lecture !

Nano Inflorenza joué en mode carte rouge

Alex joue Liberté, chroniqueuse.

Je veux découvrir la signification du 24 apposé sous mon œil gauche.

Gabrielle joue Nabuchodonosor, néolybien.

Je veux me faire un nom à la faveur d’un coup d’éclat au cœur du pays corbeau afin de devenir Waziri.


Je joue Siobhan, un anabaptiste.

Je veux que mon âme connaisse la liberté que dispense Cathédrale.


Image


Première instance

Siobhan :

La pluie imprègne tout. Les fougères ruissellent. Le froid et les eaux s’insinuent dans mes os.
Pourtant, la forêt m’est obscure, chaude presque hostile. Je voudrais tant que mon âme connaisse la liberté des lumières que dispense Cathédrale.
Depuis des jours, j’erre.
Je ne puis me résoudre à étancher ma soif à l’un de ces rus qui abondent. La souillure démoniaque se répand, traîtresse, partout sur ces pentes du Lamentaou.
La soif me taraude, ma faim ronge mes viscères et seule ma foi me dissuade de céder à la tentation.
Et soudain, au détour de la vague sente que je suis depuis le matin, s’impose une nouvelle épreuve.
Dans la lumière changeante des feuillages, un maître Chroniqueur chemine péniblement sur la sente.
C’est un signe.
Je trébuche, mon corps se refuse encore à se résoudre à l’effort que mon âme a aussitôt consenti.
Je dois affermir ma foi. Je dois aviver mon âme et me prosterner aux pieds de notre ennemi, même si malgré mon ignorance du monde, je sais qu’il est de ceux qui chérissent plus le souvenir des pêcheurs du temps jadis que de l’âme des vivants, de ceux qui nous ont dérobé notre sanctuaire.
Mon corps s’y résout toutefois, gémissant de douleur, alors que je ploie le genou dans la boue de la sente, tendant des mains implorantes.
« ô maître Chroniqueur auriez vous quelqu’chose de sain à boire et de bon à manger pour un pauvre ignorant comme moi ? »
Il me regarde, manifestement indécis.
Pressé d’emprunter la voie ardue de rédemption que m’a offerte le Vieux, et avisant le piteux état de sa houppelande, je lui offre les services de mon espadon et de mon bon calcinateur.
Il se contente de me relever en m’indiquant que je ne suis pas si ignorant que cela et qu’il a pu se débrouiller seul jusqu’alors. Mais néanmoins, il m’offre son outre sans réserve. Celle-ci contient une eau fraîche et revigorante.
Puis il me propose quelques lanières de viande séchée et du pain de noisette bien dur mais qui croque agréablement sous la dent.
Je suis confus. Même si en moi retentissent les sermons ressassés depuis les premières heures de ma formation, je m’attendais à moins d’égards de sa part, à trouver son contact froid et distant.
Il demeure silencieux, mais attentif et effectivement me semble étrangement bienveillant.
Ma foi est être trop faible pour que je puisse renoncer à affronter les épreuves qui jalonnent la voie de l’élévation de mon âme.

Siobhan, un anabaptiste.
Je veux que mon âme connaisse la liberté que dispense Cathédrale.
Ma foi est être trop faible pour que je puisse renoncer à affronter les épreuves qui jalonnent
la voie de l’élévation de mon âme.


Image
Gabrielle_joue_Nabu


Seconde instance

Nabuchodonosor :

Mon cheval caracole depuis longtemps sous les intempéries.
Depuis la lisière de la Doruba, ma précieuse monture, me porte au travers de ténébreuses forêts, en étroits cols, depuis l’immense steppe pour enfin traverser les forêts fractales qui marquent la frontière du pays corbeau. En nul lieu je n’ai trouvé l’opportunité de ramasser les dinars ou la gloire escomptés. Rien que de pauvre bougres. Et là, ô plaisante surprise, dans une clairière au détour d’une sente indistincte, je tombe sur un improbable duo.
Dans ma quête vers Purgare, cette rencontre est à coup sûr la plus énigmatique. Siobhan, un anabaptiste dont je ne connais pas encore le nom, est agenouillé auprès d’un Chroniqueur, une situation dont je ne peux m’empêcher de me moquer en me dévoilant à eux.
« Et bien donc, un anabaptiste aux pieds d’un vil Chroniqueur ! Ne t’ont-ils dérobé Cathédrale que pour que tu te soumettes plus volontiers à eux ? »
La discussion que j’ai ainsi négligemment amorcée, ne cesse de s’envenimer. L’ anabaptiste donne à son compagnon du « maître » et témoigne d’un comportement des plus qu’obséquieux à son égard.
Cette attitude servile et presque contre-nature m’enjoint à émettre quelques remarques frappées au sceau du bon sens. Je suis tellement amusé de la soumission dont témoigne le soldat du Vieux que ma verve naturelle me conduit à questionner l’archiviste sur le prix de son esclave. Mes remarques taquines achèvent de craqueler son vernis de civilisé. Ainsi est-il tant en rogne face à mes insultes qu’il arme son calcinateur pour tenter de m’impressionner. Alors, je m’approche de lui à vive allure, fusil en main. Il bombe le torse, m’envoie bien quelques piques et me bouscule même, mais renonce à m’affronter, contenu par son maître.
Ainsi je parviens à conclure un accord avec ces errants qui disent aller vers Cathédrale. Surtout grâce au Chroniqueur qui évite que cette rencontre soit trop violente. Nous avons établi un contrat, le Chroniqueur, son chien et moi, que foi de Tripolitain, j’honorerais ! Nous cheminerons jusqu’à Purgare afin que je puisse me rendre là où je l’entends tandis qu’ils auront franchi une étape vers Cathédrale. Si j’ai pu me faire là une compagnie, utile face au danger à défaut d’être agréable, cela me laisse pour le moins perplexe.

Nabuchodonosor, néolybien.
 Je veux me faire un nom à la faveur d’un coup d’éclat au cœur du pays corbeau afin de devenir Waziri.
 L éclat que je vise ne s’estime que par le temps que j’y dispenserai, or le temps c’est des dinars


Image
Alex joue Liberté


Troisième instance

Liberté :

Nous marchons un moment. Le marchand d’esclaves nous accompagne, ainsi que mon étrange garde du corps. Je ne suis plus seule à errer sur cette montagne. Depuis que j’ai perdu la cordée et le lien avec la communauté de l’Essai, la piqûre ou la morsure de ce mille-patte bleu me lance.
J’ai le sentiment que ma joue enfle.
L’envie de me ménager une halte à la faveur de laquelle je pourrais me soulager de l’horrible démangeaison me hante.
Je la repousse toutefois de crainte de me révéler à mes compagnons d’infortune.
L’effort m’absorbe, me distrait.
Un temps, un temps seulement. Je parviens à oublier ma nouvelle compagne. Mais mon infortune ne cesse de se rappeler à moi. Tant et tant que j’en viens à gratter mon masque !
J’espère que l’anabaptiste n’a rien remarqué. Cela m’inquiète véritablement. Une voix en moi résonne qui me de me demande ce que pourrait être sa réaction s’il découvrait qui je suis ? Une femme sous cette armure !
Non je dois patienter jusqu’à ce que nous ménagions une halte pour la nuit. A la faveur de celle-ci, je pourrais...
Soudain, je perçois son regard qui pèse sur moi. Pas le regard hagard et fiévreux qui illuminait son visage maigre lorsque nous nous sommes rencontrés. Non, un regard qui soutient le mien au travers des lunettes de ma combinaison. Maintenant, son regard se fixe intensément sur ma joue gauche, celle-là même qui me démange.
Il s’approche, hésitant, puis hasarde :
« - Vous souffrez Maître ? Puis-je vous aider ? »
Non, non.
Je le détrompe, mais il ne semble pas convaincu.
Il hésite et me pose des questions, plus précises. Il évoque les dangers de la montagne et parle du venin des retorses araignées du schiste qui vouent leur proie à une mort certaine ou bien, pire encore, celui du scolopendre ou du mille-patte bleu qui ronge lentement l’esprit, l’âme de la proie, la vouant aux ténèbres de la souillure. Il est d’autant plus convaincant et inquiétant qu’il en est effectivement convaincu.
Puis il se risque à évoquer ses talents de cueilleur de simples, acquis dans les rangs de son peloton de Monos. Il était sous les ordres d’un vieux spitalier qui fit de lui un famulancier. Il désigne ma besace arrachée à la montagne, à la dépouille de spitalier. Il me dit qu’il en connaît les usages et que mieux que l’aconit, la fiole qu’il y trouve saura neutraliser le venin.
Je lui ordonne d’aller chercher de quoi nous nourrir dans la forêt, avec le marchand, pour me laisser le loisir de me soigner hors de leur vue.
Il dégrafe la sangle de son calcinateur et prend le soin de m’en expliquer les rudiments avant de donner l’ordre du départ à son compagnon. Puis il revient vers moi. Et me chuchote que les effets de la seringue sont puissants et qu’il convient de piquer au plus proche de la plaie.
Finalement, je m’y résous.
Nabuchodonosor part seul à la cueillette de pleurotes grises, tandis que Siobhan prépare son matériel.
J’hésite encore, tant je crains sa réaction. En ôtant mon masque, je rabat ma capuche sur mon visage, mais c’est puéril... J’ai ébouriffé ma chevelure pour dissimuler mon visage, mes yeux à son regard.
Mais il écarte mes cheveux. Il voit la marque, le 24.
Il bredouille alors : « vous êtes une élue », en passant le doigt sur ma marque, puis il désinfecte ma plaie, lentement méticuleusement en tremblant.
Il m’assure qu’il me protégera, que sa lame m’est acquise que je suis une élue.
La dose ne sera pas suffisante. Un caroncule se formera, ailleurs qui retiendra la sepsie.
Il me faut une autre dose.
Il sait où en trouver, plus loin dans la montagne, dans une cité du temps jadis, Mejgorié.
La douleur inonde mon corps tout entier puis reflue.
Nous mangeons des pleurotes et la nuit bienfaisante m’apaise un peu.
Le lendemain, un caroncule plein de sepsie s’est formé sur ma hanche gauche.

Alex joue Liberté, chroniqueuse.
 Je veux découvrir la signification du 24 apposé sous mon œil gauche.
 Un caroncule plein de sepsie s’est formé sur ma hanche gauche.


Quatrième instance

Siobhan :

Au matin, nous avons recouvré une partie de nos forces. Ma détermination s’est trouvée renforcée par mon étrange découverte. Je dois préserver cette élue.
Je propose au marchand de prendre par où il aura toute latitude de remplir ses fontes d’artefacts qu’il pourra revendre à Tripol pour son poids en dinars.
Nous quittons le creux de la forêt pour aborder un épaulement où nous découvrons un train de rouille frappé d’une étoile sur la motrice.
Derrière le train immobile la noirceur d’un tunnel nous observe.
J’enjoins Nabuchodonosor à formuler des vœux et à une stricte observance des versets qu’il me prêtait la veille.
Nos sommes désormais sous la protection du Vieux, maintenant que nous nous entrons dans les entrailles de Mejgorié.
Ma foi, qui m'a toujours guidé jusqu’alors suffira-t-elle à armer mon bras pour préserver l’élue ?
Trouverons-nous dans ces vestiges du temps jadis des remèdes à même d’endiguer l’emprise dont elle est victime ?
Pouvons-nous, la jeune femme et moi-même nous fier au marchand d’esclaves ?
Alors que je presse le pas vers la bouche sombre de ce royaume oublié du Vieux, j’ai plus de questions que de certitudes.
J’éprouve la même peur que celle qui m’étreignait lors de l’affreuse défaite que nos forces ont essuyée face à celle de l’Ankar.
Je tente de ne rien faire paraître au cavalier de Tripol.

Siobhan, un anabaptiste.
 Je veux que mon âme connaisse la liberté que dispense Cathédrale.
 Ma foi est être trop faible pour que je puisse renoncer à affronter les épreuves qui jalonnent la voie de l’élévation de mon âme.
 Ma seule foi suffira-t-elle à préserver l’élue ?


- Durée : 1 heure 20 minutes.
- absence de témoignage audio en raison d’une avarie technique.
- Nous avons joué avec le String quartet 2 de Morton Feldman dans les oreilles.


Commentaire de Thomas :

Un grand merci pour ce compte-rendu !

A. Voilà que vous jouez à Inflorenza ! Je ne m'y attendais plus ! :)

B. Ce n'est pas bien grave, mais je précise que lorsque vous avez créé vos personnages, vous avez omis de lier les phrases « je veux » entre elles. Cela peut entraîner le fait que les personnages jouent les uns à côtés des autres, leurs histoires n'étant pas corrélées. Mais bon, je vois que dès la deuxième instance, les personnages se rejoignent.

C. Dans quelle région du monde ce récit se passe-t-il ? Dans les Balkans ?

D. Comment s'est passé la partie ? Est-ce que le gameplay d'Inflorenza vous a apporté quelque chose ?


Claude :

B. Ce fut une entorse délibérée, que nous avions convenu de compenser par l'invitation d'Alex et Gabrielle dans mon instance. Gabrielle a préféré nous rejoindre ensuite.
C. Nous étions à Mejgorié, ville sur le versant oriental du Lamantaou dans l'Oural méridional.
D. Nous avons beaucoup discuté sur ce que nous voulions jouer en amont et quelle suite apporter à Verticales. Nous avons débattu à 4 avant que Xavier nous dise qu'il préférerais ne pas jouer. Le choix initial à 3 était de jouer la suite dans la continuité temporelle avec Dégringolade, Verticales et les voix du passées limitant la créativité de Gabrielle et Alex ayant suffisamment flippé devant les Jenga. Compte tenu du temps disponible j'ai proposé que nous jouions avec Nano Inflorenza. Alex a accepté mais a souhaité que je sois joueuse.
Nous avons joué deux instances. J'ai joué la première en envisageant Siobhan comme un illuministe. Je suis allé au conflit très rapidement provoquant un conflit avec Nabuchodonosor que j'ai emporté d'une puissance. Second conflit entre nous et considérant que j'avais joué bourrin et laissé Alex sur la touche, nous avons recommencé.
Le jeu s'est alors déroulé de façon très fluide. Nos instances respectives se sont imbriquées naturellement. Les thèmes du théâtre Millevolodine ont résonné avec nos préoccupations.
Notamment pour Alex qui a apprécié le soutien à sa création.
J'ai tiré une carte de La Stèle au cœur des plaines que je n'ai pas encore eu le temps de mettre en jeu.
Nous avons tous beaucoup apprécié la fiction qui a émergé ainsi que la légèreté et la solidité des mécaniques, leur souplesse.
Nous jouerons la suite à nos mouvements de liberté dans la semaine, (département rouge pas d'école en présentiel pour eux et pour moi dix jours d'autorisation d'absence dans le cadre du plan de continuité).
Les phrases d'Inflorenza produisent des perles de souvenirs pour une éventuelle partie avec Dégringolade.
A. Nous avions joué à Inflorenza Minima avec Gabrielle, mais effectivement nous ne étions pas encore emparé d'Inflorenza.


Thomas :

D. Jouer le théâtre Millevolodine en y adjoignant La Stèle au cœur des Plaines, c'est forcément une combo gagnante :)
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Message par Pikathulhu »

SEULE EN FORÊT

Une expérience hors-normes au-delà du genre et de l'humanité, guidée par quelques principes créatifs pour vivre des destins croisés. Le récit d'un solo par Frédérique Lilas Da Silva.

(temps de lecture : 4 min)


Image
(C) Holy Mane www.holymane.com


Joué le 28/11/2020

Le jeu : Héritage (jeu solo à deux personnages sur le thème du rêve et du métissage)
/
Instruction : chaque personnage à droit à 10 entrée pour des scènes individuelles après quoi on se concentre sur des scènes collectives. Dans ce jeu on parle de sexe de manière explicite et des scènes d'incestes ou d'abus sexuels peuvent se produire.
/
Traumavertissement : inceste, viol, violences parentales

Instructions additionnelles : Les personnages ne peuvent communiquer que dans leurs rêves. Si iels parviennent à se retrouver dans le monde physique, l'histoire prend fin. Si iels meurent, l'histoire prend fin. Si quelqu'un mange l'autre, l'histoire prend fin. Si quelqu'un pardonne à l'autre, l'histoire prend fin.



Inspiration : Quatorze d’Outre, tirée de L’Almanach, une compilation de 366 historiettes pour Millevaux

Fruits de la forêt
De l'emprise et de la peur
Horlas
Souillés, sublimes
Nouvelle chair
Créatures à fleur de pus
Monstrueux, humains

/

*
*

Scène individuelles de la métis

1. Je ne suis pas née, j'ai poussé. J'ai poussé comme ces arbres qui s'étendent toujours un peu plus loin. Comme cette mousse qui corrode les choses en rêvant du vide à remplir qu'elle laissera. Je ne suis ni de la rive, ni du fossé, ni même de l'eau qui court ou de la flotte qui pourrit sous nos pieds. Non, je suis tout ça à la fois. Je suis le tout et le rien, le vide et le plein. Parce que je ne me reconnais dans rien et j'appartiens à tant de choses différentes. Je suis un monstre au sens littéral. Celui qui montre la voie et qui ne sait pas lui même ou il va.
/
2. J'ai le sang noir, noir de cendre. Je l'ai remarqué la première fois quand je me suis lavée sous une cascade. Le sol était tranchant et je me suis entaillée les pieds en tentant de trouver l'équilibre. On aurait dit une éruption de terre noire qui jaillissait de l'intérieur du sol. Mais c'était de mon intérieur que cela provenait. J'ai pleuré en le réalisant et j'ai couru longtemps de peur que quelqu'un ne me découvre.
/
3. Parfois j'aimerais étreindre quelqu'un. Tellement fort que mon cœur se fissurerait. Mais mes adelphes humains et horlas ne sauraient l'envisager. Iels ne voient en moi que la peur d'elleux-mêmes, que le reflet de l'autre. Alors je reste seule, en compagnie des arbres et des lucioles. Leurs lumières tendres et délicates me rassure.
/
4. Je me suis prise d'amitié pour un rouge gorge avec de grosses taches vertes, je l'ai appelé Olive. C'est la teinte exacte du tronc qui m'a vu naître. Olive me suit partout. Peut être parce qu'il est seul lui aussi. Je me demande si les autres oiseaux lui disent bonjour parfois.
/
6. Un jour ma mère m'a dit : « Tu n'es pas comme les autres » mais je n'ai pas compris ce qu'elle voulait dire par la. Puis plus tard j'ai vu de mes yeux l'un de mes amours brûlé par des humains et là j'ai compris. Oui, je ne suis pas comme les autres. J'ai longtemps pensé que je trouverais ma place chez les enfants de la forêt et des ruines mais je me trompais.
/
7. Olive, mon rouge-gorge, discute avec moi souvent, je crois qu'il est amoureux. Il s'excite toujours quand le soleil se lève et chante à tue-tête. Il me redonne l'espoir en l'avenir, il est toujours tellement doux dans sa manière d'approcher les choses.
/
8. J'aime bien me masturber dans les buissons d'orties, ça endort ma peau comme si des lianes de chairs m'entouraient. Quand je me sens triste et un peu ailleurs ça me redonne envie d'aimer les choses autour de moi.
/
9. Il y a un songe qui me revient très souvent en ce moment. Un enfant dont les membres s'enfoncent dans la terre. Qui se plonge très loin dans le sol pour y trouver de l'eau sans jamais y parvenir. Je me réveille toujours avec une très grande soif quand mon sommeil se brise sous la force de cette image.
/
10. Je ne sais pas pourquoi mais je ne cesse de penser à cet enfant et à vouloir rêver sans cesse pour le retrouver et observer ce qui lui arrive. Peut être est-ce juste la solitude ou peut être est-ce autre chose ?
/
*
*
Scène individuelles de l'enfant

1. Ma maman me faisait des gâteaux à la cardamone quand j'étais plus jeune. Je réalise aujourd'hui que je n'ai jamais compris ou elle trouvait sa farine... C'était vraiment une magicienne quelque part.
/
2. Cela fait déjà un moment que je n'arrive plus à dormir, pourtant mes paupières sont tellement lourdes... Qu'est-ce que je donnerais pas pour un bon dodo.
/
3. J'ai trouvé une vieille toupie aujourd'hui, je l'ai appelé Hafida. Quand je m'ennuie, je la fais tourner dans tous les sens comme quand on dansait ensemble avec ma maman.
/
4. Je crois que je me suis endormie. En plein cœur de la forêt des vélos immergés. Personne ne m'a fait du mal j'ai eu de la chance.
/
5. Hafida m'aide à rêver. Je la fais tourner très fort et je ne tarde de pas à devenir comme du coton.
/
6. Mes rêves me calment Je vois un oiseau couvert de tâches comme des champignons. Il me fait sourire avec ses petits bruits.
/
7. L'eau a quelque chose, j'arrive pas à la boire. Elle coule dans la bouche comme un caillou bizarre. Je vais mourir de soif si je ne trouve pas à boire.
/
8. J'ai gratté la terre avec mes mains nues jusqu'à les faire saigner. J'ai trop soif. Ma maman, je veux ma maman...
/
9. Je sens la présence d'une personne. Je sais qu'elle est là, tout prêt. Je ne sais pas si elle me veut du bien ou du mal et ça m'inquiète un peu. Mais j'ai soif. Peut être qu'elle aura quelque chose à boire ?
/
10. Dans mes rêves tout est chaud et beau. Et même quand c'est froid, cela reste doux. Je vais y rester un peu peut être, le temps de trouver mon chemin. Et il y a quelqu'un qui m'attend, ici, quelque part, alors je vais l'attendre aussi.
/
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Re: [CR] Millevaux et autres jeux Outsider

Message par Pikathulhu »

LES MORTES DANS LES PAS DES VIVANTES

Une expérience de table ouverte en textuel jouée pour un périple au cœur de l’au-delà.

(temps de lecture : 14 min)

Joué entre octobre et décembre 2021 sur le discord Millevaux

Le jeu : Oriente, perdre ses repères en traversant la forêt de Millevaux


Avertissement : contenu sensible (voir après l'image)

Image
Tuomas Puikkonen, cc-by-nc & claude Féry, libre de droits


Contenu sensible : meurtre, cannibalisme
Le concept :

Tout a commencé avec des questions orientées que je posais aux nouveaux et nouvelles dans le discord Millevaux, comme un mini-roleplay d'introduction. Vu leur petit succès, je me suis dit que les habitué.e.s du discord étaient mûr.e.s pour une petite partie d'Oriente en commun. Le principe était simple, chacun.e tirait une question, y répondait, puis c'est la prochaine personne qui passait sur le salon qui pouvait tirer la question suivante et y répondre, jusqu'à la fin du jeu. Le lien pour voir les questions est le suivant.

Des ressources utiles (notamment portraits et questions supplémentaires) pouvaient être trouvées dans la collection Nervure sur Chartopia

Au lieu de prendre leur tour de question, les participant.e.s pouvaient aussi poser une question à une joueuse précédente. Elle y répondait peut-être après que quelqu'un ait déjà lancé une nouvelle question, mais avec la fonction « répondre à » de Discord, on pouvait suivre plusieurs conversations.


L'histoire :

Grace :

« Oriente connaît la langue putride. Qu'est-ce que vous en concluez ? »

J'en conclus qu'on est mal barrés. Quand je l'ai entendu.e parler à un arbre dans cette langue, je me suis dit : « flûte notre guide est soit un horla, soit un.e sorcier.e, soit une bête«

(et voici Grace, mon personnage)

Image
020_Eric Parker, paulo brabo, cc-by-nc, sur flickr.com


Maugre :

« Moi je pipe que trique, Oriente l'a toujours été un peu barge dans son genre alors qu'il se mette à grogner, renifler et même pisser contre un arbre... 'Crois-tu donc pas que ça m'surprend guère. Eh ? Et d'abord... Si s'té ty langue ça, comment qu'tu la r'connais ? T'serais pas un peu sorcier aussi ? »


Grace :

Je suis ni sorcier, ni sorcière. Je suis juste en relation avec les vibes de la nature. Tu peux pas comprendre, enfin je crois.


La vieille aveugle :

Image
zilverbat, cc-by-nc, sur flickr.com

« Qu'avez-vous fait dans la fosse que vous avez trouvée au fond de la forêt ? »

J'ai maudit la pourriture qui m'a privé de mes yeux quand j'y suis tombé. Après des jours de marche à boire l'eau de rosée et manger des vers de bois, j'ai maudit cette forêt et toustes ses les habitant·es . Après qu'Oriente a jeté un tronc sur lequel j'ai pu grimper, j'ai maudit Oriente et ses suiveuses. Puis je les ai suivi.


La marchebranche :

Qu'est-ce qui te fait plus peur encore que cette découverte, assez pour que tu suives malgré tout Oriente encore quelques temps au moins ?

Quel est le dernier souvenir visuel qui hante encore ta mémoire malgré l'oubli ?


Maugre :

« Quelle croyance Oriente vous a mise en tête ? »

Par la Trique-Du-Très-Saint-George ! Oriente y sait par-dieux ! Y sait ! Qu'y soit sorcier s'rait pas si estonnant. Alors pas de question on suit et 'ferme nos claques-maux. Très-Sainte-Gueuse, a-t-on assez salive à gaspiller ?

Image
aftab, cc-by-nc, sur flickr.com


Grace :

Parce que j'ai surtout peur qu'Oriente m'abandonne. Parce que je l'aime.

« Contre quel être ou choses avez-vous vu Oriente reculer ? »

Contre la caste des veilleurs. Ceux qui vouent leur vie à la lutte contre les horlas. Il y avait cette femme avec son œil magique. Il l'a fait reculer. Tout concourait à dire que ça fait d'Oriente un suppôt des horlas. Mais est-ce que ça veut dire que les horlas sont les méchants et les veilleurs les gentils ?
(j'ai pas encore mis de portrait pour Oriente mais çà commence à me plaire qu'il y en ait pas)

Image
Tuomas Puikkonen, cc-by-nc & claude Féry, libre de droits


La marchebranche :

« Qui vous a proposé de remplacer Oriente ? »

Au croisement de chemins à peine visibles, une autre marchebranche a toisé notre groupe pendant longtemps. Il lui manquait un doigt, trois dents et probablement  une case, mais elle nous a proposé avec aplomb de la suivre elle plutôt qu'Oriente. Certain.e.s d'entre nous l'ont suivie. Parfois je me demande si j'ai fait le bon choix


Grace :

En même temps elle inspirait la confiance


Maugre : :

Et pourquoi cet'chose là ? 'Tourne ta caboche. Qu'est-ce crois-tu quel'a qu'Oriente l'a pas ? Et qu'est-ce-sais-tu qu'Oriente l'a et quel'a pas ?

Oriente y veut êt' suivi. Et les veilleurs y veulent êt' barassés des horlas. Toi, tu veux quoi ? Qu'Oriente y t'aime ? Alors quoi qu't-en fais d'ces veilleurs ? Des gentils ou des méchants ? Et... quoi qu'tu fais d'toi ?


Grace :

Je t'avouerai que ça m'a chamboulé de voir que les veilleurs en avaient après Oriente. Si jamais Oriente est un horla ou un serviteur des horlas, je sais pas si je dois l'aimer. En même temps, qu'est-ce qu'on en connaît des horlas ? C'est peut-être juste la preuve qu'ils sont pas tous méchants. Enfin, pas tous comme ce...


La voleuse de souvenirs :

« Vous avez volé un souvenir d'Oriente. Lequel ? »

Arbre qui dansent, ondulent et craquent, taches de lumière sur les feuilles glissantes. Iel court dans le fond du sous bois.
L’œil magique de cette veilleuse l'a acculé dans un lieu de la forêt qu'iel ne connaissait pas
Le regard des arbres brûle sa rétine et lui fait peur.
La caresse des branches lea rassure.
Fuir la douleur ?
Se blottir dans l'humus protecteur ?
Deux contradictions qui forgent la course d'Oriente


La marchebranche :

Je pense que l'autre marchebranche connaît le chemin qui pourrait me ramener chez moi.
Mais je sais qu'Oriente a l'attrape-rêve ensorcelé qui m'évite les cauchemars de mon passé. Elle continue de dire que c'est pour mon bien, mais j'espère quand même le récupérer.


Grace :

« Qu'est-ce qui a changé depuis le début de votre périple ? »

Tout le monde. Tout le monde change de corps et d'attitude. Seul Oriente demeure.


La marchebranche :

Avec qui as-tu partagé ces impressions ? Quelle a été sa réaction ?


la voleuse de souvenirs :

J'en ai parlé aux suiveuses d'Oriente.
Voleuse d'un fragment important de son esprit, il fallait que je me confesse. Mais j'avais peur qu'en en parlant à Oriente iel me rejette.
J'ai donc filé le fallacieux chemin des suiveuses et sur la sente sans arrêt soumise à leurs sentiments, je leur ais confié mon vol.
Les suiveuses m'ont comprise.
Dans un premier temps parjure d'Oriente, elles le maudirent. Mais maintenant elle le suivent pour abjurer.
Elles m'ont donc proposé de devenir suiveuse.
Mon esprit tremble à l'idée d'intégrer une communauté.... Je doute d'en être capable


Maugre :

Que s'est-il passé quand vous avez faussé compagnie à Oriente ?

°Datura...°, Maugre s'était attardée un moment, un bref moment, pour recueillir cette plante utile. Oriente n'était plus là. Oriente avait toujours été là. Oriente c'était comme un gaz puissant et vital qui occupait l'espace de son existence. Cet élément évanoui, l'angoisse s'infiltrait, aspirée qu'elle était par ce vide, et avec elle comme la conscience aiguë de perdition, la perte de toute volonté, de tout repère... de toute direction. La perte de toute espèce de motivation exceptée cette vérité écrasante : dans la forêt comme dans le désert, toutes les directions se valent. « ₒᵣᵢₑₙₜₑ, ᵧ ₛₐᵢₜ. »


Grace :

« Pourquoi trouvez-vous sur votre chemin des marquages de direction semblables à ceux qu'utilise Oriente ? »

Parce que nous remontons dans le temps. Je ne vois pas d'autre explication

« Comment Oriente s'occupe du campement ? »

Avec amour. C'est la chose qui fait que je ne doute jamais de lui tout à fait. L'attention avec lequel il entretient le feu. Le soin avec lequel il dispose les couchages. Les précautions qu'il prend avec chacune de nous.


La marchebranche :

« En quoi les choses deviennent vraiment étranges avec Oriente dans cette forêt ? »

Plus aucune direction ne fait sens. La fin d'un chemin rectiligne peut être le début de ce chemin, tourner toujours dans la même direction ne fait jamais faire un tour complet sur soi-même.
Nous nous déplaçons à travers le temps plus qu'à travers l'espace. Ou à travers nos mémoires. Les marques étranges et les visions qui nous assaillent ne peuvent indiquer que cela.


Grace :

« Pourquoi Oriente se montre vulnérable seulement avec vous ? »

Parce que je suis la seule à le voir tel qu'il est vraiment. Les autres voient en lui un horla, un psychopompe, un manipulateur qui les garde sous son emprise et les égare dans l'espace et dans le temps. Vois je le vois tel qu'il est vraiment. Un enfant perdu qui a besoin d'aide et que je le tienne dans ses bras.


La marchebranche :

Qu'as-tu appris lors d'un de ces moments de vulnérabilité que tu n'as pas encore osé raconter à d'autres suiveureuses?


Grace :

Que vous êtes déjà mortes

« Vous avez demandé à Oriente qu'une personne vous suive et Oriente a accepté. Pourquoi ? »

La vieille aveugle. On l'a trouvée dans un charnier. J'ai dit à Oriente de la remonté et elle a accepté parce que c'était visiblement une morte. Une bouche inutile que sa famille avait abandonnée là. Et la part de sa vision durant sa mort la rendait médiatrice entre le monde des morts et des vivants.

Image
zilverbat, cc-by-nc, sur flickr.com


La vieille aveugle :

à Maugre :  Quel marché noir de la mémoire les suiveuses ont-elles institué à l'insu d'Oriente ?

(Surtout ne pas les détromper : des fantômes superstitieux comme des écureuils de l'année, c'est ma veine, mon répit... »)


Maugre :

'n'a tous un peu trop d'quelqu'chose et trop peu d'aut'chose. y'en a qu'ont trop vu qu'ont plus d'espoir, d'aut' qu'ont des rêves 'qu'sont pas armés pour s'réaliser. 'Pis y'a bein quelqu'un qu'a un attrape-rêve qu'pourrait nous arranger. Ouais, 'pis moi 'des creux, 'des pleins, 'bien vécu, 'plus rien à accomplir, 'suis juste Oriente. Si j'ai 'core une chose à faire, Oriente y sait. N'empêche, j'voudrais bien me rappeler du goût qu'ça a... un rêve. J'pourrais bein troquer un p'tit bout d'mémoire pour ça. 'Juste une fois.


Grace :

« Pour qui ça se passe plus mal que pour vous ? »

Pour la nouvelle intégrée, La voleuse de souvenirs se sent très mal dans la communauté, j'ai l'impression. Je pense qu'elle n'accepte pas son sort, mais elle le devine parce qu'elle a compris ce que nous étions. Des âmes mortes en quête du Léthé.

« Quelle est la pire chose que vous avez dû faire avec Oriente pour survivre dans la forêt ? »

Et bien, bien que nous soyons mortes, nous avons besoin de nous nourrir, si nous ne voulons pas nous consumer dans des souffrances intolérables. Je ne veux pas m’appesantir sur ce que nous avons du manger.


La marchebranche :

« Pourquoi feriez-vous confiance à Oriente alors que ce n'est pas un.e professionnel.le ? »

Parce que je ne suis pas la seule à la suivre. Parce que notre bande hétéroclite et improbable paraît plus forte face à la forêt.
Parce que je ne veux pas être seule à pourrir entre les racines d'un arbre, et que c'est seulement ensemble que nous avons la force de marcher.


Grace :

« Vous rappelez-vous de votre point de départ ? »

Oui, mais je ne sais pas pour les autres, moi je ne veux pas m'en rappeler. Ma vie d'avant pèse trop lourd, et j'espère bien qu'une fois arrivée à destination, une fois au bois des morts, je l'oublierai.


Maugre :

« Qu'a dit ou fait Oriente qui vous a semblé un éloge de l'Errance ? »

Errer ? Vivre à titre d'expérience ? Égrainer les pas sans autre but que voir ce qui va se passer ? De Maugre mémoire, la forêt aux côtés d'Oriente avait toujours été la même ; chaque élément de cet environnement nébuleux était flou, indistinct et indigne d'intérêt ; de ce domaine crépusculaire, Oriente et ses suiveuses étaient les seuls corpuscules réellement tangibles, la seule et frêle attache empêchant la dérive ; - prêter l'oreille au hululement d'une sirène ? C'était ne plus écouter les sages recommandations d'Oriente. - Fendre d'un regard lumineux les ombres boisées et irradier de son attention les doigts spectraux du branchage ? C'était déjà se détourner du Guide. - Tendre la main, donner réalité, chaire et sève à l'objet le plus fantomatique et insignifiant du décors ? C'était à jamais lâcher le cordon et s'abîmer soi-même hors du sentier. Dire ou faire l'éloge de l'Errance ? Mais Oriente était le Dithyrambe jaloux et voleur de l'Errance ; lui-même la vivait, la respirait, la chantait, mais en même temps il se la réservait et la grimait du « Pour » dans la mise en scène qu'il présentait à son publique ; ainsi, avait-il dérobé à Maugre jusqu'à l'Idée même de l'Errance et lui substituait cette verroterie chatoyante mais illusoire : une destination, le bois aux morts.


Grace :

« Quelle bête vous suit partout ? »

Le souvenir de qui j'étais de mon vivant. La personne maigre qui vivait à l'intérieur de moi. Je lui jette des pierres quand elle s'approche de moi.


la voleuse de souvenirs :

« Quelle est la vérité que vous cache Oriente ? Et de votre côté ? »

Oriente dit ne pas savoir où iel va, iel prétend errer dans un indistinct emmêlement de  souvenirs, de lichen et de branches mortes. Pourtant, au plus profond des pales pupilles qui parent son portrait, je sens qu'iel sait où le sentier nous emmène. Iel cherche un lieu. Peut être s'est iel convaincu⋅e ellui même de la chatoyante verroterie qu'iel a présenté à Maugre. Peut être suit-iel d'autres plans. J'ai hâte d'atteindre ce lieu. Peut être y trouverais-je enfin une place dans la communauté.

De mon coté, ce que je cache est enfoui sous les cendres d'un vieux feu humide.
Un cercle, des silhouettes allongées, des vêtements rabougris.
Une lumières, des bouches, des yeux avachis.
Un lien, des chants, une communauté meurtrie.
Ce lieu de ressassement, je ne veux plus le voir, je ne veux plus en parler, je le fuis.

(je me suis permise de Xcarder la question : « Qui Oriente a dû torturer ? Pourquoi l'avez-vous aidé ? » qui me mettait un peu mal à l'aise et je suis passé à la suivante)


Grace :

« Qui de vous ou d'Oriente a le plus perdu son humanité ? »

J'espère bien que c'est nous. Que nous avons perdu les oripeaux de toute humanité. Oriente en a encore besoin, de son humanité, pour nous montrer le chemin, pour nous ouvrir la porte, pour qu'on nous laisse entrer à sa demande, dans la forêt des morts, là où est vraiment notre place, là où réside notre repos, derrière les murailles de l'oubli qui enfin nous sépareront de notre vie passée de souffrance et de culpabilités. Moi, je n'aspire qu'à une chose, me débarrasser un à un de chaque sentiment comme d'une mue trop lourde. Qu'à m'abandonner totalement en toute confiance à mon sort, qu'à une dernière fois mettre mes pas dans les siens et me rapprocher, sinon du ravissement, au moins de la consolation qu'apporte la fin. Je tiens la main de mes sœurs, je vois leurs silhouettes de moins en moins distinctes et je les aime d'autant plus que l'heure des adieux se rapproche, non pas adieu à leurs présence, mais adieu à tout lien qui nous unit.


La vieille aveugle :

« Vous avez volé un souvenir d'Oriente. Lequel ? »

Dans la routine des soirs humides et froids, des repas de glu d'herbe, un jour, alors que je m'étais écarté pour aller, j'ai entendu Oriente arpenter un coin de fougères, de rocs et de limon. Tapi, je l'ai épiée et quand elle est partie, j'ai trouvé la source.
L'eau boueuse a bientôt laissé la place à un filet clair et chantant. Je l'ai gardé pour moi, toute la nuit j'y suis revenue en cachette, emplissant mes joues, mes entrailles mes cellules, et une section de tronc pour le trajet.
Depuis, je savais où l'eau coulait tous les soirs, avant que je ne donne le secret à une malade. Elle va mieux, et elle la garde pourtant. Et moi, je cherche sans plus trouver. Je crois qu'Oriente s'en doute.

La connaissez-vous ? Vous en doutiez-vous ?


Grace :

Je connais cette malade et de jour en jour je l'ai vue reprendre des couleurs, alors en l'épiant j'ai compris qu'elle avait volé le souvenir de la source à Oriente. Elle redevient vivante et Oriente s'étiole. J'hésite entre annoncer la vérité à Oriente ou tuer cette guérie pour conjurer le mauvais sort.

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whatsthatpicture & Keith M Avery, cc-by-nc, sur flickr.com

« Qu'est-ce qui vous ferait renoncer à votre destination ? »

Ce serait que je redevienne vivante. La forêt des morts n'est un paradis que pour les morts, et un enfer pour les vivants. Ce serait qu'Oriente meure. Iel ne pourrait plus nous ouvrir le passage sans risque. Hier, j'ai tué la première communiante. Je lui ai enfoncé une hache dans le crâne. Tout va rentrer dans l'ordre à présent.

« Qu'est-ce qui vous pourchasse ? »

Les vivants et les vivantes qui ne veulent pas que nous partions. Ma fille qui ne veut pas laisser filer la personne qui l'a élevée. Nous devons jouer de mille ruses pour effacer nos traces dans la sylve. Nous marchons dans des pierriers ou nos semelles ne marquent pas. Nous nous enlisons dans des vasières où la boue se referme sur notre passage. Nous nous couvrons de croûte terrestre pour masquer notre odeur. Mais j'ai toujours l'impression qu'elle rôde à la limite de mon champ de vision, elle et les proches de mes camarades.

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Bob Jagendorf, eric schepers, road less trvled

« À quel événement pas naturel Oriente évite de vous donner une explication ? »

La vieille aveugle a retrouvé la vue. Elle dit que la forêt des morts est un gouffre. Oriente se tait sur tout cela. Devons-nous tuer la vieille aveugle maintenant qu'elle voit et dit des choses qui nous affolent ?

Image
zilverbat, cc-by-nc, sur flickr.com

« Qu'est-ce qui vous donne des frissons chez Oriente ? »

Sa peau, parce qu'elle est de plus en plus en froide
Et parce que je l'aime
Et parce que j'ai peur de le perdre
Et parce que j'ai peur qu'il nous perde


La vieille aveugle :

« Quel est le lien qui vous unit à Oriente au-delà du simple voyage ? »

Elle m'a tué et caché, et la troupe des suivantes a eu à manger pour des jours. Des jours de camp et de fête.
C'est comme ça qu'elles sont arrivées à destination.
Ça m'a pris du temps pour comprendre, mais maintenant je sais que ce n'est pas un hasard, qu'il fallait en passer par là. Je ne leur en veux pas. La seule chose que je regrette c'est de ne pas avoir pu y goûter. La prochaine fois...

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Philippe Put, cc-by


Grace :

« Vous êtes à un carrefour décisif. Continuez-vous à suivre Oriente ? »


La voleuse de souvenirs :

Je veux atteindre le lieu promis par Oriente. Cependant, son chemin est pavé de souffrance pour moi. Je continue ma marche chancelante derrière Oriente. J'espère voir un jour ce que je cherche, j'espère un jour que je ferais mienne cette communauté. Mais je sais au fond de moi qu'il est plus sur que je me perde sur ce long chemin, que je chute dans une fondrière et que la colonne passe sans se retourner comme ma vie a passé, trop vite et sans regard


La marchebranche :

Je suis Oriente, parce que c'est la colonne qui la suit que je suis. Parce qu'il n'y a qu'ensemble qu'on peut atteindre cet autre monde qu'on nous a toujours promis. Parce qu'ensemble, on peut arriver à suivre Oriente, étoile polaire dans l'enfer sombre de la forêt. Parce qu'ensemble on va loin, alors que seul·e on ne va nulle part.


Grace :

[J'aime tellement la polysémie de « Je suis Oriente »]

Je ne suis pas Oriente car nous sommes arrivées au portail de la forêt des morts. Je vais y entrer et Oriente va rester à la porte. Adieu mon aimé. Je ne t'oublierai jamais.


Bilan :

Merci d'avoir participé à cette expérience d'Oriente en asynchrone !

C'était intéressant mais j'ai vu aussi quelques limites, une participation erratique et une difficulté commune à rebondir sur les propositions des unes et des autres. Petit souci aussi avec l'application for the drama. Si c'est super pratique pour l'asynchrone d'avoir ce deck de cartes en commun, le truc c'est que la fonction partie courte (que j'avais sélectionnée) distribue un pourcentage des cartes et non un nombre de cartes données. Or, comme Oriente a presque deux fois plus de cartes que Pour la Reine, ça a fait un gros nombre de cartes quand même et du coup la partie s'est un peu inutilement étirée en longueur.
Après, je pense pas que ce soit gênant malgré toutes mes remarques, ça peut aussi être le plaisir de l'asynchrone, voir un truc se dérouler chill sans injonction à l'intensité.

Maintenant qu'Oriente nous a conduites à bon port, il ne me reste plus qu'à vous souhaiter un joyeux Noël !
    

Joueur de La vieille aveugle :

Bien agréable de mon côté cet engagement élastique. Pour gagner en vitesse de rotation, systématiser le fait de partir en laissant une question ?

Je m'excuse pour le cannibalisme inopiné, je m'en suis rendu compte après coup, mais j'aurais dû rester plus flou, plus ouvert.
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Message par Pikathulhu »

VISAGE FAMILIER

L’exploration des Balkans continue pour la petite troupe, avec un grand mélange de jeux pour cette session ! Un récit et un enregistrement par Claude Féry.

(temps d’écoute : 1h06, temps de lecture : 3 min)

Joué le 22/05/2020

Le jeu : Inflorenza, héroïsme, martyre et décadence dans l’enfer forestier de Millevaux

Lire/télécharger le mp3


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Åsa Hagström, cc-by


Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).


Le contexte :

Nous avons joué, avec Gabrielle et Alex à Nano Inflorenza la suite de notre histoire, en mode carte rouge dans un premier temps puis avec facilitateur dans un second temps.


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L'histoire :

Liberté a subi l'épreuve de la boîte, rite initiatique, à base de scarabée, afin d'accéder au système de contrôle d'accès de la cité secrète de Mejgorié. Elle s'est alors familiarisée avec Elfe. Puis après qu'elle ait béni de sa salive un tord boyaux à base de lait de noisette pour soigner la blessure à l'épaule récoltée par Siobhan, nous avons parcouru la cité juchés sur un artifice, vers la zone de décontamination..
Une étrange entité surgie de la naphte a tenté de s'emparer de nous, mais nous sommes parvenus à la repousser, grâce au Néolybien
Nous  déplorons la perte de notre guide, Aliosha, jeune FTP emporté par une balle perdue de la milice .


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Le bilan :

Ce fut une belle expérience, comportant des moments d'émotions, un sentiment d'étrangeté et d'autres enfin de réelle convergence avec les personnages, (dégustation du lait de noisette boosté aux nanites et épreuve de la boîte avec un copain scarabée).
La séance avait une tonalité générale plutôt ancrée dans Degenesis que Millevaux, même si l'égrégore, l'oubli et la forêt étaient très présents dans ces ruines.
Le rythme de la session a été dicté par les bougies mouchées à l'issue de chaque scène, ponctuant une disparition ou une perte, dix au total, en référence à Ten Candles.
Nous avons utilisé les tables d'exploration de Bois-Saule, deux cartes de La stèle au cœur des plaines et le théâtre Millevolodine.
Enfin j'ai emprunté les manifestations de l'égrégore à un scénario conçu pour Arbre.

La première instance de Gabrielle, et nos deuxièmes instances ne figureront pas au sein du témoignage audio de cette session (bogue du zoom sur la première instance et oubli de déclenchement sur les secondes instances)


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Commentaires de Thomas :

Merci beaucoup à toi pour ce retour !

B. ça avait l'air d'être un beau patchwork de jeux et d'aides de jeu ! ça me fait penser qu'avant-hier, j'ai utilisé La Stèle au Cœur des Plaines pour générer des lieux lors d'une partie en présentiel, et ça fonctionnait super bien.

C. Quand tu dis que tu as utilisé un scénario conçu pour Arbre, veux-tu dire un scénario conçu par moi ou par toi ? Dans les deux cas, lequel ?


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Claude :

C. Par toi, Le tunnel de la peur. J'y ai puisé Elfe et Visage Familier l'Horfraie qui est le retour du grand méchant repoussé dans les épisodes précédents.

B. Oui  le cadrage des scènes prend de l'ampleur. L'une des cartes a été jouée par Alex et ensuite par moi, chacun en reprenant une ligne pour son instance. Ten Candles est un excellent jeu, qui mérite d'y jouer tel que, mais en séance isolée ou pour une fin de campagne. En revanche, l'aspect procédural, manifesté à la table par les bougies que l'on mouche est très efficace. Je considère la critique au vitriol de Marion Vasnier  injuste. Elle y présente un jeu manipulateur et dysfonctionnel qu'il n'est pas. Tout comme Cthulhu Dark ou L’Empreinte, le jeu invite à narrer la perte et la disparition des personnages, mais avec un système simple, procédural et très élégant qui s'attache à développer une atmosphère forte, angoissante et désespérée.


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Thomas :

C. Ah ah Visage familier est charmant


Commentaires de Thomas après écoute :

B. Super la lecture de poème sur fond musical qui se prolonge en narration

C. Est-ce que vous appliquiez le système ? (écriture de phrases, lancer de dés)

D. Intéressant que vous ayez utilisé le système d’exploration de Bois-Saule


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E. Le scarabée était-il vivant ?

F. Un passage d’Inflorenza en Carte Blanche peut déjà beaucoup diminuer le mode auteur.

G. Quand on goûte quelque chose à l’aveugle, c’est déstabilisant :)

H. Hermann et Aliosha sont-ils des références à des personnages anciennement joués ?


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Réponse de Claude :

C. Oui

E. Oui et désireux de sortir de sa boîte. Il a été libéré, rassurez-vous !

H. Non un seul personnage conçu à la volée avec des aspects différents selon qui l'évoque.

G. Oui. J'aime le moment de la découverte. Parfois cela produit des atmosphères très riches

H. Oui deux facettes de personnage, les réminiscences d'Hermann joué par Gabrielle dans Parasite avec Dégringolade et mes souvenirs d'Aliosha joué par moi avec Sève.         
Les deux réponses se côtoient.
Le personnage était destiné à l'origine à Xavier qui n'a pas joué et nous avions convenu avec Gabrielle que ce serait une souris


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Message par Pikathulhu »

LE CONSERVATOIRE OCCULTE

Qui surveille les gardiens ? Un hack surnaturel contemporain des Sentes où tous les potards de l'étrange étaient sur 11 !

(temps de lecture : 5 min)


Joué le 18/02/2023 à la MJC Jacques Prévert au Mans

Le jeu : Les Sentes, drames forestiers dans une réalité sorcière (jeu de rôle et GN)


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Toutes les photos sont de Laureen Keravec (C). Un grand merci à elle !


Le contexte :

Pierre-Olivier Blondont et ses comparses de l'association GNiarc basée au Mans a organisé un hack du GN Les Sentes intitulée Le Conservatoire Occulte. Il se passait dans une MJC en plein dans le vieux Mans, dans un bâtiment médiéval au cachet certain.

Pierre-Olivier a particulièrement digéré ce qui fait l'intérêt des Sentes et ce GN en est le résultat. La principale déviation par rapport aux Sentes est que Le Conservatoire Occulte n'est pas un GN post-apocalyptique dans la forêt mais un GN contemporain occulte en intérieur.
Le matériel repris des Sentes était : les missions de vie (renommées en arcanes et ramenées au nombre de 22 avec les noms des arcanes majeurs du tarot), les destins, et les rituels (renommés oracles), avec quelques réécritures ad hoc.
Pierre-Olivier a rajouté des PNJ qui fonctionnaient sur une mécanique de fronts inspirée de Apocalypse World.
Le mécanisme d'horloge de l'apocalypse était également abondamment repris puisque chaque personnage-joueur et PNJ en disposait d'une (matérialisée par une vraie montre si l'on pouvait), qui nous servait de réserve de mana, de points de vie, et de compte à rebours vers la chute du personnage.
On pouvait faire reculer son horloge si l'on réalisait un oracle, et certaines utilisations de pouvoirs ou ouvertures de passages interdits nous coûtaient des avancées sur l'horloge.

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Les résidents du Conservatoire ont trois ans pour nettoyer les locaux entre chaque résurgence des portails.

J'ai trouvé la mécanique intéressante, je ne sais pas à quel point elle a influé sur le jeu, en revanche. Je l'ai utilisé au moins une fois d'une façon qui me convainquait en guérissant un personnage avec qui j'avais un lien au coût d'une avancée sur mon horloge. J'ai aussi ouvert un passage interdit.

Nous étions 4 PNJ et avions chacun un front à gérer. J'ai trouvé que ça structurait beaucoup le jeu, et c'était très amusant à jouer. Je n'ai pas amené mon propre front jusqu'à sa conclusion, mais j'ai pas mal contribué à faire avancer celui de Romy, une occultiste possédée par une entité séculaire.

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Je jouais Virgile, la porte des mondes


Je garde un très bon souvenir de cette session. Déjà, c'était bien reposant d'être juste un PNJ et nom un orga plus engagé. Tout comme à Vestige, je trouve intéressant que l'ambiance d'accueil et de bienveillance recherchée sur Les Sentes soit aussi présente. Les deux équipes organisatrices ont d'ailleurs à chaque fois respecté mon souhait de proposer une nourriture végétale, ce qui me tient absolument à cœur.

Pierre-Olivier a eu l’idée de combiner la petite salle de cinéma de la MJC avec un barnum pour créer une « chambre de distorsion », un endroit qui était une porte vers les mondes et dont mon personnage avait la charge. Le dispositif permettait de voir l'image projetée quand on était à l'intérieur du barnum, mais aussi quand on était à l'extérieur. C'était vraiment chouette et ça a permis de faire beaucoup de choses intéressantes qu'une simple black box n'autorise pas, il me semble, notamment interagir avec les voyageurs dimensionnels en entrant dans la black box, en regardant par l'ouverture, en regardant par l'extérieur, en tapant sur les tentures... Bref, je me suis amusé comme un petit fou à jouer Virgile et à faire visiter les distorsions, et les joueureuses étaient très en demande ! Avec cette idée, Pierre-Olivier a très bien digéré le concept de rendre immersives les méta-techniques. C'est la première fois que j'utilise de la vidéo en GN et ça m'a beaucoup plu ! J'ai fait un tout petit peu à l'arrache, mais globalement, je suis fan d'impro donc ça l'a fait !

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Dans la chambre des distorsions, Rose Despois la psychiatre, va dans le passé revivre son entrevue avec un de ses patients possédé par l'esprit de Sokar, le Grand Annihilateur

Mes deux meilleurs souvenirs en ce qui concerne cette chambre des distorsions :
+ J'ai passé vingt minutes avec une joueuse de l'agence SCP pour lui faire revivre une rencontrer avec une anomalie dans les forêts irradiées de Tungunska. J'ai utilisé pour cela la boucle d'une représentation de danse butō où la danseuse avait des postures particulièrement inhumaines. On a joué ça un peu comme un jeu de rôle, dont j'aurais été le MJ, je faisais les paroles de l'anomalie, et je donnais un peu le contexte, avec un dilemme moral à la fin...

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Chimera, une performance de Melissa Lohman (vidéo sous licence cc-by)

+ Sur une idée de Pierre-Olivier (que j'ai peut-être un peu tordu), il fallait que je force une voyageuse à se perdre dans les distorsions. Avec son autorisation, j'ai filmé la joueuse en train d'errer dans la chambre des distorsions, puis j'ai projeté ce film. j'ai demandé ensuite à deux joueurs d'aller dans la chambre des distorsions pour aller la retrouver, et la joueuse est ensuite intervenue pour qu'on puisse jouer ces retrouvailles.

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Malgré le grand Oubli, les souvenirs de la guerre occulte restent assez vivaces pour que la tension soit au maximum.

C'était très chouette d'interagir avec beaucoup de joueureuses que je connaissais pas. Je suis un peu désolé pour le manque d'accessibilité du bâtiment. Pour ma part, j'ai fait quelques distorsions au rez-de-chaussée, mais c'est sûr que globalement on était toustes souvent dans les étages, et c'était très pénalisant pour les personnes à mobilité réduite. A refaire (mais il me semble que le prochain Conservatoire Occulte n'aura pas lieu au même endroit), on aurait peut-être gagné à un peu plus écrire les temps forts communs et à les localiser au rez-de-chaussée, pour qu'il y ait quand même du jeu à ces endroits.

J'ai trouvé que les gens avaient beaucoup de curiosité pour le côté impro du GN et tout le monde avait joué le jeu, même ceux qui étaient sceptiques de l'impro et n'ont donc au final pas passé le meilleur GN de leur vie. C'était particulièrement casse-gueule de faire de l'impro avec la proposition initiale de mélanger toutes les inspirations ésotériques possibles, mais ça a curieusement... bien marché ! Beaucoup de chaos et genre des menaces existentielles majeures à chaque couloir, mais c'était cool.

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Le tesseract, encore un artefact chelou qui aurait mieux fait de rester rangé dans un placard...


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Rien de tel qu'une déco cosy pour se mettre dans l'ambiance...


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Le professeur Knapfe tout équipé pour mesurer les émissions d'ondes occultes


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Le QG de la loge d'Hermès, des occultistes qui jouent un peu trop avec le feu


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Séléné est-elle en danger ou est-elle un danger ?


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J'ai retrouvé la même atmosphère que dans Les Sentes dans les sens où tout le monde se prête de bon cœur aux rituels les plus zarbis.


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La famille, c'est aussi des soucis.

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Absolument aucune raison de penser que les choses sont parties en cacahuète !


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Au départ, les membres de la loge d'Hermès étaient pourtant censés assurer notre sécurité...

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Fais-moi confiance...

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Les premières affaires de possession démoniaque prennent tout le monde de court.

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Il se passe de drôles de choses dans le QG de l'Agence SCP...

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Parmi les nombreux petits mystères que je n'ai pas résolus, ces statuettes qui faisaient des apparitions récurrentes...
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Message par Pikathulhu »

MILLEVOLOÏD

Les univers trashs et déjantés de Batronoban, mêlés à la forêt cryptique de Millevaux pour une quête épique parfaitement hors du réel !

(temps de lecture : 45 min)

Terminé le 07/12/2019

Les jeux principaux :
Mantoïd Universe de Batronoban & co., space opera barbare du chaos
La Trilogie de la Crasse, par Batronoban et Christophe Siebert : cafards, porcs et mouches mutantes et toxiques

Univers : la forêt de Millevaux

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von Zzyzx, cc-by-nc


L'histoire :

    La règle n°1 du Fight Club : il est interdit de parler du Fight Club.
    La règle n°2 du Fight Club : il est interdit de parler du Fight Club.

    Et je colle une patate en pleine poire de mon adversaire. Mais ça ne m’empêche pas d’en prendre une au passage. J’ai du sang dans la bouche mais je m’en fous. Je montre les dents, en crache une et balance un coup de pied dans l’estomac du type qui me fait face. Les autres hurlent autour de nous. Je comprends rien à ce qu’ils disent. Mon adversaire a le teint pâle et ça fait ressortir ses scarifications. Il a les traits tirés aussi, après le coup que je viens de lui flanquer. Objectivement, il est plus fort que moi mais… il est moins… brutal ! Alors qu’il tente de se relever, je vais pour lui balancer un nouveau shoot dans les côtes. Ça l’achève ! Le gars s’écroule au sol et fait signe qu’il abandonne. Peut-être que lui il abandonne mais pas moi !
    Je sens le chaos bouillir dans mes veines. Ça envahit mon cerveau. Ça me défonce la gueule. Ça me déchire la gueule au sens propre alors qu’une espèce de trompe mécano-insectoïde remplace mon nez et tout le bas de mon visage. Mes yeux ? Mes yeux ! Je vois… partout ! les types autour de moi continuent à gueuler. Je ne sais pas s’ils se rendent compte de ce qui est en train de m’arriver. Mon dos me fait mal et ma peau se déchire pour laisser apparaître des ailes translucides. Mes jambes se tordent et me font mal. Les autres hurlent toujours mais j’entends aussi dans leurs têtes. Et ils ne remarquent rien. Ils ne voient qu’un type à la gueule en sang qui vient d’en éclater un autre. Un samedi soir comme un autre.
    Je m’appelle Tad-Angel Corso. Mais, je ne sais pas pourquoi, les autres crient le nom de Roormi. Je regarde autour de moi. Je suis… Je suis une Mouchoïde Pétrol’head qui torture ses ennemis ! Je veux savoir ! Tout savoir ! Les secrets de l’univers & d’Azathoth ! Mais aussi ses liens avec Millevaux et Shub-Niggurath ! Et l’origine de cette étrange vision aussi… Celle d’un autre moi, dans une forêt, en train de trancher en deux un géant mécanique.
    Je n’ai pas besoin de faire un tour sur moi-même pour avoir une vision périphérique de ce qui m’entoure. Je n’ai pas besoin d’écouter ce que disent les autres pour savoir ce qu’ils pensent. Ils voient très bien ce que je suis devenu. Mais ils refusent de l’accepter car c’est trop dégueulasse. Alors, ils voient seulement le type que j’étais il y a quelques instants à peine. Les noms d’Azathoth, Shub-Niggurath et Millevaux tournent en boucle dans mon crâne. Je ne peux pas rester là ! Je suis encerclé par tous les membres du Fight Club. Je saute au plafond et cours jusqu’à la sortie.

    Je suis une Mouchoïde, un Mouche. Je le sais parce que l’« Autre », le « Joueur », dont je suis l‘avatar le sait. Je ne sais que ce qu’il veut bien que je sache car, autrement, il n’y aurait plus de jeu et… le Joueur est… joueur.
    Les Mouches appartiennent généralement à cette organisation secrète nommée Black Rain. Mais ce n’est pas mon cas. Mes investigations ne vont pas concerner le Meurtre Métaphysique de l’Hommonde. Non, moi, je veux utiliser mes nouvelles facultés pour percer d’autres mystères. Les mystères de l’univers ! Les mystères d’Azathoth et de Millevaux !
    Je ne pars pas de rien ni de nulle part. Grâce aux connaissances du Joueur, je connais l’existence de ce marché noir aux mains d’un underground composé de morts-vivants, d’hommes-porcs et de cafards géants. Alors, je m’y rends. On y accède par un cimetière et ce n’est même pas une blague. Par contre, c’est plutôt joli car il neige. Mais ça reste étrange car ce n’est pas tout à fait la saison. Bref, je m’enfonce dans cette ville souterraine et suis plus qu’étonné parce que j’y découvre.
    Ce marché ressemble à un village traditionnelle du Japon médiéval. Il y a ces petites maisons à pagode, des petits ponts qui enjambent les égouts. En vrai, toute l’architecture et l’esthétique du coin emprunte aux clichés du japon. Et même quelques marchands et visiteurs portent le kimono traditionnel, ou caricatural, au choix.
    Il n’y a pas beaucoup de monde ce soir. Aussi, je repère assez facilement cette femme à l’air nerveux, toute excitée. Elle a le teint pâle et, drapée dans son imperméable noir, on dirait un vampire. Mais ce n’est pas le cas. Elle n’est pas un vampire. Elle est un mort-vivant, en fuite du Tas de Merde des Cafards. Je m’approche, l’air le plus cool possible. Je lui demande si elle a besoin d’aide. Je sais déjà que c’est le cas. Le Joueur me dit qu’elle s’est effectivement enfuie du Tas de Merde mais que ce n’est pas tout. Par la bouche de cette fille, il me dit que le Passeur l’a faite transiter par une forêt, Millevaux, et que là, on lui a volé son cœur. Elle avait réussi à tromper le passeur et conserver son organe mais, une fois dans la forêt, un Horla le lui a volé. Elle ouvre son imperméable et mon montre la tâche de sang qui imprègne sa chemise au niveau de sa poitrine, côté gauche. Elle me demande si je peux lui rapporter son cœur. Elle me dit qu’elle a de l’argent. Ça tombe bien, très bien même. Je veux me rendre à Millevaux. Mais, même si en tant que Mouchoïde je peux voyager entre les mondes, il me faut quand même des coordonnées. Elle les a mais… Et elle prend un air suspicieux. Comment s’assurer que je vais revenir ? Elle n’a qu’à venir avec moi, je lui propose. Mais non ! c’est exclu ! Elle ne veut pas retourner là-bas. Alors, elle va devoir me faire confiance. Je lui demande les coordonnées de Millevaux, des informations sur l’endroit où elle a atterri et une description du Horla qui lui a volé son cœur. Je lui propose aussi de nous donner rendez-vous où elle veut en ville, quand elle veut. Je lui promets d’être là, que j’aie trouvé son cœur ou non, au moins pour lui dire où j’en suis. Cela semble lui convenir. Elle me donne rendez-vous dans quatre jours, dans une brasserie. Mais avant cela, je devrais, dans la forêt, me rendre près d’une falaise. Je reconnaîtrai l’endroit car il y pleut beaucoup et l’eau de pluie transforme les choses. Il faudra aussi faire attention aux parasites végétaux. Ils sont une des conséquences de la pluie. Ensuite, au nord-ouest, se trouve un palais-mille-pattes fait de milliers, voire de millions, de corps humains collés les uns aux autres. Le palais semble en ruine mais, en réalité, l’intérieur est « comme neuf ». Une lumière rouge palpite en permanence et, là, on peut attirer les fantômes et les Horlas. Celui qu’elle a appelé était scarifié mais malgré cela très beau. Ses cicatrices étaient… artistiques et bouleversantes. Il lui a promis de la délivrer de ses peurs les plus profondes. Là, elle raconte s’être transformée en un chien solitaire et apeuré, terrifié à l’idée d’être seul mais aussi à l’idée de n’être qu’un membre anonyme d’une meute. Elle m’explique être tiraillée par ce paradoxe angoissant : peur de la solitude mais peur de se perdre dans un groupe. Puis, quand elle a retrouvé forme humaine, le fantôme, ou le Horla, s’était enfui avec son cœur qu’elle s’était donné tant de mal à conserver.
    En vérité, je me fous complètement des histoires de cœur de cette femme. Pourtant, son histoire m’intéresse car ce palais-mille-pattes est bien le signe d’une présence manifeste d’Azathoth sur le territoire de Shub-Niggurath. Pour l’heure, ce n’est pas très clair mais on dirait qu’il y a eu des fuites entre les domaines des deux divinités et je veux en savoir plus. Et je veux savoir en quoi ça me concerne. Et ça, pas de bol, je sais que le Joueur n’en a pour l’instant aucune idée.

    Millevaux ! J’ai l’impression d’atterrir dans la cave inondée du Multivers. Je regarde autour de moi. Je suis inquiet par ces parasites végétaux qui semblent traîner dans le coin. L’endroit est de plus humides et plus que propice au développement de champignons en tous genres. En fait, l’air est tellement chargé d’humidité que cela lui donne des reflets multicolores, comme plein de petits nuages arc-en-ciel. Mouchoïde Pétrol’head, je me défais de ma forme humain. Mon bec de gaz devrait me protéger des spores. J’espère. Maintenant, je dois trouver la falaise et le palais des mille-pattes. En vérité, je cherche n’importe quelle manifestation de la présence d’Azathoth. Et je suis servi !
    Je ne sais pas si j’approche de cette fameuse falaise mais, quoi qu’il en soit, j’arrive en vue du palais-mille-pattes. Mais la situation est des plus chaotiques puisque le palais est assiégé par une horde de Sumériens. Les mille-pattes leur répondent avec un bataillon de Sodomiseurs semant le trouble parmi les éclaireurs. Les Sumériens ne doivent pas être habitués à ce genre de traitement. D’ailleurs, ils perdent du terrain.
    Je profite du bordel ambiant pour tenter de m’introduire dans le palais. Quel talent ! Quel brio ! Je vole jusqu’à une ouverture puis, discrètement, marche au plafond jusqu’à gagner cette fameuse pièce éclairée d’un rouge palpitant. Je ne sais pas trop ce que je cherche là. Le Horla ayant volé le cœur de la fille ? Autant je me fiche de son cœur, autant il aura peut-être des réponses à mes questions. Et puis, que fout-il dans un palais-mille-pattes ? Et surtout, que fout un palais-mille-pattes ici ?
    Me baladant au plafond, je constate une intense activité mille-pattes. Pourtant, ces saloperies ne paraissent pas du tout intéressées par la bataille qui se joue dehors. J’en suis un au hasard qui me conduit à l’entrée de la forteresse. Là, plusieurs sont en train de s’amuser en torturant un cavalier sumérien arraché à son dinomutant et tiré, dans tous les sens du terme, à l’intérieur. En les observant, il s’avère qu’ils considèrent le Sumérien comme une sorte de casse-tête amusant à résoudre. Aussi, ils l’étirent et le plient dans tous les sens jusqu’à ce que, à défaut de trouver une solution acceptable à cette énigme, les os du Sumériens ne finissent par céder.
    Alors, j’utilise ma vision de Mouche afin de savoir si, par hasard, il y aurait ici quelques Cafards ou Soars invisibles. Rien, si ce n’est quelques Porcoïdes entiers, et encore vivants pour certains, en train de rôtir, empalés sur une broche. Les mille-pattes ont le sens de la fête. Mais ça ne me dit pas où se trouve cette fichue salle et ce Horla.
    Ça n’avance pas. Et plus je traîne, plus je risque de me faire repérer. Alors, je m’en remets à ROHUM. Il y a des humains dans ce palais, des Millevaliens. Et ils connaissent l’existence de la salle que je cherche. Je capte leurs pensées et me laisse guider jusqu’à la salle rouge palpitante.
    Cette fille ne m’avait pas tout dit sur cette salle. Peut-être n’avait-elle-même pas compris où elle était. Cette salle est en réalité une gigantesque cathédrale construite sur le squelette métallique d’un void-dragon. Et c’est de son cœur que vient cette lumière rouge palpitante. Chaque membre et organe interne, chaque vaisseau sanguin, sont autant de pièces et de couloirs menant jusqu’à ce cœur. Je ne sais pas pourquoi mais je sens que je n’ai pas d’autre choix que de tout tenter pour atteindre ce cœur ! Aussi, alors que plusieurs fantômes semblent m’avoir pris pour cible, je fonce jusqu’à l’entrée de cette forteresse dans la forteresse. Et évidemment, c’est par le cul que je rentre !
    Je remonte aussi vite que possible le colon technodracoïde et me retrouve dans une sorte d’abri où il fait très chaud. Dans un coin, il y a un trousseau de clés. C’est louche mais j’approche. Je demande à ROHUM si je dois craindre un piège. Évidemment que oui ! S’il y a un piège, c’est que ces clés ont de la valeur. Alors, il me les faut ! Je tourne autour, prudemment. Je regarde partout autour de moi, près à réagir à la moindre menace. Rien à l’horizon, j’attrape les clés et, littéralement, les bras m’en tombent !
    Et je suis là, comme un con, à regarder mes bras et ce trousseau de clés par terre. ROHUM me rassure, tout rentrera dans l’ordre dans quelques heures. Mais d’ici là, j’espère que personne ne me cherchera d’ennui. Dans le doute, je vole jusqu’au plafond et me colle dans un coin sombre. Prenant mon mal en patience, je réfléchis à l’utilité de ces clés quand mon regard se porte sur une silhouette monstrueusement dégueulasse sculptée dans un recoin de la salle. Et, juste en dessous, je reconnais la rune gravée : Hshl !

    Au bout de 4 heures, mes bras me reviennent et je peux enfin examiner ces clés. Elles ne sont pas normales. En fait, ce ne sont pas vraiment des clés. C’est… de la magie condensée. Chacune est un concentré d’énergie d’Égrégore que je dois pouvoir libérer et utiliser. Et la rune ? Je me méfie de cette sculpture et préfère m‘esquiver.
    J’arpente un couloir qui me mène rapidement à une grande salle évoquant des thermes antiques. Et je constate qu’ils fonctionnent toujours. Il y a de l’eau, de la vapeur. Il y a aussi du monde. À travers la vapeur, je distingue quelques silhouettes mais j’ai du mal à définir ce qui est en train de se passer. Je distingue deux « personnes » et une au moins s’exprime dans ce que je reconnais être la Langue Putride. Le ton est plutôt doux, même si, malgré cela, je perçois une vrai tension. Celui qui parle évoque une liaison. Il demande à l’autre d’atténuer sa douleur. L’autre lui répond dans la Langue Putride également. Il évoque des souvenirs. Il crache au visage du premier qu’étant un espion, il ne peut rien pour lui. L’autre entame alors une logorrhée mêlant sentiment de culpabilité et satisfaction malsaine à l’exhibition de ses souffrances. Caché dans la vapeur, je suis en train de me dire que je fous littéralement de ces histoires quand je percute. Ce sont là des histoires de cœur ! Y a-t-il un lien avec le cœur de cette fille ? Et si l’un des deux était le Horla que je cherche. Je m’approche discrètement… ou plutôt, j’essaye. Toujours dissimulé, je fais pourtant un faux mouvement et libère l’Égrégore contenu dans l’une des clés. L’Égrégore se combine alors aux dernières paroles prononcées : « Le champion rectifie le labyrinthe ! »
    Sous l’effet de l’Égrégore, la vapeur s’épaissit encore. Mais je distingue malgré tout de nombreuses silhouettes et des cliquetis ainsi que des bruissements d’ailes. Des Cafards ! Moitié insecte humanoïde, moitié machine biomécanique, cette nuée de créatures à taille humaine se répand dans les bains. Ils grouillent partout, envahissent l’espace. Ils se grimpent les uns sur les autres et tapent les têtes-Clarck Nova les uns des autres. Ces prophètes du Chaos annoncent la venue du champion et la fin du Labyrinthe. Je vois des rayons de lumière verte fluorescente. Ils ont lâché des « Araignées à accélérer le temps » ! C’est ainsi qu’ils vont en finir avec ce labyrinthe. Ils vont hâter le temps et le mener jusqu’au moment où il tombera en ruine. Paniqué, je regarde partout autour de moi et ne vois pas ce fameux champion. Peut-être ne s’agit-il pas d’un être dans le sens où je l’entends. Peut-être que le champion n’est rien d’autre que le bordel ambiant, la nuée de Cafards ou ces Araignées. En tout cas, je dois me mettre à l’abri car si les Cafards accélèrent le temps jusqu’à provoquer la ruine des lieux, ça veut dire qu’ils vont juste me tomber sur la gueule. L’avantage, si je survis, c’est qu’il sera sûrement plus facile de trouver là le cœur palpitant du void-dragon. Je m’envole, espérant qu’être le plus haut possible m’évitera de me prendre des coups. Et alors que le squelette du void-dragon s’écroule sur lui-même et ceux qui le peuplaient, je file par une fenêtre et arrive à me coller dans un recoin du palais-mille-pattes pour observer la chute du labyrinthe.
    J’attends un moment et constate avec étonnement mais satisfaction que cette catastrophe n’a finalement attiré l’attention de personne. J’attends encore un peu et voit des survivants émerger de ce qui reste du labyrinthe. Je ne distingue aucun Cafards mais vois des Araignées filer dans l’ombre en courant. Je ne vois personne mais, pourtant, j’entends des voix. Exactement les mêmes que celles que j’ai entendues dans les thermes. Malgré la chute du squelette et le temps qui passe, ces deux là ne sont pas morts ? Ou alors, si je les entends sans les voir, c’est peut-être parce que ce sont… des fantômes, des… Horlas ?
    Toutefois, et c’est plus gênant, aucune trace du cœur rouge palpitant du void-dragon !
    Je veux voir ces Horlas. Alors, je m’empare d’une des clés magiques et use de cet Égrégore pour les rendre visibles. L’un d’entre eux se révèle n’être rien d’autre qu’un… gigantesque tas de boue ! De là, se forment des visages grossièrement humains qui se parlent entre eux. Et je comprends qu’il n’y a jamais eu là qu’un seul Horla, un Liéju qu’on appelle aussi Labyrinthe. Ce serait lui que les Cafards sont venus détruire et non le void-dragon ?
    Je fixe successivement plusieurs visages et l’un d’entre eux révèle des scarifications. Est-ce à lui que je dois m’adresser ? Qu’a-t-il fait du cœur de la fille ? Sait-il quelque chose au sujet du cœur du void-dragon ? Pourquoi les Cafards ont tenté de le tuer ?

    Le Horla m’a repéré et tourne une de ses têtes de boue, celle qui parlait avec la tête scarifié, vers moi. Elle me demande d’approcher. Je connais ce genre de créatures. Ça ne pense qu’à se nourrir. Si cette chose s’est bien emparé du cœur de la fille, il est possible qu’elle soit sous son emprise et qu’il se soit servi d’elle pour rabattre des proies, comme moi. Confiant dans mes capacités de Mouchoïde, je m’approche prudemment en lui demandant ce qu’il me veut. Il ne répond pas mais me fait signe d’approcher encore. Il veut m’attraper, c’est certain ! J’arrête d’avancer et lui demande simplement de me raconter son histoire. Que fait-il ici ? Que fait cette citadelle mille-pattes dans la forêt de Millevaux ? Quel est le secret du cœur palpitant du void-dragon ? Il promet de tout me dire mais… je dois approcher encore. Si ce truc me touche, je risque de le payer très cher. Pourtant, j’approche, prêt à m’envoler au moindre geste brusque de sa part. alors, a-t-il quelque chose d’intéressant à me dire ?
    Le Horla commence par rire et m’explique qu’il a plusieurs relations amoureuses en même temps. J’en déduis que cette fille n’est pas la seule à qui il a volé son cœur. Mais ce n’est pas cela qui m’intéresse. Je veux savoir pourquoi Millevaux se retrouve à abriter tant d’éléments issus de la Mer du Chaos d’Azathoth. Le Labyrinthe soupire. La température baisse brutalement. Il avoue ne rien pouvoir me dire à ce sujet. Lui aussi, évidemment, a constaté l’arrivée, il y a longtemps maintenant, d’habitants de la Mer du Chaos mais il ne sait ni comment, ni pourquoi. Ce qu’il sait, c’est que la Chèvre Noire, la Forêt, les tolère. Aussi, il les tolère. Les Mille-Pattes ont construit ce palais autour du cadavre d’un void-dragon et il y a trouvé refuge. Le Labyrinthe s’est caché dans le labyrinthe. Il refuse de me dire pourquoi il doit se cacher mais je devine qu’il a perdu de sa puissance. On dirait qu’il est… blessé, affaibli en tout cas. Je peux peut-être en tirer avantage.
    Je me lance. Je lui fais part de ma théorie. J’ai bien compris qu’il s’était caché ici pour reprendre des forces. Ses « liaisons amoureuses » sont en réalité des pantins qu’il manipule afin de lui servir de rabatteur. Ainsi, cette fille ne m’a pas demandé de lui ramener son cœur, elle m’a envoyé dans un piège pour me faire bouffer. Toutefois, en tant que Mouche, je ne suis pas un met de choix (et j’espère qu’il me croira quand je lui dis ça). Je lui explique être ici suite à une vision d’un « autre-moi » tranchant un Voïvode. Je ne connaissais pas l’existence de cette forêt avant. Je suis donc venu pour connaître l’origine de cette vision. Et puisqu’on dirait bien que c’est cette vision, cette révélation, qui a fait de moi une Mouche, je veux aussi comprendre comment ça se fait que les domaines de Shub-Niggurath et Azathoth se retrouvent aussi intimement liés. Je sens le Horla quelque peu déboussolé. Je ne sais pas si c’est vraiment à moi qu’il s’adresse ou s’il parle tout seul mais il se rappelle que les Mille-Pattes craignaient le froid. Lui, bien sûr, ça ne le dérange pas. Je m’en remets à ROHUM pour avoir quelques précisions. Il apparaît comme fort probable que tous ces ressortissants de la Mer du Chaos se soient en réalité réfugiés à Millevaux. Mais pourquoi fuir la Mer du Chaos ? À cause du froid justement ? Un froid intense les aurait contraint à s’enfuir ? Et puis, est-il possible que certains aient choisi une autre destination que Millevaux ?
    Je m’envole et m’éloigne du Horla. Je réfléchis. On dirait qu’une intense vague de froid a chassé les habitants de la Mer du Chaos. Certains se sont réfugiés à Millevaux mais il est très possible que d’autres aient choisi d’autres destinations. Il est également plus que probable que ces réfugiés foutent la merde à peu près partout où ils arrivent. Mais il est également plus que probable que la plupart, sinon tous, ne souhaitent que rentrer chez eux. Alors… comment rendre la Mer du Chaos de nouveau habitable ?
    Corso la Mouche s’efface et laisse un peu plus de place au Joueur. Il existe diverses divinités du froid, notamment Ithaqua ou encore Rlim Shaikorth. L’un d’eux ou encore une autre serait-elle à l’origine de la vague de froid ayant envahi la Mer du Chaos et contraint ses habitants à l’exil ? Et est-ce que le cœur palpitant du void-dragon a quelque rôle à jouer là-dedans ? Dis-moi, ROHUM ! ROHUM me dit que non mais… ce serait quand même bien de mettre la main dessus !
    Je laisse le Horla dans les ruines du squelette du void-dragon et poursuis ma quête du cœur palpitant. Ensuite, il faudra que je trouve un moyen de mettre fin à cette vague de froid qui s’est répandue sur la Mer du Chaos. Ainsi, si le royaume d’Azathoth est de nouveau vivable, on peut espérer que ses habitants y retourneront spontanément…

    Je laisse là le Liéju, me disant que c’est peut-être une connerie et que je devrais profiter de sa faiblesse pour l’abattre. Mais bon, force m’est de reconnaître que je ne suis pas vraiment un guerrier. Je n’ai rien d’un Sumérien, ni même d’un Mille-Pattes. Alors je me fonds dans l’ombre et repars en quête du Cœur Palpitant.
    Je déboule dans une salle aux dimensions nettement plus réduites que celle abritant le Labyrinthe. Pourtant, il s’en dégage quelque chose de… mythique ! Au sol, une mosaïque de pierres précieuses dessine un astrolabe au centre duquel se trouve un puits. Les murs, eux, semblent fait de roches nues. Par contre, pas de bol, il y a du monde. Un tel endroit aurait pu être le théâtre d’une quelconque cérémonie mais on dirait bien que ce qui se passe ici n’a rien de spirituel. Au contraire même. Trois personnes, deux Millevaliens pure souche et une Mouche s’en prennent au puits central.
    Et ils ont bon espoir d’y parvenir puisque l’un des Millevaliens est manifestement un Horla, une sorte de gargouille. L’autre est un humain corrompu par l’Égrégore, ou le Pétrol’magie. Pour ce que j’en vois, son corps semble parcouru de cicatrices et autres boursouflures verdâtres et palpitantes. Je me colle au plafond et scrute la Mouche à la recherche de la rune Hshl sur sa nuque. Je veux savoir s’il s’agit d’un agent de Black Rain. Évidemment, je ne parviens pas à trouver un bon point de vue. En plus, il se met soudain à tomber une pluie acide ! À l’intérieur ?
    Non ! Nous ne sommes plus à l’intérieur. Je ne sais sous quel effet, le toit s’est ouvert. Et non seulement il pleut de l’acide, mais en plus nous pouvons voir dans le ciel une titanesque cité de métal dont je ne me rappelle pas qu’elle était là à mon arrivée. Est-ce une citadelle Voyvode ? J’espère que non. Mais je me poserai la question plus tard car, effet de la pluie ou de la citadelle, je tombe du plafond, sujet à une terrible crise de vomissement. Au moins, je ne suis pas une cible facile pour les autres puisqu’ils se mettent eux aussi à vomir. Je tente de ramper jusqu’au puits. En vain. Je ne peux plus que me tordre de douleur sur place.
    À travers le voile des larmes que la douleur m’arrache, je vois, venant de la citadelle volante, déferler une horde de Cyborgs bardés de technologie Voyvode. Certains n’ont plus grand-chose d’humain, hérissés qu’ils sont de lanceurs de vinyles de void-métal ou autre tuyau d’éjection de viande d’homme-porc. Celui qui semble être le chef agite une énorme pince métallique projetant de la lumière noire. Je sens que je suis en train de sombrer dans l’inconscience et c’est pas bon du tout. Il m’en coûte mais j’arrive à puiser dans mes dernières réserves pour ramper jusqu’au puits. Mais le mutant aux boursouflures verdâtres tentent de se saisir de ma cheville au passage. Je me dégage mais ça fait mal.
    Arrivé au bord du puits, je vois au fond de l’eau tourbillonner. Ça sent la magie. Une magie mortelle. Ce n’est pas de l’eau qu’il y a au fond. Est-ce de l’Égrégore ou du Pétrol’Magie ? Et puis, y a-t-il vraiment une différence entre ces deux substances. Ce n’est même pas sûr. Mais j’ai soudain l’horrible sentiment de ne plus m’appartenir, de n’être qu’une marionnette. Je serai moins inquiet si j’avais la certitude que c’est le Joueur qui tire les ficelles mais je sais que ce n’est pas le cas. C’est le Joueur qui tape ces mots mais ce n’est pas lui qui a décidé cette pulsion, ce vertige qui me pousse à me jeter dans ce puits. Est-ce que cela mène quelque part ou vais-je seulement me noyer ? Et si ça mène quelque part, où ? Serai-je toujours dans le palais-mille-pattes ? Serai-je toujours à Millevaux ? Et qui est ce sorcier qui s’est substitué au Joueur pour me pousser à me laisser glisser au fond du puits ?

    Où suis-je ? Des marais. Je ne suis plus dans le palais-mille-pattes. Quand je lève les yeux, je vois le ciel étoilé. Il fait nuit et j’ai les pieds dans la boue. Autour de moi, aucune trace du palais, ni du puits qui m’a recraché ici. Sur ma gauche, une petite construction en ruine. Les vestiges d’une tour. Quand je m’approche, je vois que des squelettes émergent des marais. Il y a eu une bataille ici et on a pas pris la peine de rendre plus d’hommages que ça aux défunts. S’agit-il des cadavres de ceux qui ont tenté de prendre cette bâtisse ou de ceux qui ont voulu la défendre ?
    Les ruines n’ont plus de porte. Mais elles n’en n’ont pas besoin car des pans de murs se sont écroulés et remplacent ce qui, à l’époque, a fait office de porte. Pas de problèmes, je vole par-dessus. Et derrière, un gouffre ! Le plancher ne s’est pas seulement écroulé, il s’est enfoncé sur plusieurs dizaines de mètres. Plusieurs centaines peut-être. Je ne vois pas le fond. De l’autre côté, toutefois, des pierres tombales émergent de la boue du marais. Cette même boue se déverse lentement dans le gouffre mais je n’entends aucun bruit me laissant penser qu’elle touche le fond. Une tombe attire néanmoins mon attention et je vole jusqu’à elle. Plusieurs mains squelettiques sont sculptées dessus, comme si elles devaient courir le long de la pierre. Mais, une de ses mains tient un livre. Un vrai livre. Je dois pouvoir le prendre. Les doigts squelettiques masquent en partie le titre mais je parviens à lire le mot « Manifeste ». Je tente de dégager l’ouvrage mais ça résiste. Impossible de bouger ce truc. Merde ! J’ai fendu un Voyvode en deux ! C’est pas un caillou qui va me résister !
    J’utilise une des clés magiques, non pour son effet mais pour faire une sorte de levier. Il y a un peu de jeu entre les doigts du squelette mais… la clé se brise et libère son Égrégore. Et, une fois encore, mes bras tombent. Et pas seulement mes bras. Tout autour de moi, tout ce qui vit ou a vécu perd ses membres. Les arbres perdent leurs branches. Les animaux perdent une ou plusieurs pattes et se mettent à hurler alors qu’ils s’effondrent dans la boue. Puis, l’inanimé lui-même devient la proie de cette vague d’amputation. Les pierres se brisent. Le ciel aussi. Les étoiles se fracturent. C’est… la fin du monde ?
    Mes yeux se posent de nouveau, plein d’effroi, sur la tombe et je lis. Il s’agit de la tombe d’un sorcier connu sous le nom de Iben-Ohrer. Et on dirait qu’il est l’auteur du Manifeste. Mais, je dois avant tout me calmer. Je tente de me convaincre que tout ceci n’est qu’une hallucination, que mon bec est défectueux et que je suis victime d’une remontée de Pétrol’magie d’autant plus violente que la clé brisée vient de décharger une bonne dose d'égrégore.
    Ainsi, je me ressaisis et tout redevient normal. Je regarde les deux clés qui me restent et décide d’en briser une afin de libérer ce tome étrange. Je veux en savoir plus sur ce sorcier, cet endroit et ce que je fous là ! Sous l’action de l’Égrégore, les doigts s’ouvrent et je m’empare du livre dont le titre complet est « Le Manifeste de Thuggon ». Qu’est-ce que c’est que ça ? Soudain, je me demande si ce sorcier, même mort, pourrait être celui qui s’est substitué au Joueur pour me faire tomber au fond du puits. Je parcours rapidement les premières pages du livre et comprends que Thuggon est une planète. Et cette planète est le domaine d’un Grand Ancien nommé « Y’mo-Thog ». Est-ce une divinité du froid ? Y’mo-Thog est-il responsable de la glaciation qui s’est abattue sur la Mer du Chaos ?
    Après avoir volé jusque dans les ruines du petit donjon, je m’installe afin d’en lire plus. Iben-Ohrer semble avoir voyagé jusqu’à cette planète. Malgré ses craintes, il n’a pu résister à l’appel de la divinité. L’Ancien est décrit comme une sorte de colosse à la peau bleutée. Il ne semble pas posséder de tête, ou seulement une ébauche ou un vestige. Deux yeux posés sur une boursouflure de chair entre ses épaules. De là, part un tentacule se terminant par une bouche aux crocs acérés. Le sorcier a trouvé un moyen de se rendre physiquement sur Thuggon. Il décrit une planète gelée, morte. Tellement morte que rien n’y vit, excepté Y’mo-Thog. Iben-Ohrer raconte avoir traversé une jungle pétrifiée dans la glace. Puis, au milieu de la forêt de glace, il a vu une statue de l’Ancien. La pierre s’était fendue sous l’effet du froid et révélait un passage. Mais, à sa grande surprise, le passage bien que descendant, ne conduisait pas sous terre. Iben-Ohrer s’est ainsi retrouvé dans un petit temple aménagé au fond d’un cratère, peut-être un ancien volcan. Là, il eut une vision. Il allait perdre ses mains, les offrir à Y’mo-Thog. Je saute quelques chapitres. Je veux savoir si ce que raconte le sorcier est en lien avec ce qui s’est passé dans la Mer du Chaos. Et puis, je veux aussi les coordonnées de cette planète !

    Oui ! Oui et oui ! La vague de froid qui a ravagé la Mer du Chaos et conduit celui que j’ai vu en rêve à Millevaux vient bien de Thuggon ! Et le sorcier a même noté les coordonnées de ce monde. Ce n’est pas par hasard que, même mort, Iben-Ohrer a fait en sorte que je lise son Manifeste. Il veut que je me rende sur cette planète. Mais pourquoi ? Y a-t-il quelque chose à ce sujet à la fin du livre ? Oui, le sorcier achève son Manifeste en émettant le désir de retourner sur Thuggon mais il n’explique pas pourquoi. Voulait-il rendre un ultime hommage à Y’mo-Thog ? Voulait-il au contraire se venger de l’Ancien qui lui a volé ses mains ? Regrettait-il d’avoir participé au déclenchement de cette terrible glaciation ou, au contraire, souhaitait-il aller encore plus loin ? Quoi qu’il en soit, il a fait en sorte de me désigner pour lui succéder dans la tâche qu’il s’était imposé de remplir. J’irai donc sur Thuggon. Mais j’y ferai bien ce que je veux !

    Le voyage se déroule sans encombre et je débarque sur cette terre gelée. Autour de moi s’élèvent les ruines d’une antique cité figée dans la glace. Iben-Ohrer parlait d’une forêt, tant pis. Mais, si cette planète est bien le domaine d’Y’mo-Thog, il doit bien y avoir ici un lieu qui lui est dédié.
    J’erre dans cet espace désert jusqu’à ce qui a peut-être été une sorte de parc. Sous la glace, je vois des rosiers. Est-ce que la vie rependrait son cours si la glace s’en allait ? Mes pas me mènent jusqu’à une statue. Elle est brisée. Je n’en vois que le piédestal et les jambes de celui ou celle qu’elle représentait. S’agissait-il de l’Ancien ? Nulle inscription sur le piédestal mais des petites gravures rappelant celle que j’ai vu dans le palais-mille-pattes, accompagnant la rune Hshl. Et maintenant, je me rappelle que cette gravure représentait bien Y’mo-Thog.
    Iben-Ohrer raconte dans son manifeste que le passage vers le temple de l’Ancien se trouvait dans une statue brisée par le froid. Est-ce le cas ici aussi ? Non, mais les gravures sur un des côtés du piédestal semblent être une sorte de carte de la planète et de son ciel mettant un endroit précis en évidence. Ça me prend un long moment et je dois lutter contre le froid mais je finis par réussir à me localiser, ainsi que ce fameux temple, sur ce semblant de carte. Apparemment, ce n’est pas très loin mais, avec ce froid, qui peut savoir combien de temps ça va me prendre ? Je peux essayer de gagner du temps en volant. Heureusement, le froid ne cause aucun dommage à mes ailes.
    Cherchant des repères dans le ciel et au sol avec ce que j’ai pu « lire » sur cette « carte », je finis par sortir de cette cité et par atterrir à proximité d’une tombe. Au vue des symboles gravés dessus, elle est consacrée à Y’mo-Thog. Si je me fies au Manifeste du sorcier, ce sont des monuments brisés qui conduisent au temple de l’Ancien. Mais cette tombe est en bon état. Alors, dois-je la briser ? Est-ce que ce sera suffisant ou la « porte » doit-elle forcément être ouverte par une cassure due au froid ? Le « moi » de ma vision a dégommé un Voyvode, je devrais donc pouvoir venir à bout d’un bout de caillou gelé. Un bon coup d’épaule suffit à faire basculer la pierre tombale qui se brise, fragilisée par le gel. Toutefois, je tombe à genoux sous l’effet d’une nouvelle vision. La forêt, l’autre moi, de nouveau…
    Cela fait maintenant trois jours que nous marchons en direction de ce château qui est apparu au loin et… alors que l’air résonne de guitares saturées et autres sonorités électroniques, il est toujours aussi loin ! Nous marchons et nous marchons et ne nous rapprochons jamais de ce château. Pourtant, je suis quasiment certain que ses murs renferment l’usine de poupées sumériennes. Je veux démolir ce château. Mais comment l’atteindre ? Nous verrons ça plus tard. La nuit tombe. Nous approchons d’une zone marécageuse et le vent est dense en Égrégore. Il y a de la magie dans l’air et elle est pourrie. Et elle vient de ce maudit château !
    Qu’est-ce que ça veut dire ? Est-ce que cela signifie que le temple d’Y’mo-Thog m’est à jamais inaccessible ? Non ! Impossible ! Je ne peux me résoudre à ça. Je fouille les restes de la pierre tombale. Il doit bien y avoir un passage quelque part au milieu de ces cailloux ! Mais il n’y a rien ! Rien à part cette Araignée à accélérer le temps, produit de la technologie Cafaroïde. Elle ne fonctionne plus, sans doute à cause du froid mais je dois pouvoir la remettre en état. J’utilise l’Égrégore contenu dans la dernière de mes clés magiques pour « réchauffer » l’Araignée. J’espère que ça va suffire et que ça ne va pas me péter à la gueule.
    Le temps file à la vitesse d’une araignée à la toile verte et gluante. La glace fond et laisse place, de nouveau, à de la végétation. Et mon voyage dans le temps prend fin, me laissant dans une clairière, juste à côté d’une petite cabane. Là, un type à la carrure gigantesque vaque à ses occupations. Manifestement, il ne s’attendait pas à me voir mais parait pourtant heureux de ma venue.
    Mon apparence de Mouchoïde ne l’effraie pas. Il m’invite même à entrer et me propose à boire et à manger. J’accepte volontiers et, quand il m’y invite, lui raconte mon histoire. Cette planète n’est manifestement plus sous le joug d’Y’mo-Thog. D’ailleurs, ce type, Colborn Heartcreek, n’en a jamais entendu parler. Il n’a même jamais entendu parler d’une période de glaciation. Était-ce il y a si longtemps ? Y a-t-il quelque part des gens ou des sources que je pourrais consulter au sujet de l’histoire de cette planète ? Colborn me conseille de me rendre à la cité la plus proche. Là, les prêtres d’Azathoth pourront me renseigner.
    Les prêtres d’Azathoth ? Qu’est donc devenue cette planète ?

    Cette cité est… étrange. J’y sens bien l’influence d’Azathoth mais pas d’une manière aussi prégnante et chaotique que dans la Mer du Chaos. Il y a quelque chose de médiéval dans l’architecture mais rien qui rappelle les coins les plus glauques de l’Interzone par exemple. En fait, cette cité porte l’empreinte de la forêt qui l’entoure. Et, écoutant les conversations autour de moi, j’entends plusieurs fois le nom de Millevaux, énoncé non sans une certaine crainte dans la voix.
    Errant dans les rues, j’en déduis qu’Y’mo-Thog a été chassé et remplacé par une sorte d’alliance de circonstance entre Azathoth et Shub-Niggurath. Le premier étendra son influence sur les villes, le second sur… le reste ? En vérité, je n’en sais rien.
    Sur un des murs d’une toute petite place, un groupe d’hommes et de femmes (et d’autres choses aussi) se pressent autour d’affiches. Ce sont des avis de recherches. Les rumeurs vont bon train concernant un barde, un conteur, accusé de contrefaçon. L’affichette explique que le criminel voyage de cité en cité et qu’il a été vu ici récemment. Les prêtres d’Azathoth offrent une prime de 250 pièces d’or pour sa capture.
    Je pourrais demander un audience aux prêtres d’Azathoth pour savoir ce qui s’est réellement passé sur cette planète, mais j’obtiendrai plus facilement gain de cause, et 250 pièces d’or, si je n’arrive pas les mains vides. De plus, ce barde faussaire étant aussi un voyageur, il aura certainement des choses à me dire sur la forêt de Millevaux.
    Grâce à ROHUM, je peux avoir une longueur d’avance sur les autres chasseurs de primes. Ainsi, ma nouvelle cible semble s’être réfugiée dans les égouts. Le nommé Erlan Sarfiel est visiblement un humain, même pas un clone. Par contre, il semble doué pour le maniement de la lame. Méfiance donc tout de même.
    Dans les égouts, je sens un peu plus l’influence d’Azathoth. Ou plutôt, on dirait que les eaux usées charrient aussi du Pétrol’Magie. Si la forêt qui entoure toutes ces cités et bien Millevaux, elle doit regorger d’Égrégore. Entre ces deux sources de magie, les sorciers doivent s’en donner à cœur joie.
    Azathoth soit loué ! À peine ai-je mis un pied dans les égouts qu’un zazamon apparaît, manifestement à mon service. Ainsi, ce Gazzolon est une sorte de plante carnivore dont on ne distingue pas bien l’avant de l’arrière mais qui hurle, qui hurle ! Je le flatte en tapotant ce que j’espère être sa tête et commençons notre périple souterrain.
    Rapidement, quelque chose ne va pas. Un brouillard épais envahit les égouts et je n’y vois rien du tout. Puis, alors que je sors de ce nuage, il s’avère que nous ne sommes plus dans les égouts mais dans les bois. Et, au loin, un château. Et je reconnais ce château. C’est celui de ma vision, celui que mon « autre moi » n’a jamais réussi à atteindre. Est-ce que moi aussi je vais devoir marcher pendant des jours sans jamais parvenir jusqu’à cette forteresse ? Ces murs abritent-ils vraiment une usine de poupées sumériennes ? Est-ce vraiment une bonne idée de vouloir en savoir plus ?
    Je me fige. Inutile de continuer à avancer si ça ne sert à rien. Mais je me pose quand même des questions. Cette apparition ne peut pas être une simple coïncidence, un simple fruit du hasard (et pourtant…). De deux choses l’une :
1-cette hallucination est le fruit de l’Égrégore ambiant, si je suis bien dans la forêt, ou du Pétrol’Magie si je suis toujours dans les égouts. Dans ce cas, ce château est une projection de mon inconscient ou quelque chose comme ça.
2-cette hallucination est le fruit d’un sort ou d’un rituel. Dans ce cas, qui est derrière ça ? Quelqu’un qui me connaît, qui m’en veut ? Quelqu’un qui a accès à certaines de mes pensées puisqu’il peut reproduire cette vision du château. Et puis, pourquoi ? Un serviteur d’Y’mo-Thog ? Iben-Ohrer ? Est-ce que ça a vraiment du sens ?
3-et si ce barde était aussi un mage et que, ayant vu que j’étais à ses trousses, il m’aurait envoûté ? Après tout, c’est possible.
    Mais, avant toute chose, je dois déjà m’assurer d’où je suis. Toujours dans les égouts ou dans les bois. Et puis, en vue de ce château, suis-je toujours sur la planète Thuggon ou est-ce que ce brouillard m’a renvoyé dans le Millevaux de mon « autre moi » ?
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Pikathulhu
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Re: [CR] Millevaux et autres jeux Outsider

Message par Pikathulhu »

    Ce château au loin ne m’apparaît pas du tout comme un bon présage. Aussi, je décide tout simplement de m’en détourner ! Que ce qu’a vécu mon « autre moi » me serve de leçon. Et puis, si ce château abrite vraiment une sorte d’usine à Sumériens, pas la peine que je me jette dans leurs pattes. Pour autant, est-ce que rebrousser chemin va me faire sortir de cette… illusion ?
    Et oui ! Je fais demi-tour pour me retrouver dans les égouts. Et quand je me retourne, le brouillard a disparu. Mais, quand j’y retourne, le brouillard revient. Et quand je m’y enfonce à nouveau, je ressors en vue de ce château. Mais, quelque chose a changé. Le château est en partie en ruine et recouvert de gel. Gelé, est-il toujours inaccessible ? On dirait bien que non. J’approche et… il ne recule pas ! Vais-je réussir là où mon autre moi a échoué ? Peut-être bien.
    J’avance et suis à l’affût du moindre bruit, du moindre mouvement. Mais tout à l’air désert. La porte est figée par la glace et il est impossible de la faire tourner sur ses gonds. Pour autant, le gel l’a fragilisée et un bon coup bien placé devrait suffire. Pourtant, la glace résiste plus que je ne l’avais imaginé. Non, ça va plus loin que ça. J’entends dans mon crâne résonner le rire d’Ymo-Thog. L’Ancien exerce toujours une certaine influence sur cette planète et je suis… maudit ! Et bien, si j’en suis là, autant aller jusqu’au bout. Par contre, je cherche un autre accès et m’infiltre à l’intérieur via une brèche dans un mur.
    À l’intérieur, l’agencement de cette petite pièce ressemble à celle d’un bateau. Il n’y a rien en état sauf une petite statuette en forme de corbeau. A priori, elle n’a rien de particulier. Pourtant, elle semble avoir été mise en évidence. Un peu comme si cette pièce lui été dédiée. Aussi, je cherche dans tout ce qui traîne quelque chose pouvant m’en dire un peu plus. Mais, alors même que je farfouille dans les décombres, un éclair frappe mon zazamon qui est instantanément réduit en cendres !
    Soyons lucides, on m’en veut ! J’ai vraiment l’impression d’être seul en ces murs. Pourtant, à chacun de mes pas ou presque il arrive une catastrophe. C’est comme si on m’observait et me mettait des bâtons dans les roues dès que possible. S’agit-il de ce barde faussaire ? S’agit-il plutôt de serviteur d’Y’mo-Thog qui n’auraient pas apprécié qu’on mette un terme au règne de glace de leur divinité sur Thuggon ? Je vole jusqu’à un coin de plafond et me colle dans l’ombre, le temps de poser quelques questions à ROHUM.
    Oui, on me surveille mais il ne s’agit pas de celui ou ceux que je soupçonne. Mais, s’il ne s’agit ni du barde, ni de serviteurs d’Y’mo-Thog, s’agirait-il des Sumériens ? Oui ! Les Sumériens sont sur Thuggon. Et ils comptent bien poursuivre ici leur guerre contre Azathoth et son royaume. Ce château-usine n’est plus en état mais il sert de « portail » aux Sumériens entre la forêt de Millevaux de mon « autre-moi » et Thuggon.
    En vérité, tout ça commence à me dépasser et je ne sais plus si c’est une si bonne idée que ça de courir après ce barde. Avec la menace des Sumériens qui planent, peut-être que je devrais juste courir au premier temple d’Azathoth pour prévenir les prêtres de ce qui est en train de se tramer. Mais me croiront-ils sans preuve ? Je ne sais pas si cette statuette est typique de l’art sumérien mais, au cas où, je la prends. Si c’est le cas, elle sera la preuve d’une présence sumérienne sur Thuggon. Et sinon… je verrais bien !
    Évidemment, le retour ne pouvait s’effectuer sans embrouille ! Sorti des égouts, je constate que la ville est en proie à la panique. En effet, les rues sont envahies par un épais brouillard et, haut dans le ciel, se dessine la silhouette d’un dragon. Et déjà, les citadins craignent qu’il ne s’agisse de Candiolanth, le légendaire dragon rouge destructeur de cité. À mon avis, il s’agit d’une illusion du même genre que celle dont j’ai été la cible dans les égouts. Mais bon, les prêtres d’Azathoth, je l’espère, en sauront plus.
    Arrivé au temple construit en os de void-dragon, enfin, je demande audience de toute urgence. Pour appuyer ma demande, je brandis la statuette, preuve à mes yeux de la menace sumérienne. On va me recevoir, oui, mais pas tout de suite. Les prêtres sont occupés. Mais à quoi bordel ? Et je n’ai pas fini de poser ma question qu’une vague de Pétrol’magie déferle dans tout le temple et se répand dans les rues, infligeant d’horribles mutations à toute personne présente dans les parages. Heureusement, ma nature de Mouchoïde me préserve. Une fois la vague dissipée, j’accède enfin à un concile de prêtres auxquels, fort de ma statuette, je raconte toutes mes aventures et les préviens de la menace sumérienne. Manifestement, ils se fichent royalement de ce que je raconte. Je tente malgré tout de les convaincre et, va savoir pourquoi mais je sens là l‘influence du Joueur qui, s’il ne tire pas sur les cordelettes de la marionnette que je suis tape néanmoins les mots qui sont les miens sur son PC, fracasse la statuette au sol. Elle se brise dans un sorte de vent d’illusion et révèle un crâne aux canines plus longues que nécessaires. Un crâne de vampire ! L’un des prêtres s’en saisit et entame le descriptif d’un artefact à la magie plus ou moins puissante.
    Alors, face à toutes ces illusions, face à toute cette magie, prennent-ils enfin la menace sumérienne au sérieux ? Pas du tout ! Selon eux, les Sumériens n’ont rien à voir là-dedans. Il n’y a aucune présence sumérienne sur Thuggon. Il n’y a aucune crainte à avoir non plus de la part d’éventuels serviteurs d’Y’mo-Thog car ils ont tous été tué il y a maintenant très longtemps. Toutefois, ils consentent à reconnaître l’existence d’une menace qu’ils mettent sur le compte d’un mage, d’un sorcier ou n’importe quoi du même genre.
    L’espace d’un instant, j’ai peur qu’ils me demandent de mettre fin à cette menace mais pas du tout. En réalité, ils ont d’autres projets pour la misérable Mouche à Merde que je suis. Une légende locale parle du gardien secret d’un objet sacré se livrant à divers trafic. Ses trafics ne les intéressent guère mais ils veulent cet objet sacré ! Il s’agirait des restes brisés d’un masque recouvert de fines écritures, autant de sortilèges anciens et oubliés sur lesquels ils aimeraient bien mettre la main.
    A toute fin utile, il semblerait que le gardien de cet artefact se soit spécialisé dans le trafic d’être humain. Il s’appelle Kohgn mais, dans le milieu, on l’appelle le Hiérarque !

    Le Hiérarque ! Quel nom ! Si ça c’est pas se la raconter… Bref, je dois lui mettre la main dessus. Dans les rues, tout le monde est hébété, sous l’emprise de cette vision d’un dragon émergeant du brouillard. Mais j’ai peut-être là une carte à jouer. Je peux en effet profiter de cet état de stupeur ambiant pour poser mes questions tout simplement. J’espère que, sous l’emprise de la peur, les gens seront moins vigilants, moins méfiants et répondront à ma questions concernant le Hiérarque.
    Dans la foule, mon attention se porte sur un homme aux traits bouffis. Il a le teint jaunâtre et sa peau grasse brille, lui donnant un air visqueux. Il a malgré cela un air hautain mais aussi… mystérieux. Aussi, je l’aborde le plus tranquillement du monde alors que la foule rassemblée là à les yeux levés vers l’ombre du dragon.
    Je commence par lui dire que, selon moi, il n’y a aucun véritable dragon derrière tout ça. A mon avis, et je ne suis pas loin de le penser réellement, tout cela n’est qu’une illusion due à une concentration excessive d’Égrégore ou de Pétrol’Magie. D’ailleurs, n’est-ce pas là une occasion inespérée pour des trafiquants de faire main basse sur une grosse quantité d’hallucinogène qu’ils pourraient revendre plus tard. Et puis, cette hallucination collective persistante peut aussi se révéler une formidable publicité pour un tel produit, non ? Mais l’homme n’adhère pas du tout à mon discours. Au contraire même. D‘après lui, je ne devrais pas plaisanter avec ça car cela ne fera qu’accroître la colère du dragon rouge. Je fais un pas en arrière en reconnaissant que des trafiquants auraient effectivement plus à gagner à rester discret. Mais, à son avis, pourquoi Candiolanth agit ainsi, lui ? L’homme n’est sûr de rien mais il pense que le dragon n’est peut-être pas au mieux de sa forme. Ce serait ça, finalement, qui l’aurait poussé à sortir de sa retraite. Il a besoin de reprendre des forces. Il ferait donc monter la pression avec ce brouillard, attendant le moment propice pour fondre sur la ville et s’emparer de ce dont il a besoin. J’acquiesce et lui demande s’il ne craint que d’autres profitent de la situation. Il ne pense pas mais me demande malgré tout à quoi je fais allusion. Aussi, j’enchaîne avec le Hiérarque. Je sais, par les prêtres d’Azathoth, qu’il se livre au trafic d’êtres humains. Aussi, j’émets l‘hypothèse qu’un tel personnage pourrait profiter de la panique générale pour procéder à des enlèvements par exemple.
    Mon homme connaît le Hiérarque. Et il le connaît bien visiblement. Heureusement pour moi, il semble même le détester cordialement. Non, il n’a pas été lui-même victime de ses agissements mais il trouve ces procédés répugnants. Ainsi, j’apprends que le Hiérarque se livre au trafic d’êtres humains pour en faire des esclaves sexuels. Selon lui, c’est tout simplement révoltant car on ne devrait pas avoir à passer par ce genre d’intermédiaire pour accéder à des tels esclaves. Dans une utopie telle qu’il la conçoit, nous devrions tous être les esclaves sexuels les uns des autres sans que quiconque doive payer un trafiquant. J’opine vigoureusement du chef et affirme avec autant de conviction que possible que ce Hiérarque mérite mille sanctions. Et, innocemment, je lui demande si, selon lui, l’agitation ambiante n’est pas une bonne opportunité pour, justement, faire payer à ce Hiérarque l’infâme prix de son commerce. Mais l’homme me rembarre aussitôt. Il n’a nulle envie de s’en mêler ni d’y être mêlé et il met fin à la conversation en s’enfonçant dans la foule qui ne cesse de fixer l’ombre de Candiolanth.
    Au moins, j’en sais un peu plus sur le Hiérarque et j’ai une petite idée de là où le trouver et je file vers ce qui fait office d’Interzone dans cette cité. J’erre dans ce dédale obscur à la recherche de quelques Mantoïds, Cafaroïdes ou autres Pétrol’heads les plus louches possibles. Je jette finalement mon dévolu sur un Cyborg à l’implant génital démesuré, pour ne pas dire cauchemardesque. Nul doute qu’il ne peut qu’avoir recours aux services de professionnel(le)s plus ou moins consentant(e)s. Je le trouve là s’adonnant à une activité témoignant de sa frustration. Présentement, il agite son implant, éjectant ce qui semble être des saucisses de viande d’Homme-porcs. Je m’approche en prenant bien soin de rester dans l’ombre et invoque ROHUM afin de savoir si cette boîte de conserve connaît mon Hiérarque. C’est le cas, mais alors même que je m’apprêtais à m’en aller, le cyborg m’interpelle. Bien que s’astiquant en pleine rue, il ne semble pas apprécier qu’on l’observe et me demande des comptes. Clairement, il veut se battre. Je peux comprendre, c’est effectivement un autre moyen de se débarrasser de ses frustrations.
    Mes yeux de Mouchoïde me permettent de le voir venir et éviter ainsi sa première attaque. Je vole dans un coin d’ombre, me collant en hauteur, espérant être ainsi plus dur à atteindre. Autant pour moi, je me prends une saucisse en pleine tête. C’est d’autant plus humiliant quand on sait d’où elle a été tirée. Mais j’ai quand même de la chance dans mon malheur car, à la lumière qui émane et s’affaiblit aussitôt autour du cyborg, je comprends que le générateur alimentant une partie de son blindage vient de tomber en rade. C’est maintenant à moi de jouer.
    Mon « autre moi » a dézingué un Voyvode, je devrais donc pouvoir venir à bout d’un Cyborg en manque de compagnie. ROHUM ou Azathoth, je ne sais pas qui je dois remercier mais sous l’impact du formidable coup de boule en piqué que je viens de lui asséner, le Cyborg tombe à genoux ! Mais déjà il se relève et empoigne son projecteur de saucisses qu’il pointe dans ma direction. Il vise bien le saligaud ! Mais je l’aurai ! Je vole dans son dos pour le frapper sur le sommet de la tête. J’espère l’assommer, au moins. Et c’est même mieux que ça ! Le Cyborg s’écroule. Certains de ses implants devaient vraiment être de mauvaise qualité car il tombe littéralement en pièces à mes pieds.
    Je n’en tirerai pas plus de lui, et pour cause, mais au moins, je sais où trouver le Hiérarque maintenant. De plus, It’s time for loot ! Je récupère son implant lanceur de saucisses ainsi que sa batterie. Je ne sais pas trop à quoi ça peut me servir. Je sais encore moins si j’oserais me les faire poser par un charcudoc local. Au pire, je les revendrai. Mais pour l’heure, je file vers ce quartier où je devrais trouver le Hiérarque et qui porte le doux nom d’Oubliettes Spectrales.

    Les Oubliettes Spectrales ont bien mal choisi leur nom. Ce coin de la cité n’a rien d’une oubliette, ni rien de spectral. En vérité, il s’agit d’une sorte de baie s’ouvrant su une mer verte, un vaste pâturage sur lequel voguent quelques barcasses. Une sorte de petite mer intérieure verte, donc et un semblant de port de plaisance. Toutefois, et malgré ces apparences idylliques, qui dit port dit tavernes, auberges et filles de joie. Aussi, il doit bien y avoir là quelques traces du commerce du Hiérarque. Pourtant, aucune fille (ou autre) en vue. Je cherche une taverne mais on dirait qu’il n’y en a pas. Ce n’est vraiment qu’une sorte de port de plaisance pour ceux des notables qui voudraient s’offrir une petite virée sur ce lac vert. Je n’arrive pas à concevoir qu’un tel endroit existe ici. Néanmoins, s’il n’y a pas de taverne, il y a malgré tout une sorte de « country club ».
    Je pensais devoir montrer patte blanche et une carte de membre mais on me laisse rentrer sans aucun problème. L’intérieur est confortable, très confortable. Une sorte de luxe discret qui a le bon goût de ne pas en faire trop. A cette heure de la journée, les lieux sont déserts. Je m’approche du bar et commande un cocktail au hasard parmi les noms étranges présents sur la carte. On me sert donc une Médecine Soudaine à l’odeur infecte… et au goût infect également. Je profite de ce que le serveur regarde ailleurs pour vider mon verre dans une plante verte. Les feuilles se fendent alors chacune en une bouche qui, se tournant vers moi, murmurent que je vais bientôt mourir. Je sens comme une pointe au cœur. Je rappelle le serveur et commande, cette fois, une Idée Diurne. Alors, il me regarde bizarrement, hésitant à me servir. ROHUM m’indique que ce cocktail est en réalité plus qu’une boisson, c’est un mot de passe. Je souris et enchaîne, expliquant désirer m’entretenir avec le Hiérarque. Le serveur semble inquiet et je le rassure. Je ne suis qu’un humble client, certainement pas un représentant des forces de l’ordre ou du désordre. Malgré l’heure un peu inhabituelle pour ce genre de prestation, le serveur déclare pouvoir me conduire au Hiérarque.
    Le serveur me fait passer derrière le bar. Là, nous empruntons une petite porte donnant sur les « coulisses » de l’établissement. Fini le confort, les quartiers réservés au personnel tiennent plutôt de la caserne. Les couloirs sont déserts mais je sens, partout, la présence de ceux qui occupent les lieux aux heures de plus hautes fréquentations. Finalement, ce n’est pas plus mal que je sois venu maintenant. Au moins, je serai tranquille. Nous arrivons devant une porte en acier et peinte en blanc. C’est une botte fixée là par un gros clou qui fait office de marteau. Le serveur frappe plusieurs fois selon un rythme tenant là encore du code secret. La porte s’ouvre. Derrière, un nain avec d’horribles plaques rouges sur le visage. Muet, il parle avec les main. Il doit être sourd aussi car le serveur lui répond en utilisant le langage des signes. Toutefois, il ne doit pas le parler couramment car il s’y reprend  plusieurs fois face aux multiples froncements de sourcils du nain. Finalement, nous entrons.
    Je suis ennuyé car on ne me conduit pas au Hiérarque. En fait, on m’amène directement dans un boudoir ou attendent divers esclaves sexuels de tous sexes ; toutes tailles mais aussi toutes espèces. Je me plante là, joues le client hésitant et demande à parler au maître des lieux. Accepterait-il un entretien afin que je lui expose une demande un peu… particulière ? Le serveur traduit pour le nain qui se retire après avoir acquiescé. Il revient quelques instants plus tard. Le Hiérarque veut bien me recevoir mais il me propose un rendez-vous un peu plus tard dans la journée. Je voyais les choses autrement mais, ne voulant pas faire de vagues, j’accepte de revenir le lendemain, environ aux mêmes heures.
    Je quitte donc le Country Club en prenant bien garde à ne pas être suivi. En vérité, je suis convaincu que le Hiérarque n’a différé notre entrevue que pour pouvoir mener sa petite enquête. A moi donc de paraître le plus « banal » possible pour n’éveiller aucun soupçon. Aussi, je passe les heures suivantes à traîner dans les rues, donnant mon avis sur le brouillard et la menace du dragon rouge. Je jette aussi discrètement possible des regards par-dessus mon épaule. Si le Hiérarque m’a fait suivre, ses sbires sont bons !
    Je me présente donc au Country Club le lendemain, à l’heure dite. Je commande une Idée Soudaine. Le serveur me reconnaît mais reste neutre et discret en me faisant passer de l’autre côté. De nouveaux coups de bottes sur la porte blanche. Cette fois, c’est un Cafaroïde à la face bien amochée par une sale blessure qui nous ouvre. Je repère une araignée à accélérer le temps sur son épaule. Méfiance…
    Je m’attends à ce qu’il me conduise au Hiérarque et.. j’ai tort. En fait, il me fait patienter dans une sorte de couloir ou d’antichambre donnant l’impression d’être dans une mine. Il y a même des rails au sol. Le Hiérarque se montre enfin. Je lâche un soupir, un peu lassé par toute cette mise en scène. Je suis frappé par son long nez. Comme moi, il possède un bec de Pétrol’head. Est-il en lien avec le Crabe ? Celui-ci a-t-il étendu son influence jusqu’ici ? Je n’ose lui poser la question. J’attends. Lui aussi. Le silence est un peu pesant et je finis par le rompre. Je sors de mon sac l’implant lance-saucisse que j’ai récupéré sur le Cyborg et entame mon baratin comme quoi je voudrais quelque chose sur quoi m‘en servir. Mais le Hiérarque n’est pas dupe. D’une façon ou d’une autre, il sait que je ne suis pas un client. Il demeure silencieux. Il ne fait que hocher la tête. Je regarde autour de moi, craignant que nous ne soyons pas seuls.
    Mes yeux de Mouchoïdes me permettent d’avoir une vision à 360° sans avoir à tourner la tête. Aussi, le Hiérarque ne peut savoir que je suis en train de checker les lieux. Pour autant, cela ne me met à l’abri de rien et surtout pas de ce doigt d’honneur surgissant des cieux (et pourtant nous ne sommes pas dehors) et fonçant sur moi pour m’écraser. Mais, va savoir pourquoi, alors que je porte mes bras en croix devant mon visage, protection inutile contre le destin, le doigt dévie de sa trajectoire et écrabouille le Hiérarque ! Je regarde autour de moi. Je ne comprends rien et j’espère que rien ni personne ne va maintenant me sauter dessus. Il ne se passe rien, si ce n’est que j’entends, venant du fond de cet étrange endroit, monter quelques grondements abjects. Mieux vaut ne pas traîner. En toute hâte, je fouille le cadavre. Je n’y croyais pas mais, pourtant, il a sur lui un morceau du masque que veulent récupérer les Prêtres d’Azathoth. Par contre, il n’y a qu’un seul morceau. Où sont les autres ? Les grondements se font de nouveaux entendre. Je m’empare d’une clé que le Hiérarque avait dans sa poche et quitte les lieux.

    J’essaye d’être discret mais j’ai certainement échoué quelque part car je ressens une vive douleur au niveau du bras droit. Normal, je viens de recevoir un carreau d’arbalète. Ma vision mouchoïde aurait dû me prévenir de la présence d’un ennemi. S’agit-il d’un tireur invisible, d’un magicien quelconque ? Je ne vois rien. Après, ce tunnel n’est pas des mieux éclairés. Mais, ne voyant personne, je préfère quand même m’enfuir en courant. Mais, déjà, j’entends le sifflement d’un autre carreau. Je me jette à terre pour l’éviter mais je me retrouve secoué de spasmes alors même qu’un tsunami de vers blancs décident de se frayer un chemin de je ne sais où dans mon anatomie vers l’extérieur. Je me roule par terre et tente de comprendre où mon tireur s’est caché. Ma peau se met alors à me démanger. Je sens des excroissances se frayer un chemin, une fois de plus, de l’intérieur de mon organisme vers sa surface mais, heureusement, ma constitution de Mouche vient  rapidement à bout de cette tentative de cancer. Mais cela n’empêche pas mon tireur de remettre le couvert et j’encaisse un second carreau. D’un bond, je me relève et reprends ma course vers la sortie.
    Je trébuche alors même que mon cerveau éclate sous l’effet de la vision d’un gigantesque tsunami s’abattant sur la cité. Ce n’est pas une simple hallucination. C’est une vision. Un présage. C’est le futur. Et cela est prévu pour… demain ! Les prêtres d’Azathoth sont-ils au courant ? Est-ce que cela à quelque chose à voir avec le brouillard et le dragon rouge ? Est-ce que je vais juste finir ici, comme un con, transpercé par des carreaux d’arbalète dont je ne sais même pas qui les tire, ni d’où ? Je ne veux pas finir comme un vulgaire hérisson ! Je dois prévenir les prêtres d’Azathoth et, surtout, je dois sauver ma peau.
    Ce masque, même si je n’en possède qu’un bout, est couvert d’écriture magique. Ce doit être un artefact puissant si les prêtres le veulent. Et même si j’en ai qu’un bout, je peux peut-être profiter d’un de ses effets. Alors, je porte le masque devant mon visage et lis quelques-unes des inscriptions gravées là en Langue Putride. Jaillit alors un flash psychédélique qui illumine le couloir. Et je vois, enfin, à qui j’ai à faire. A en juger par sa panoplie, ce doit être un chasseur de prime. Il a l’air extrêmement tendu, fermé même. Je remarque surtout ses yeux violets. Sa tenue est très soignée, presque trop. Est-ce à cause de ses yeux, il ne parait pas du tout embêté par ce flash. Je roule sur moi-même et parviens, quand même, à éviter un carreau. Je dois absolument reprendre l’initiative. Je réfléchis à toute vitesse et, grâce à ROHUM, comprends que ce masque est un artefact en lien avec la technomagie d’Azathoth. C’est donc une magie chaotique et hasardeuse. Et avec un peu de chance, je dois pouvoir trouver dans ce bout de masque un sort qui viendra à bout de ce type.
    Je lis donc ces mots en Langue Putride et me voilà revêtu d’une cape. On va dire que c’est toujours ça de gagné. Je tourne le dos à l’arbalétrier et cours vers la sortie. Et je sens un carreau ricochet sur la cape. Elle est peut-être magique…
    J’arrive finalement à la sortie. Mais j’ai toujours mon chasseur de prime aux trousses. Je cherche donc à me perdre, et surtout le perdre, dans les ruelles de l’Interzone avant de regagner le temple d’Azathoth. Mais il me suit toujours. Au moins, il ne tire pas en courant.
    Je demande asile aux prêtres d’Azathoth alors même que l’arbalétrier et toujours sur mes talons. D’ailleurs, le caractère sacré des lieux ne l’arrête pas et il fait irruption dans le temple. Reprenant son souffle, il pointe déjà son arme vers moi. Je vole jusque dans un coin d’ombre tout en hurlant aux prêtres présents qu’ils doivent me protéger. J’esquive deux carreaux avant de pouvoir me coller au plafond. Pendant ce temps, les prêtres restent impassibles. Pourtant, quelque chose se passe. Des clameurs viennent de l’extérieur, attirant l’attention des prêtres et du chasseur de primes. Tout le monde se précipite dehors, même si je sens que le tireur me garde dans son champ de vision.
    Sans quitter ma cachette, je me connecte à la foule grâce à ROHUM. Dehors, un énorme vaisseau-bouche vient d’apparaître. Il peut venir de n’importe où et n’importe quand puisque sa corne frontale lui permet de traverser les vortex spatio-temporels. Le pilote apparaît, sorte d’homme-ver à la peau très très pâle. Il a une révélation à faire à la foule. La cité va bientôt être engloutie. Dans moins d’une journée. Je le savais ! Mais, ce que je ne savais pas, c’est qu’il y a un moyen de nous sauver tous.
Et ce moyen, c’est…

    Alors qu’une partie de la foule reste suspendue aux lèvres de cet étrange pilote de vaisseau-bouche, une autre partie s’en est déjà détournée pour aller prier le dragon rouge des les épargner. Le pilote semble quelque peu déconfit par cette attitude mais cela ne l’empêche pas de poursuivre.
    Oui, nous pouvons tous être sauvé de cette vague à venir. Pour cela, nous avons donc une journée pour rompre une malédiction. Laquelle ? Celle lancée par les membres de l’Église du Serpent Innombrable ! Je regarde autour de moi. Ce nom ne semble pas totalement inconnu aux membres de la foule mais provoque quand même un certain étonnement. Visiblement, ce n’est certainement pas le groupuscule le plus influent du coin. A moins, comme je ne peux m’empêcher de le souffler à mon voisin, qu’ils ne préparent leur coup en secret depuis longtemps.
    Pour autant, cette déclaration suscite le doute. En effet, cette Église est minoritaire mais, pour autant qu’on le sache, ses membres ne font l’objet d’aucune persécution qui justifierait la destruction de la ville. Je ne me sens pas l’âme d’un leader mais je ne peux m’empêcher de faire courir le bruit que le meilleur moyen d’en être certain serait peut-être bien d’aller leur demander directement.
    Et voila que cette suggestion se répand et que la foule se met en marche vers le temple du Serpent Innombrable. Nous arrivons devant une petite bâtisse austère et sale. La façade est envahie par l’humidité et il se dégage des lieux quelque chose de sinistre. Quelqu’un dans la foule prend alors la parole et exige qu’un membre de l’Église sorte s’exprimer sur la question. Personne ne sort évidemment, certainement par peur d’un lynchage. Toutefois, une voix retentit et interroge la foule sur le motif de sa présence. Une fois la clameur retombée, la voix nie en bloc être à l’origine d’une quelconque malédiction et nous prie tous de rentrer chez nous. Alors, je m’envole au-dessus de la foule et demande s’il me serait possible d’entrer pour discuter, seul bien sûr. Une fenêtre s’ouvre et on me fait signe d’entrer.
    A l’intérieur, l’église est à peine moins miteuse que sa façade. Je suis accueilli par un Mantoïd. Il a l’air nerveux. Il n’arrête pas de triturer sa bague. Je lui dis venir en paix. Contrairement à la foule, je ne pense pas que le Serpent Innombrable soit à l’origine de cette malédiction. Toutefois, l’Église a été accusée et, malgré cela, elle a peut-être un rôle à jouer dans le sauvetage de la cité. Je n’ai pas l‘impression de l’avoir vraiment convaincu mais, quand même, il me laisse poursuivre. En vérité, je n’ai aucune hypothèse ni théorie sur la question et j’improvise totalement mon baratin. Aussi, je lui explique que, selon moi, il est plus probable de voir là les conséquences des manigances de serviteurs d’Y’mo-Thog, l’ancienne divinité régnante sur cette planète. Je pense en effet que ce serait plutôt qui, dans un esprit de vengeance et afin de restaurer un nouvel âge de glace, auraient provoqué l’apparition de ce brouillard et de cette ombre du dragon pour créer un certaine panique. De même, ils auraient impliqué l’Église du Serpent Innombrable uniquement pour semer plus de trouble et se laisser encore un peu plus de temps pour finaliser leur plan. Là, je sens le Mantoïd un peu plus intéressé. Alors, a-t-il des informations concernant une résurgence du culte d’Y’mo-Thog ou d’une quelconque divinité liée au froid et à la glace ? Non, mais… peut-être que le Serpent a une réponse, lui.
    Le Mantoïd me conduit alors dans une autre pièce, trois étages plus haut. Là, il s’arrête devant une porte. Je l’interroge quant à ce qu’il y a derrière et il m’explique que personne ne le sait. En réalité, personne n’a jamais ouvert cette porte. Pas depuis qu’il est membre de l’Église en tous les cas. En fait, cette porte est magique. Pas dans le sens où elle s’ouvrirait sur d’autres endroits mais dans le sens où elle est chargée d’un mélange d’Égrégore et de Pétrol’Magie qui permet de faire voyager… l’esprit. C’est un peu, me dit-il, comme si une porte s’ouvrait dans l’esprit et que le Serpent Innombrable en profitait pour y déverser une vision, une révélation. Il pose alors les mains sur la porte, ferme les yeux et nous attendons tous les deux.
    Le Mantoïd est un peu ennuyé quand il se retourne vers moi. Le serpent n’a pas été très bavard. Tout ce qu’il a pu voir concerne… Une tête de femme titanesque en pierre taillée, à moitié recouverte de mousse. Elle porte une sorte de casque d’astronaute et, d’après le Mantoïd, elle parle dans une langue inconnue. Il me prévient également que ses yeux émettent des rayons mortels. Super ! Et maintenant, où je trouve cette tête géante ? Dans la forêt j’imagine. Le Mantoïd hausse les épaules. Il ne peut m’en dire plus.
    Heureusement pour moi, les prêtres d’Azathoth connaissent l’existence de cette tête et s’empressent de me faire un plan détaillé pour y parvenir. Tant que je suis là, je leur remets le bout du masque du Hiérarque que j’ai récupéré, leur promettant de leur ramener le reste si nous survivons à la prochaine journée. Je sens bien que ma réponse ne leur convient pas et je me félicite d’être immunisé aux mutations car je reconnais dans l’invocation qu’il vient de lancer dans ma direction quelques expressions évoquant un blob.
    Pas la peine de m’attarder. Je quitte les lieux et fonce dans la forêt jusqu’à cette fameuse tête. Je verrai bien ce qu’elle a à me dire.

    Et je me retrouve dans cette forêt. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai l’impression de la connaître sans pourtant jamais y avoir mis les pieds. En réalité, je ne me souviens pas d’y être allé, ni même de n’y être jamais allé. Je suis sûr de ne pas savoir et pourtant… cette forêt me rappelle quelque chose. Est-ce que cela a à voir avec mon « autre moi » ou le Joueur ? Le Joueur, lui, connaît bien cette forêt. Il l’a visité bien des fois à bien des époques et sous bien des formes. Pourtant, s’il la connaît, il avoue volontiers que, pour lui aussi, elle demeure bien mystérieuse. Il est bien loin d’en avoir fait le tour.
    Cela fait un petit moment maintenant que j’erre dans ces bois et je ne peux qu’être frappé par l’exubérance de cette végétation. Ce n’est pas une simple forêt, je le sais bien. C’est le domaine autant qu’un avatar de Shub-Niggurath mais… Il y a quelque chose… d’agressif dans la façon dont ces bois se développe. Cette végétation est un prédateur. On dirait que ces bois se dévorent eux-mêmes mais que, malgré cela, ils en ressortent toujours plus fort. Ils se nourrissent d’eux-mêmes, se renforcent. Ça fait peur. Mais, d’un autre côté, se dévorant elle-même, la forêt semble renaître en permanence. Elle est un perpétuelle nouveau-né, sans mémoire, qui doit tout redécouvrir, tout réapprendre. Ça aussi, ça me met mal à l’aise.
    J’arrive finalement au pied d’un arbre. J’entends le hululement d’un hibou, plus haut dans son feuillage. Je lève les yeux et distingue une silhouette taillée dans une sorte de feu translucide. Cet oiseau serait-il une manifestation de l’Emprise, une sorte de forme modelée dans l’Égrégore selon des règles que je ne connais pas ? Essaie-t-il de me dire quelque chose ? Autant le lui demander. Je grimpe. Enfin, j’essaye…
    Le Joueur a pratiqué l’escalade pendant plusieurs années mais on dirait qu’il ne m’en a rien transmis. Aussi, finalement, je m’en remets à mes ailes et vole jusqu’à cet étrange hibou. Une fois en face de lui, je le vois fixer sur moi son regard attentif. Et dans ce regard, je lis de la colère. Dans ma tête, des mots et des images apparaissent, explosent même ! Ce n’est pas formulé dans un langage qu’on pourrait qualifier d’« humain » mais l’idée générale est une association des notions de livres et de poison. Alors, est-ce que cela veut dire que les livres, les mots, sont un poison, qu’ils sont dangereux ? Cette idée n’est pas nouvelle. Pourtant, elle fait écho à mes pensées concernant cette forêt sans mémoire. D’une certaine façon, les livres sont nos 1er disques durs externes, non ? Des sortes de mémoires… et ces mémoires seraient un poison ? Mémoire, savoir… l’ignorance serait-elle préférable ? Vivre finalement dans un état de perpétuel présent, sans passé ni avenir ? Je secoue la tête. Ce hibou est en train de jouer avec ma propension, et celle du Joueur, à me prendre la tête. Il me fait réfléchir à toutes ces considérations pour mieux me faire oublier pourquoi je suis ici. Est-ce là la ruse de la forêt pour me détourner de mon but ? Me remplir la tête de considérations plus ou moins et moins que plus philosophiques pour me détourner de mon but ?
    Les livres sont un poison, mais pour qui ? Pas pour moi ! Pour moi, au contraire, ils sont un remède ou alors, comme l’écrivait Sloterdijk, il s’agit d’un procès d’intoxication volontaire. Ainsi, la lecture devient pour moi une sorte de mithridatisation. Je m’immunise au poison. Je suis immunisé, déjà, car je suis une Mouchoïde ! Alors, sans détourner mon regard des yeux du hibou d’Égrégore, je me décide à l’« ouvrir » pour lire en lui. Dans cet être d’Égrégore et d’Emprise, je vais trouver ce que je cherche, l’endroit où se trouve cette tête en pierre.
    Le hibou résiste mais finit par céder. J’ai trouvé ce que je cherchais. Ainsi, je vole maintenant vers mon but, ma cible, la tête géante. Elle a été sculptée au sommet d’un tertre. Derrière, il y a une cascade. L’endroit est beau, d’autant plus que la nuit tombe. Le vent souffle, prémisse du tsunami à venir ? J’avance prudemment afin de ne pas tomber sous le coup de ses rayons mortels contre lesquels on m’a mis en garde. Et là, je me rappelle de la carte que m’ont donné les prêtres d’Azathoth. La forêt a été maligne et me l’a faite oublier. J’aurais pu arriver plus tôt. J’ai maintenant moins de temps pour trouver une parade à cette vague qui va détruire la cité.
    Je vole selon une trajectoire qui me permet de m’approcher de la tête dans déclencher ses rayons. Maintenant que je suis tout proche d’elle, je reste silencieux et attends un peu au cas où elle prendrait spontanément la parole. Effectivement, je n’attends pas longtemps avant qu’elle ne s’adresse directement à moi. C’est bizarre. Je pensais qu’elle userait d’une sorte de télépathie mais je vois distinctement bouger ses lèvres de pierre recouvertes de mousses. Son haleine est putride, comme la Langue dans laquelle elle s’exprime.
    La tête me rassure. Elle ne me veut pas de mal. Il y a quelque chose de désenchanté dans sa voix. En fait, elle ne me veut pas de mal car cela ne sert plus à rien. Elle affirme que, depuis le début ou presque, je ne cours pas après les bonnes cibles, je ne cherche pas du bon côté. Et maintenant, il est trop tard. Je lui demande s’il n’y a vraiment aucun moyen d’éviter ce tsunami. Il y en a un mais… il est trop tard maintenant. Dans le doute, je lui demande quel est ce moyen. Après tout, ce n’est pas parce qu’elle semble convaincue qu’il est trop tard que c’est effectivement le cas. Et puis, peut-être me ment-elle ? Et la tête, j’ai l’impression qu’elle se tourne vers moi-même si c’est faux parce que c’est impossible, me demande :
    « Ne t’est-il pas venu à l’idée que tu avais été drogué et que tout cela n’était qu’une illusion, une hallucination ? »
    Pétrol’head que je suis… Je n’ai rien pris depuis… depuis… ?
    Suis-je en manque ? Ai-je fais une overdose ?
    Je me rappelle ces mots de Nietzsche qu’on attribue aussi à Burroughs : « Rien n’est vrai, tout est permis. »
    Merde !
    Cette vague, ce tsunami, ce brouillard, cette fumée, ce dragon rouge…
    Tout cet Égrégore et ce Pétrol’magie.
    Suis-je vraiment ici ? Ne suis-pas tout simplement en train d’ultra-planer ou de me tordre de douleur à cause du manque ?
    Tout ça…
    … ne serait finalement…
    … qu’une hallucination ?

    C’est… trop tard ?
    Vraiment ?

    Quelque part, le Joueur se ronge les ongles. Même lui ne sait plus. Alors, qu’est-ce qu’on fait ?
    La mémoire est un poison. Les livres sont un poison. Et même si je suis immunisé, le mieux que j’ai à faire est peut-être de faire comme cette forêt : repartir à zéro !


Commentaires de Thomas :

A. 13540 mots... Encore une novelette. Vous êtes productif, monsieur Lagauzère !

B. « Je reconnaîtrai l’endroit car il y pleut beaucoup et l’eau de pluie transforme les choses »

Hum, hum, l'emprise :)

C. « Celui qu’elle a appelé était scarifié mais malgré cela très beau. Ses cicatrices étaient… artistiques et bouleversantes. »

Peut-être l’œuvre d'un sarcomantien ?

D. « Millevaux ! J’ai l’impression d’atterrir dans la cave inondée du Multivers. »

J'adore l'image :)

E. « Je demande à ROHUM si je dois craindre un piège. »

Tu me rappelles ce qu'est ROHUM ?

F. Je ne croyais pas ça possible, mais j'ai l'impression que tes RP sont de plus en plus what the fuck :)

G. Le personnage a des visions d'un autre personnage de ta campagne, ce qui accentue l'effet de flou, le sentiment que tout s'équivaut :)

H. Le personnage parcourt d'immenses durées dans le temps, j'ignore s'il sera à l'heure à son rendez-vous fixé quatre jours après son départ :)

I. « Et je reconnais ce château. C’est celui de ma vision, celui que mon « autre moi » n’a jamais réussi à atteindre. » ça me fait penser au Château de Kafka. Peut-être qu'avec l'égrégore, il est des lieux dont on peut voir les contours mais qu'on ne peut jamais atteindre.

J. « En vérité, tout ça commence à me dépasser et je ne sais plus si c’est une si bonne idée que ça de courir après ce barde.  »

Moi aussi, ça commence à me dépasser :) Les « non mais » à répétition provoqués par les outils de système nous perdent dans des méandres narratives inextricables :)

K. « Je le trouve là s’adonnant à une activité témoignant de sa frustration. Présentement, il agite son implant, éjectant ce qui semble être des saucisses de viande d’Homme-porcs »
Ah oui quand même on en est là :)

L. « Le Joueur, lui, connaît bien cette forêt. Il l’a visité bien des fois à bien des époques et sous bien des formes. Pourtant, s’il la connaît, il avoue volontiers que, pour lui aussi, elle demeure bien mystérieuse. Il est bien loin d’en avoir fait le tour. »
Et comment, moi non plus :)

M. «  On dirait que ces bois se dévorent eux-mêmes mais que, malgré cela, ils en ressortent toujours plus fort. Ils se nourrissent d’eux-mêmes, se renforcent. Ça fait peur. Mais, d’un autre côté, se dévorant elle-même, la forêt semble renaître en permanence. Elle est un perpétuelle nouveau-né, sans mémoire, qui doit tout redécouvrir, tout réapprendre. Ça aussi, ça me met mal à l’aise.  »
J'aime beaucoup l'image
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Message par Pikathulhu »

DANS LE VENTRE DE MEJGORIÉ

L'enfance contée dans la Slavosie post-apocalyptique forestière. Une partie enregistrée et un témoignage photo par Claude Féry.

(temps de lecture : 2 min ; temps d’écoute : 50 mn)

Joué le 31/05/2020

Le jeu : Lillipousse, un jeu de conte interactif par Thomas Munier

Univers : la forêt de Millevaux

Lire/télécharger le mp3


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Hermann Stockmann, domaine public


Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).


L'histoire :

Accompagnement musical : Légendes : la forêt qui avance de Art Zoyd

Les deux dernières cartes

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Une belle errance jouée avec Lillipousse. Nous avions convenu que l'une d'entre nous en s'emparent de la carteTu arrives devant ta maiso indique la fin
De la fiction ont émergé les personnages de Gabrielle et Xavier pour la suite de la session

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Commentaires de Thomas :

A. Une partie de Lillipousse dans l'univers de Millevaux, c'était en fait un peu inattendu (même si j'ai rangé le jeu dans le catalogue Millevaux, on n'y retrouve que la notion de forêt et de conte, et c'est destiné aux jeunes enfants). Les questions ne se sont pas avérées trop enfantines pour vous ?

B. C'est très intéressant que vous ayez utilisé Lillipousse (de façon préméditée) ou non pour élaborer vos personnages de la session suivante. Pour le tester moi-même avec Le Tarot de Millevaux (en développement), j'ai effectivement constaté qu'une ronde de questions à la Pour la Reine est très efficace pour remplacer un brainstorming de création de personnages ou un world building. Et c'est plus ludique. Ce n'est pas non plus l'invention de la poudre ceci-dit, parce que Dream Askew commence avec une ronde de questions, des jeux comme Te Deum pour un Massacre ou Patient 13 proposent aussi un questionnaire de création de personnages, etc.

C. Quel nom donnerais-tu à cette session et où la localiserais-tu géographiquement ?


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Réponse de Claude :

A. Les questions ont nourri le jeu.
Alex et Xavier étaient ravis de voir les questions répondre au développement de notre histoire, précéder ou compléter leurs questionnements personnels.

Plus encore l'aspect enfantin a rassuré Xavier qui a spontanément développé un personnage lui convenant, dans l'esprit de Sève, sans avoir à en redouter les épines.

Nous avions préalablement convenu que notre bande d'enfants serait des Bachkirs, apiculteurs semi nomades des environs de Mejgorié. Nous avons donc traîtreusement convoqué certains des paradigmes de Millevaux.

B. Une fois n'est pas coutume, j'ai arrêté un choix unique de jeux avant la session, dès lors que j'ai su que Xavier jouerai.
Je voulais proposer Lillipousse à Xavier. Je pensais que le jeu lui plairait, et ce fut le cas. Il a vraiment apprécié !
Gabrielle, avait annoncé qu'elle ne souhaitait pas jouer plus avant Nabuchodonosor.
Nous devions donc créer deux personnages.
Lillipousse étant le terreau de cette phase créative cela permettait de libérer la phrase de création de personnage de la contrainte de la thématique commune.

C. « Dans le ventre de Mejgorié » .
Mejgorié, Oural frontière orientale de la Slavosie, sur les contreforts du mont Lamantaou.


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Commentaires de Thomas après écoute :

A. C’est amusant, même si vous répondez aux questions, on a du mal à reconnaître une partie de Lillipousse telle que je les joue avec mon fils de quatre ans:)

B. Cela me rappelle la partie d’Oriente jouée par le podcast Un MJ de Trop qui les avait laissés sur leur faim par rapport à leur objectif RP.
Ici, vous l’atteignez complètement même si ce sont des surtout des monologues

C. C’est chouette le rituel de moucher une bougie quand vous évoquez une disparition

D. Tu fais trop bien le chat :)

E. J’ai l’impression que les cartes questions étaient dispos face visible et que les joueuses y piochaient à loisir, ce qui me semble une bonne option pour faire des DFTQ RP

F. Super chouette que Xavier récite la prière de révocation de Dans le Mufle des Vosges :)


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Réponse de Claude :

A. J'ai pourtant tenté de répondre aux questions. Xavier a vraiment apprécié et je pense à renouveler l'expérience en y mettant moins ma sauce.
E. Nous piochions nos cartes simultanément et nous en prenions connaissance pendant l'instance précédente.
Le petit temps en plus était un confort apprécié de Xavier et Alex, peu à l'aise en position d:auteur
F. Il s'est un peu embrouillé dans les pronoms et les possessifs et s'est lancé le sort à lui-même !


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Message par Pikathulhu »

RETOUR DANS LE VENTRE DE MEJGORIÉ

Forêts fractales, insectes invasifs, hypnose sonore destroy et slavisme radical. Un récit et une partie enregistrée par Claude Féry.

(temps d’écoute : 1h06 ; temps de lecture : 4 min)

Joué le 31/05/2020

Le jeu : Inflorenza, héroïsme, martyre et décadence dans l’enfer forestier de Millevaux

Lire/télécharger le mp3


Image
Ilyasov2022, cc-by-sa


Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).



Contexte :

Cette partie fait suite à :

[Lillipousse] Dans le ventre de Mejgorié *
L'enfance contée dans la Slavosie post-apocalyptique forestière. Une partie enregistrée et un témoignage photo par Claude Féry. (temps de lecture : 2 min ; temps d’écoute : 50 mn)

Cette seconde partie a été jouée sur 1h30 avec (sur la simple base du résumé Nanoflorenza Nibiru, par Federico Sohns, un jeu de rôle de SF sur les souvenirs perdus.

Aoma le zoroastrien a défait les créatures malaisantes surgies des forêts fractales tandis que Liberté et Siobhan se sont débarrassés du caroncule qui enkystait la hanche de la Chronicler. En ôtant la chose, la bestiole a exhalé avec son dernier soupir un « Mère » atroce qui a étouffé l'étrange lien avec Elfe. Ce dernier avait préalablement éliminé Nabuchodonosor comme irrémédiablement inconforme, et séquestré tous les biens de Liberté et de l'Anabaptiste.

Nos instances ont été ponctuées par la composition de Phobeoth. Certains morceaux du dernier album de Einstürzende Neubauten ont alimenté l'atmosphère de Mejgorié et donné la pensée de Siobhan ou des étranges polichinelles surgies des forêts fractales.



Commentaires de Thomas :

(il n’y a pas de A-B-C, c’est normal)

D. En plus des personnages, est-ce que des réminiscences de la pré-session de Lillipousse ont alimenté votre session de Nibiru/Inflorenza ?

E. J'adore le concept des forêts fractales même si je ne le visualise pas bien (je crois pourtant l'avoir évoqué dans une entrée de L’Almanach). Comment avez-vous traité ce concept ?


Réponse de Claude :

D. De mon point de vue oui. Nous avons joué en mode Carte Rouge, et j'ai considéré que les découvertes des gamins de la première session sont opérantes dans le ventre de Mejgorié.
Gabrielle s'est placée sur la même orbite mystique,
Xavier a joué son personnage bravache muni d'une bonne massue jusqu'à ce qu'il prenne peur… Carte X !

E. Le terme de forêts fractales provient de Degenesis.

Depuis les plaines glaciales de Pollen, le cratère de Pandora vomit ses pollens, ses spores et répand sur les terres sa forme d'amorce, emprise.

Je la lie à ma vision de Légendes : la forêt qui avance de Art Zoyd et sa rencontre avec Millevaux, développée avec Dégringolade.

Je n'ai pas à ce jour décrit la forêt fractale au joueuse. C'est un peu l'acte IV de cette campagne qui pourrait être jouée avec L’Empreinte.

Nabuchodonosor l'a traversée.
Mais il était enduit d'huile de Mardouk qui neutralise les effets de l'amorce.

Je pense utiliser Sylve [note de Thomas : je n'ai pas retrouvé de quel projet de jeu il s'agit) pour offrir l'opportunité aux joueuses de la découvrir en jeu.

D bis. Parvenu à 17'25'' de l'enregistrement, ce qui correspond à la troisième instance de la seconde session, je confirme que les éléments de la première alimentent l' atmosphère de la seconde.

La musique composée par Phobeoth amplifie le caractère sombre et mystique de cette session.

Xavier écoutant avec moi la troisième instance a pris des poses et grimacé à la manière des rugbymen néo Zélandais, terrible !

Je suis également heureux de l'effet produit par ma scansion du rituel d'exorcisme sur fond de The Ritual [Note de Thomas : je n'ai pas retrouvé la réf].

Le rituel a une première fois été dit par Lapin dans Lillipousse puis reprise par moi dans cette même session pour prendre tout son poids dans celle-ci repoussant l'esprit né de la naphte, Visage Familier loin de Liberté et de Siobhan.


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Gabrielle joue Aoma


Phobeoth :

Claude, merci d'avoir utilisé ma composition, ça me fait un réel plaisir !


Claude :

Pour les forêts fractales, j'imagine ça vraiment comme les formes mathématiques qu'on peut apercevoir sur la toile ou dans différents travaux, bien que ça soit vraiment délicat à avoir une vision très concrète je trouve... c'est même plus que délicat. Il y a d'ailleurs le clip Clockworks de Messhugah qui montre bien la magie du Fractal réalisé par Julius Horsthuis et surtout le côté hypnotique... Comment faire ressentir ça aux joueuses ?
Elles jouent la forêt, ses besoins, ses perpétuelles transformations avant de l'affronter in vivo. Chaque scène est un non lieu, une phase de croissance dont il faut échapper pour passer à la suivante à la manière de Mantra Oniropunk, mais en plus contemplatif


Phobeoth :

Peut-être quelque chose qui voisinerait Spirale de Junji Itō (伊藤・潤二, Itō Junji).
A la manière de L’Empreinte j'ai semé des graines en ce sens (escargots, les enfants qui se lovent en position fœtale pendant la course avec le loup dans Lillipousse).


Thomas :

On peut aussi imaginer une forêt labyrinthique où tu progresses en spirale vers le centre sans jamais l'atteindre.

F. Question supplémentaire pour Claude : comment fais-tu pour jouer à la fois avec les règles d'Inflorenza et celles de Nibiru ?


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Claude :

F. Je joue à Nanoflorenza avec Gabrielle et Xavier et à Nibiru avec Alex.
Toutefois dans l'avant dernière instance jouée par Xavier j'ai basculé sur Nibiru et proposé un souvenir. L'idée initiale était d'augmenter ses probabilités de réussite, parce qu'il avait les pétoches et que je voulais le rassurer, mais j'ai assorti le changement d'une proposition d'échec avec contrepartie, (charger son cœur), et j'ai été surpris qu'il accepte d'être rattrapé par la créature qui le poursuivait.


Phobeoth :

À Thomas : la forêt labyrinthique est très sympa aussi, ça permet de libérer cette espèce de tension imaginative lorsque que tu tente de te représenter quelque chose de trop complexe !

À Claude : pourrais-tu m'expliquer les techniques vous utilisez pour jouer. Tu utilises plusieurs jeux dans une même fiction c'est ça ? Avec des systèmes de réso adaptés à tes joueuses ? ( Je suis sur le discord depuis peu de temps et parfois c'est assez énigmatique pour moi ! )


Claude :

À Phobeoth : En début de session d'ordinaire nous convenons d'un jeu que nous utiliserons parmi trois que j'ai sélectionné. C'est notre procédé habituel.
Parfois, je propose 2 à 3 jeux qui se succéderont.
Et plus rarement j'utilise des jeux différents selon les joueuses.
Dans tous les cas nous jouons en présentiel et très fréquemment des objets sont mis en jeu, ou je propose des aliments ou boissons qui interviennent dans la fiction.


Phobeoth :

Très intéressant, nous faisons beaucoup ça aussi avec mes joueuses même si nous ne jouons qu'à un seul jeu à la fois! Je trouve que partager un repas, une boisson ou un accessoire particulier renforcé le lien dans la fiction. C'est un véritable lien qui est créé entre la joueuses et les personnages !


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Alex et Xavier


Commentaires de Thomas après écoute :

A. Tu fais faire un jet à Xavier contre l’homme-crapaud mais tu ne lui as pas dit ce qu’il risquait en cas d’échec et tu lui dis quelle phrase de souffrance écrire (je suppose que c’est OK en Nano Inflorenza, pas sur la version complète)

B. C’est sympa que Gabrielle invoque le mythe d’Ahriman

C. Hum bon moment d’horreur organique avec le caroncule sur le perso d’Alex
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Re: [CR] Millevaux et autres jeux Outsider

Message par Pikathulhu »

LA BÊTE DU BOIS DE NERVINE

On est toujours la bête de quelqu'un. Un épisode de jeu de rôle solo primal par Milloupe.

(temps de lecture : 29 min)

Le jeu : Bois-Saule, jeu de rôle solo pour vagabonder dans les ténèbres sauvages de Millevaux


Avertissement : contenu sensible (voir détail après l'image)

Image
Paul, cc-by-nc-nd

Contenu sensible : Violence, Meurtre, Mutilation


Note de Milloupe :
Ceci est l’histoire, écrite au jour le jour à l’aide du système de jeu de rôle solo Bois-Saule, d’un monstre en lien avec le roman-feuilleton La Folie Pourpre que je suis en train d’écrire.

Les informations au début de chaque jour correspondent aux contraintes narratives obtenues grâce à Bois-Saule.



L'histoire :

Je marche, je rampe, je traîne mon horrible carcasse dans cette boue puante, comme un ver misérable et épuisé. Manger, ramper, manger encore. Voila tout ce qui m’anime. J’ai froid, j’ai faim. J’ai peur. Je ne connais plus que la peur, depuis que je vis la nuit dans cette forêt.

J’ai faim. Mes doigts noirs sont des griffes dont je lacère tous les êtres vivants que je croise. Ma peau est une écorce sèche, dure, froide. Je me fonds dans cette boue qui m’a vu naître. Je m’y nourris d’insectes et de racines. Je crois. Je ne me rappelle pas de tout ce que je fais, ni de tout ce que je vois, encore moins de tout ce que je mange. Je ne me rappelle que du froid. Et de la faim.


Jour 1 :
Un Bunker – grasse-nuit – Le vent – Un trouble mental – Horla – Cerf/Biche/Faon – Péripétie (progression, un être proche perd la vie)

Le vent fait craquer cette vieille cabane branlante. Je me colle aux planches vermoulues et froides, cherchant à oublier les rêves que la nuit m’apporte. Je me recroqueville, les mains sèches serrant mes genoux contre mes côtes saillantes, les yeux exorbités fixant dans l’obscurité moite et inconnue. Encore longtemps avant le lever du soleil. Je ne sais plus compter les heures, mais je reconnais toujours l’ombre de la nuit noire de celle qui précède le matin.

Un craquement me pétrifie sur place. Ça venait de l’extérieur. Ça y est la Bête est là, j’imagine déjà ses griffes racler contre ma peau, ses yeux boire mon âme et ses crocs me déchiqueter. Un nouveau craquement sec. Plus aucun doute, ce soir c’est ma fin. Je me relève doucement, tremblant de tous mes membres. J’entends la respiration rauque de la bête s’approcher comme si elle était déjà sur ma nuque, son haleine chaude m’emplit les narines.

Un craquement. Tout près de moi. J’oublie tout, la peur la douleur la nuit et je me rue vers le bruit en hurlant de toutes mes forces. Je cours à l’aveugle, je bondis instinctivement et je rentre dans la Bête de tout mon poids, je sens sa fourrure chaude sous mes doigts et son corps puissant se débattre avec rage. Chacun cherche à dévorer l’autre, à griffer, à mordre, à tuer. Notre lutte fait un vacarme infernal et déjà je sens la douleur de ses crocs qui percent ma chair et fait couler le sang sur les lambeaux de mes vêtements.

Je redouble de rage, de force, mes griffes, mes pieds, mes dents, tout s’accroche à la bête qui crie de surprise et rue en arrière. Je tiens bon, à l’aveugle je trouve son cou et m’y accroche du bout des griffes. Secoué en tous sens, je sens à nouveau les crocs et les griffes déchirer mon dos, s’enfoncer profondément entre mes côtes, mais je me sers de cette douleur pour me donner la force de me tirer en avant et mordre dans les poils, la peau, la gorge de la Bête.

Je sens son sang chaud et salé remplir ma bouche, je sens des cartilages céder, je sens sa respiration haletante passer entre mes dents alors je serre, je serre, je serre.

Les derniers soubresauts remplissent mes narines de sang et me jettent à terre mais la Bête est déjà morte, s’effondrant dans une mare de sang chaud qui s’étend encore et dans laquelle je me recroqueville, épuisé. Vidé.

Puis le souvenir me heurte de plein fouet. Je me vois, comme à chaque fois que je tue la Bête, je me vois et c’est moi le chasseur mais ce jour-là j’ai décidé d’épargner ce petit faon parce qu’il avait des yeux si doux et il m’a rappelé ma peur par la peur qui était dans ses yeux alors je me suis vu dans ses yeux mais le chasseur c’était moi et aujourd’hui je viens de tuer le cerf que le petit faon était devenu parce qu’aujourd’hui la Bête c’était ce cerf.

Alors je dors enfin, réchauffé par la mare du sang du cerf et par son corps encore chaud qui refroidit à côté de moi. Alors je ferme les yeux avec force parce qu’après ça je sais qu’il n’y aura pas de rêve.


Jour 2 :

Un futur imaginé – crépuscule – Le brouillard – la Faim – Forêt – feuilles mortes/épines – introspection (croyance et désappointement)

Les ombres des arbres qui m’entourent s’étirent à mesure que le soleil se couche. Je trébuche sur le réseau sans fin de racines, rendues gigantesques et furieusement tortueuses par les ombres. Je trébuche encore, tombe de tout mon long et heurte un tronc avec violence, mon crâne résonnant de douleur.

Ma vision s’embrume un peu des larmes que la douleur invoque, puis un vrai brouillard se lève autour de moi, avec la fraîcheur de la nuit qui arrive. La masse blanche et progressivement plus dense s’étend et se rapproche, menaçante, terrifiante, tendant ses griffes de brume vers moi alors que je recule me recroqueviller désespérément dans un tas de feuilles mortes qui crissent sous mes pieds et mes mains.

Le brouillard s’épaissit et m’enveloppe, il me glace, il me saisit jusqu’aux os et vient me rappeler la faim qui me tenaille, qui contracte mon estomac alors que je m’enfonce entre les racines, pour m’éloigner de ce brouillard qui me saisit tout entier. Sans succès.

Alors des formes plus denses, plus visibles, apparaissent dans cette mer de pâleur et dansent devant mes yeux, envoûtantes, enivrantes…rassurantes ?

Je vois des êtres, des formes presque humaines mais plus humaines que moi, me tendre la main, j’entends leurs voix humides m’appeler, me rassurer, tandis que leurs mains de brume me traversent et disparaissent. Ces êtres prennent toujours plus forme, je distingue leur corpulence et leurs vêtements, je remarque qu’une d’entre elles porte une sorte de masque avec des cornes de cerfs, des cornes en brume, qui s’agitent quand elle chante et qui dansent avec elle.

Je sens une main de gouttes d’eau me prendre ma main de chair, je sens des doigts caresser mes doigts et me montrer que mes griffes ne sont plus là, me montrer que je suis à nouveau aussi humain que ces formes qui m’appellent encore et qui dansent et qui sont faites de brouillard mais pourtant sont plus humaines que la Bête qui me suit et que je suis.

Soudain je vois les formes de brouillard se figer et pousser de longs cris que je suis le seul à entendre mais qui résonnent dans l’écorce et les feuilles mortes où je me recroqueville pour boucher mes oreilles cacher mes yeux et espérer, espérer que ça s’arrête.

J’entends alors enfin une dernière phrase qui m’appelle, qui me dit de revenir alors qu’il est déjà trop tard, je le sais, la Bête me suit et si je reviens elle me verra me trouvera et me tuera alors je repousse les formes de brouillard qui déjà disparaissent et je continue de fuir, de chasser la Bête en retour et de manger parce que j’ai faim.


Jour 3 :

Endroit familier – presque nuit – Tempête – Insécurité – Égrégore – Arbre/Souche/Tronc – Exploration (si horrible que la raison vacille → changement tentant, mais dramatique si cède)

Je peine à avancer sous cette pluie qui s’abat sur moi comme le couvercle d’un cercueil, me poussant sous terre, me forçant presque à ramper, dans l’obscurité qui suit le crépuscule. J’entends l’orage gronder, terrible, tandis que les éclaboussures de la pluie me remplissent les yeux, les oreilles, le nez, m’aveuglant et m’asphyxiant. Un instant, j’ai peur d’être en train de me noyer, d’être tombé à l’eau tellement la pluie semble être partout, au-dessus au-dessous à l’intérieur, jusqu’aux os.

Puis je glisse et m’étale dans la boue et le froid soudain et la terre dure sous mon corps me rappellent que je suis encore là. Alors je lève les yeux et je ne vois rien à travers la boue et la pluie et je tâte avec mes mains devant moi et je sens un arbre, l’écorce sèche et rêche. Je m’essuie les yeux pour voir devant moi et je vois un tronc, un tronc assez haut mais qui n’a plus de branches parce qu’il a été touché par la foudre il y a longtemps. Je ne sais plus comment je sais ça ou qui me l’a dit mais je me rappelle que je suis déjà venu ici et je n’étais pas seul mais j’ai oublié son visage et je n’arrive pas à entendre sa voix par-dessus le torrent de pluie et les grondements de l’orage, pourtant je sais que je suis déjà venu et on m’a dit que cet arbre était là depuis longtemps et qu’il était important mais dangereux, parfois, alors je ne devais pas y aller seul parce que je ne savais pas quand il était dangereux et quand il nous laissait approcher.

Un doute arrive à se faire une chemin dans mon esprit embourbé : est-ce que l’arbre foudroyé va comprendre que je suis là par hasard et que c’est la pluie qui m’a amené ici, que je ne lui veux aucun mal ni rien du tout d’autre, mais est-ce que la pluie ne m’a pas mené ici exprès justement, soit pour me perdre soit parce que l’arbre foudroyé lui a demandé ?

Je regarde le tronc abîmé et si vieux à travers le rideau de pluie, je vois les nombreux trous d’insectes et d’oiseaux puis tout à coup comme un mouvement, comme si les nœuds du bois avaient bougé et soudain c’est toute l’écorce qui semble remuer et un visage s’y dessine, chaque trou et chaque nœud prend un sens nouveau c’est un visage qui se réveille et me regarde du haut de l’arbre foudroyé.

L’arbre me regarde, des trombes d’eau ruissellent sur ses sourcils de mousse et le long de ses joues d’écorce et je vois qu’il voit mes souvenirs en moi qu’il sait qui je suis qui j’ai été et qui j’ai tué et alors il pousse comme un long hurlement, ouvrant sa gueule de liège et de sève où des griffes d’écorce se projettent vers l’extérieur comme un tas grouillant d’insectes qui m’appellent à travers le cri.

Irrésistiblement je tends ma main vers cette bouche béante et griffue qui m’appelle et me promets de choses que je ne comprends pas pendant que le tonnerre et le cri de l’arbre foudroyé se mélangent dans mes oreilles. Quand je touche l’écorce froide je la sens qui m’aspire et m’empêche de repartir avec ses griffes et je comprends qu’elle aspire mes souvenirs mes erreurs mes crimes ma peine et qu’elle me fait ce cadeau parce qu’autrefois j’ai bien écouté quand on me disait que l’arbre foudroyé était important.

Le sentiment de succion par la paume de ma main continue et je sens mon esprit se déliter, perdre pied dans les méandres de mes souvenirs qui s’effacent et de ceux qui restent, de mes certitudes qui s’adoucissent et qui plient et qui cassent.

Alors je sens le contact avec le tronc s’estomper et le cri assourdissant que je n’entendais presque plus par derrière le torrent de pluie s’arrête et c’est son silence qui me frappe puis le visage de l’arbre lui-même disparaît. L’écorce me rend ma main en ayant gardé mes souvenirs, mais avant que j’ai le temps de me sentir vide de l’absence de ces souvenirs je rapproche mes doigts de mon visage pour essuyer mes yeux plein d’eau et je vois qu’ils sont pétrifiés, noircis, carbonisés, et déjà en train de se dissoudre dans l’eau.

Je vois mes doigts disparaître devant mes yeux et impuissant j’approche mon autre main mais je n’ose pas toucher, j’ai trop peur de la douleur, des conséquences, de la contagion, et toujours mes doigts lentement s’érodent dans la pluie jusqu’à ce qu’il ne me reste que le pouce et une phalange de chaque autre doigt à la main droite.

Et dans la terreur qui me remplit vient s’empêtrer un des seuls souvenirs qui me restent, la seule autre certitude que la faim et la peur, ce visage que je voudrais oublier, cette expression terrifiée et ces yeux tristes qui me regardent avec horreur, ce que j’aurais vraiment voulu oublier mais qui reste parce que l’arbre ne pouvait pas tout prendre. Puis la foudre tombe encore, tout près, et le tonnerre qui explose aussitôt fait voler en éclat tout reste de conscience. Je m’effondre, tenant ma main droite dans ma gauche et la sentant tout près de mon cœur, mon cœur si vide maintenant que tant de souvenirs manquent et si douloureux avec ce souvenir qui reste et m’emporte dans les cauchemars.


Jour 4 :

Usine à l’abandon – presque nuit – Silence – Faim – Ruine – Mouches/Papillons/Fourmis – Péripétie (récompense ou trésor → Horla naît des pensées)

La nuit vient de tomber quand je sors de la forêt dans une large plaine inconnue. Le sol est encore chaud de la chaleur de la journée et quand je m’éloigne de la forêt et de sa vie ce que j’entends en premier c’est le silence. Pas un oiseau, pas d’animaux nocturnes, juste la profondeur et la pesanteur absolues de la nuit qui recouvrent le monde.

Je poursuis mon chemin au hasard, éclairé par quelques étoiles, poussé par la faim qui me fait un creux dans le ventre et qui me fait avancer, continuer sans savoir où je vais ou si je vais quelque part. Une silhouette sombre se détache sur la plaine et cache une partie de l’horizon alors comme j’aime ce silence nouveau et que la forêt est derrière moi je vais vers la forme sombre, je me mets même à trottiner parce que quelque chose dans ma tête me dit que c’est là que je dois aller et vite, vite, avant qu’il ne soit trop tard.

Quand je me rapproche la silhouette devient la vieille ruine d’un moulin à vent dont les ailes sont transpercées de trous qui laissent voir les étoiles au travers mais il y a encore le corps du moulin qui se dresse dans la plaine dans le silence et dans la nuit. J’entre à l’intérieur parce qu’il y a toujours cette voix qui me dit que là-dedans je pourrai trouver à manger et je pousse la vieille porte de bois avec mon épaule.

L’intérieur est très sombre, malgré le toit qui n’a plus de tuiles et un pan du mur qui s’est effondré, malgré ça il fait noir alors je tâte autour de moi, je renifle les odeurs de poussière, j’écoute le silence dans le moulin. Je sens l’ancien mécanisme, les engrenages la meule et le versoir pour remplir les sacs mais il n’y a plus de sacs, plus de farine, seulement quelques vieux grains de céréales déjà germés que je porte à ma bouche et qui disparaissent en moi alors que j’ai encore faim et qu’il n’y a déjà plus d’autres grains.

Puis je sens les barreaux de l’échelle qui monte à l’étage, je ne sais pas comment mais je sais que c’est là qu’on entrepose les sacs et qu’on répare le moulin quand ça grince quand ça crisse quand ça bloque. Je monte lentement dans le silence et le noir, j’entends le bois craquer doucement mes pieds frotter contre le bois et mon cœur battre dans mes oreilles parce que dehors c’est le silence.

Tout à coup, j’entends au-dessus de moi un petit bruit, un frottement ou un bruissement je ne sais pas, je m’arrête et j’écoute et je sens quelque chose me caresser le visage et s’éloigner alors je tends la main et je sens dedans un papillon de nuit se débattre avec ses ailes qui me chatouillent la paume mais je ne le lâche pas et je le sens, le renifle mais il ne sent rien. Je me rappelle que j’ai faim mais je n’ai jamais aimé les papillons ça chatouille dans la bouche et ça ne nourrit pas alors je rouvre la main et continue à monter à l’échelle en entendant les barreaux craquer et le papillon voler silencieusement.

J’entends à nouveau le bruissement au-dessus de moi et ça ne vient pas du papillon ni du vent dans les ailes du moulin, je finis de monter l’échelle et je reste très très calme, écoutant par-dessus le bruit de mon cœur et regardant vers les étoiles que je vois à travers la charpente nue du moulin. Je vois enfin une forme cacher très rapidement les étoiles avec un bruissement et passer pas loin de moi, si j’avais été plus rapide je l’aurais attrapée mais à nouveau je ne la vois plus et le silence n’est rempli que de ma respiration et des battements de mon cœur.

À nouveau un bruissement et un éclair d’ombre mais cette fois-ci j’étais prêt et je tends mon bras ma main et mes griffes à toute vitesse et j’attrape l’ombre au vol. Je tiens la chauve-souris de toutes mes forces alors qu’elle se met à crier et se débattre mais elle ne chatouille pas et j’ai plus faim qu’elle ne me fait mal donc je la tiens et l’approche de mon visage. Elle se tétanise, épuisée de se débattre, je la porte à ma bouche, mes crocs brisent son cou et déchirent sa peau, je sens le peu de chair réchauffer ma gorge. J’arrache les deux ailes parce qu’avec je pourrais m’étouffer puis je croque son corps tout entier parce que j’ai faim donc je ne veux pas attendre.

Les poils, les muscles, le sang, le tripes, les os, tout se mélange et tout se brise sous mes crocs. Quand ça atteint mon estomac, le souvenir qui me heurte est noir, rempli de bruits et d’odeurs mais la chauve-souris était jeune alors le souvenir n’est pas très fort et maintenant j’ai moins faim.

Alors je me redresse et j’étends mes ailes et je saute pour descendre de l’étage mais je ne sais pas encore voler alors je sens l’impact du plancher vibrer dans tous mes muscles et mes os et je sens mes ailes être déchiquetées par les barreaux de l’échelle quand je la heurte. Je crache du sang, le mien et celui de la chauve-souris puis je rampe je marche je cours vers la sortie et à travers la plaine en sachant que la Bête va être attirée par le sang et elle va venir dans le moulin et l’occuper et je ne pourrai plus y retourner.


Jour 5 :

Une aberration organique – Noire nuit – climat étrange – Manque causé par l’oubli – Égrégore – Fleurs/pétales – Introspection (Question/certitude -> Remords)

Je suis allongé dans une clairière, le vent fait pleuvoir des feuilles mortes. Pour une fois, il fait jour. J’ai mangé, je ne me rappelle pas quoi. Je n’ai pas encore froid, ni soif. Mais j’ai mal. Mal à mes doigts absents sur ma main droite. Mal à ma mémoire vide. Mal à mes ailes déchirées à mes crocs ébréchés à mes griffes élimées à mes membres épuisés. Mal mais pourtant je suis en vie et je sens mon cœur qui bat, qui continue de faire ce pour quoi il est là.

Et moi, pourquoi je suis là ? Pour quoi ? Le vent autour de moi et la douleur n’empêche pas mon esprit d’être beaucoup plus clair que d’habitude, beaucoup trop clair. Je tourne la tête et je vois des fleurs tardives et les fleurs me rappellent le parfum et le parfum me rappelle le visage et le visage me rappelle la souffrance d’avoir oublié le nom de ce visage. Sous le visage il y a une fleur mais je ne sais pas laquelle ni pourquoi elle est là ni le nom du visage au-dessus de la fleur et ma main me fait mal, mal, mal, presque autant que l’oubli.

Pour oublier ma main je suis le visage je vais là où il m’emmène, je regarde ses lèvres parler mais je ne comprends plus ce qu’elles disent, peut-être qu’elles m’appellent, qu’elles me disent qui je suis alors que maintenant j’ai oublié et je n’arrive pas à comprendre quand le visage me le dit.

Une feuille morte atterrit sur mon visage et une autre sur ma main et l’éclair qui traverse la main me transperce et me fait hurler si fort que le visage dont j’ai oublié le nom hurle aussi en crachant et en sifflant vers moi. Et le visage m’insulte et devient rouge de colère mais les yeux sont écarquillés de peur et je ne comprends toujours pas ce qu’il me dit jusqu’à ce qu’il prononce le dernier mot dont je me rappelle et qui me gifle les oreilles, la mémoire, la conscience, le mot qui devient plus douloureux que la douleur dans ma main.

Et je sens des larmes couler le long de mes joues et ruisseler sur le visage qui maintenant a plus peur qu’il n’est en colère mais ce n’est déjà plus le même visage, je ne me rappelle pas non plus de son nom mais il est important aussi et mes larmes coulent et je voudrais supplier mais je ne connais plus les mots je ne connais plus que le mot et quand je le dis c’est pour poser la question est-ce que je suis vraiment devenu le mot est-ce qu’il n’y a plus rien d’autre est-ce que dans mes souvenirs je ne peux pas trouver d’autres mots pour être ceux-là ?

Alors mes souvenirs déferlent comme les feuilles mortes qui tourbillonnent et ces souvenirs sont muets, sourds, ils hurlent mais ne connaissent pas de mots, ils ne connaissent que la violence et la peur et la faim et la soif. Aucun autre mot ne se trouve dans ma mémoire alors je repousse le visage de ma main difforme et son dernier cri résonne du dernier mot qui remplit mes oreilles mes larmes mon cœur et ma vie.

Monstre.


Jour 6 :

Un Cauchemar – Grasse nuit – Tempête – Soif – Ruine – Mille-pattes/Serpent – Exploration (Ce que tu découvres doit être scellé)

Je ferme les yeux en m’abandonnant à la nuit, la bouche sèche et les membres endoloris.

Quand je me réveille dans cet autre monde, celui où le paysage change quand je ne le regarde pas et où tout paraît plus proche mais disparaît quand on le touche, j’ai encore la langue pâteuse alors je cherche à boire, de l’eau, de la mousse ou du sang, peu importe si je peux le boire. Alors j’avance, lentement, à tâtons, en sachant que je ne me déplace pas vraiment même si bientôt je vais aussi oublier ça et j’aurai l’impression que tout est réel et peut-être que j’oublierai de revenir dans l’autre monde mais pour l’instant je marche en cherchant à boire tandis qu’autour de moi commence à se dessiner un village, des habitations, je ne les regarde pas trop fort parce que j’ai peur qu’elles disparaissent ou qu’elles changent ou que je les reconnaisse.

Enfin je le vois, comme si j’avais su qu’il serait là alors que je ne connais pas cet endroit, enfin je vois cette chose dont j’ai oublié le nom mais on les construit, c’est solide c’est profond et il y a de l’eau dedans, alors je m’en approche, je ne cligne pas des yeux sinon il ne sera plus là et il n’y a personne dans le village mais je me penche vers là où il y a de l’eau, par-dessus le petit mur de pierre. Je vois l’eau, là, en bas, et je tends la main pour l’atteindre, je tends, je me penche, je tends et d’un coup mes pieds ne touchent plus le sol et je tombe, je tombe, je tombe, les pierres m’entourent alors qu’elles montent à toute vitesse autour de moi mais l’eau descend en même temps que moi puis elle disparaît et il fait noir.

Je ne tombe plus. J’ai toujours soif. Autour de moi sont les ruines d’une ancienne ville. Je ne vois pas le ciel alors je me dis que je dois vraiment être tombé sous terre et je commence à trembler de froid et de peur parce que je ne sais pas si je pourrais remonter. Je ne vois pas le ciel mais il ne fait pas noir parce qu’une sorte de lueur rouge éclaire les ruines comme si elles étaient encore en flamme.

J’avance entre les maisons détruites que la végétation recouvre déjà dans un réseau de lierre, de fougères et de ronces. Je ne reconnais rien et je ne sais pas lire ce qu’annoncent les panneaux, qu’ils soient encore debout ou détruits eux aussi. Je réalise que je suis seul dans ces ruines au moment où je vois les premiers corps au sol. Coquilles vides aux yeux ternes et aux visages tous identiques car la mort n’a qu’un seul visage et il est vide, seul, monstrueux, même quand les corps sont étalés en pagaille, amoncelés sur les ruines et sous les ruines et dans les ruines et tous ces corps qui commencent à pourrir et à être dévorés par la végétation me donnent envie de vomir et de pleurer alors j’oublie que j’ai soif.

Tout à coup j’entends que tout est silencieux parce qu’il y a un bruit qui a brisé le silence, il venait de partout en même temps alors que la lumière rougeâtre vire vers l’orange et devient plus vive et je vois les ronces rétrécir et le lierre reculer, je vois autour de moi les ruines qui deviennent moins ruines, et alors je vois les corps se relever et ce ne sont plus des corps mais des comme-moi et la lumière c’est celle de leurs torches qu’ils tiennent à bout de bras pendant qu’ils dansent dans une longue procession qui passe dans toutes les rues.

Mais dans cette danse sous les torches, dans la ville à nouveau debout, je vois leurs yeux ternes et vides, je vois leurs bouches déformés dans des cris que je n’entends pas mais que je sens faire vibrer le sol et l’air autour de moi. Un partie de la procession se rapproche et je commence à reculer, je m’éloigne je fuis je cours mais la procession est partout et toutes m’observent avec leurs yeux vides, toutes les bouches hurlent silencieusement vers moi et quand je cours je n’avance pas et une main finit par se poser sur moi et me saisit et me serre et m’emmène dans la procession alors que je tremble, je pleurs, je voudrais me cacher mais toutes ces torches éclairent beaucoup trop et la végétation est partie et il n’y a plus d’ombre, plus de recoins, plus de cachettes.

Je suis le seul monstre vivant dans un groupe de monstres morts, mais ils continuent d’avancer en mouvements saccadés, comme une marée de marionnettes qui m’emporte dans leurs hurlements silencieux.

La lueur des torches devient encore plus vive et alors que je me dis que je crois revoir le ciel, un ciel de roche et de terre au-dessus de cette ville, d’un seul coup tous les cadavres dansants autour de moi balancent leurs torches au hasard dans toutes les directions. Je vois les flammes volantes décrire un arc de cercle qui me paraît sans fin, puis elles s’écrasent partout, sur les maisons les gens les rues et tout s’enflamme et tout s’embrase et moi je brûle, je hurle, je cours sans but, j’ouvre les yeux et j’ai soif.


Jour 7 :

Des Mégalithes – Noire nuit – Pluie – Maladie Physique – Égrégore – Humus/Marais – Exploration (Confirme la Certitude)

Ça pue. Mon nez se fronce avant que mes yeux ne voient d’où ça vient à travers la nuit. Ça pue la mort et la décomposition, ça pue la vase et la pourriture, ça pue la grenouille, l’humidité, l’eau sale, l’urine, le roseau moisi, la terre noyée à en crever, ça pue la puanteur d’un marais.

Je ne me souviens pas être déjà venu mais j’oublie parfois mais une puanteur pareil je n’oublierai pas c’est impossible mon nez s’en souviendrait parce que mon nez oublie beaucoup moins que moi. Ça pue, ici, ça pue plus fort que ma sueur ma peur mon odeur, ça pue plus fort que ma blessure purulente à la main, mes phalanges restantes tellement enflées par le pus les croûtes et le sang que je ne peux rien bouger et ça empeste tellement qu’en comparaison presque je n’ai pas mal mais ici le marais pue plus fort que ma main alors pour me rappeler ma main me fait mal à nouveau et j’ai l’impression qu’elle explose à chaque battement de mon cœur, j’ai l’impression qu’à chaque fois la peau et les croûtes pourraient céder et tout dégoulinerait le pus le sang la peau la chair même les os et alors je n’aurai plus mal parce qu’il n’y aurait plus nulle part où avoir mal.

Mais ma main puante reste douloureusement accrochée à mon bras et chaque battement de mon cœur est comme un coup de corne pile entre les doigts, comme la dernière fois où j’ai eu tellement mal que je ne me rappelle que de la douleur, je ne me rappelle même plus que c’est moi qui avait mal.

Tout ce temps, j’avance sans y penser, je ne peux pas penser par-dessus la douleur, j’avance sans y penser dans le marais où l’eau puante me remonte jusqu’aux genoux et mes pas sont lourds, lents, bruyants et ils remuent la boue qui pue encore plus fort. Je me rends compte que j’ai avancé seulement quand j’aperçois devant moi une grande pierre très lisse éclairée par les étoiles, tellement lisse que j’ai l’impression de voir à travers et j’ai l’impression que c’est fragile et je pourrais la casser juste en la touchant et j’ai l’impression aussi de me voir dedans mais je ne sais pas ce que je suis alors c’est peut-être quelqu’un d’autre que moi.

Soudain comme si la lune était sortie de derrière les nuages la surface de la pierre devant moi devient beaucoup plus claire et je vois qu’elle va jusqu’au sol, plutôt jusqu’à l’eau, où elle s’enfonce à la verticale et je vois aussi qu’elle est taillée en un rectangle pointu très très lisse et je ne me vois plus dedans mais la lumière se reflète autour et je vois très bien à travers ou alors je vois un reflet de là où je suis mais je n’y suis pas.

Toujours sans y penser et sans comprendre, je lève mon bras où est ma main blessée et le tends vers la surface et loin de moi, loin de moi la douleur, loin de moi la puanteur la pourriture la putréfaction et enfin ma main touche la surface lisse et je la vois dans la lumière, la lumière froide qui éclaire le cristal et ma main n’est pas sur le point d’exploser, il me manque juste des phalanges mais ma peau est de la couleur de la peau et le pus n’est pas là et les croûtes sont parties et la douleur a disparu.

Alors je me rapproche de la pierre taillée, je la touche de tout mon corps et sens son contact froid contre ma peau chaude et trempée et je me baigne dans la lumière en fermant les yeux et en remuant ma main et je sens que je n’ai plus mal et je remercie la surface du cristal de m’avoir guéri ou de m’avoir rappelé que j’étais guéri ou de m’avoir fait oublier que j’étais blessé. Mais alors sans savoir pourquoi, mes yeux s’ouvrent et je me vois à nouveau sur la surface de la pierre, baigné dans la lumière froide et cruelle.

Je vois mes poils de tête longs et emmêlés, je vois ma bouche béante indéfiniment sans un mot, je vois mes oreilles transpercées par des crocs et en lambeaux je vois ma peau couturée de cicatrices de furoncles et de plaies je vois mes membres rachitiques osseux anguleux trop grands trop maigres je vois mes dents mes crocs qui déchirent et déchiquettent et me nourrissent et je vois mes mains qui tuent qui étranglent qui broient qui assassinent qui détruisent mes mains de bêtes et de prédateurs.

Et je vois mes yeux. Mes yeux qui me voient en retour, minuscules au milieu de cernes mais brillants dans la lumière, brillant de cette lueur de compréhension de reconnaissance de cet instant d’intelligence où je vois que je me vois et je vois que ces yeux font partie de ce corps et ces yeux sont les miens donc ce corps c’est le mien, ces mains ces plaies ces os ces membres ces blessures sont les miennes et ça n’a plus rien d’humain. Ça n’a plus rien d’humain, ce corps n’a plus rien d’humain, je n’ai plus rien d’humain que ces yeux là pour me reconnaître et voir que je n’ai plus rien d’humain.


Jour 8 :

Tanière d’une Divinité Horla – Crépuscule – Brouillard – Manque causé par l’oubli – Ruine – Mousse – Introspection (Sérénité)

Je marche, je réponds à l’appel qui vient du cœur de la forêt qui est dans mon cœur, j’enjambe avec une assurance animale les ronces les racines les terriers, baignés dans la lumière violette du crépuscule. Je sens chaque fibre de mes muscles attirée par cet appel, résonnant, répondant, me portant toujours dans une direction que j’ai oubliée mais dont mon corps se rappelle.

Le soleil se couche et le brouillard se lève, mais mon corps animal n’a pas besoin de mes yeux d’humain pour se repérer alors j’observe, je m’assoie spectateur dans moi-même et je regarde où je me porte avec tant de détermination.

Enfin émergent du brouillard des formes anguleuses, des structures bizarres et changeantes, qui disparaissent quand je m’en éloigne et que je ne touche pas alors que je le voudrais parce qu’elles pourraient peut-être me parler, me dire leur nom, me dire où je suis où je vais qu’est-ce qui m’appelle au-dedans du brouillard, mais mon corps continue sa route à travers ces formes et je me résigne à attendre.

Après un temps infini à marcher dans un brouillard perdant définitivement les dernières couleurs du jour et s’enveloppant dans la froide aube des étoiles, je sens mon corps ralentir et je vois devant moi une structure plus grande que les autres apparaître, qui paraît plus vieille parce qu’elle est couverte de mousse.

Alors je qui est un monstre lève lentement la main et touche la surface mousseuse et douce mais froide humide et cruelle, et je qui est humain sens tout à coup l’appel résonner tout entier dans mon cœur qui est dans la forêt. L’appel est doux mais terrible et murmuré mais assourdissant et attirant mais horrifiant et il est là. Je sens alors comme si plein de minuscules parties de mon corps ou de mon cœur ou des deux ou d’autre chose se levaient soudainement de là où elles font partie de moi et se mettent à danser en rythme avec la voix de l’appel dans une longue procession qui tourbillonne et chatouille tous mes membres et tout mon cœur comme des papillons ou des mouches qui s’envolent ensuite, sans retour, une par une, loin de moi.

Mes yeux humains pleurent des larmes que je ne comprends pas parce que ma mémoire humaine ne sait pas, ne sait plus ce qu’il se passe, je me concentre pour comprendre, j’observe je cherche et je réfléchis comme je ne l’ai pas fait depuis depuis depuis depuis depuis plus longtemps que ça encore, parce que j’ai vu mon reflet je m’y suis reconnu et je me suis rappelé que j’avais été humain que j’avais eu un nom que j’étais né j’avais grandi j’avais mangé pas toujours à ma faim mais j’avais mangé chaud et je me rappelle de tout ça mais je ne me rappelle pas du nom que j’avais ni de là où je suis né ni du visage avec qui j’ai grandi, ni du visage à la fleur qui me regarde en pleurant et en criant.

Alors enfin je comprends pourquoi mes yeux pleurent, parce que j’aperçois un de ces morceaux de moi qui est en train de me quitter et j’aperçois que c’est un souvenir, un souvenir que je qui est humain avait oublié et que je qui est un monstre avait gardé en nous précieusement. Je comprends que ces souvenirs étaient encore en moi mais que ces souvenirs s’étaient infectés, ils ont été cachés trop longtemps ils ont pourri ils ont moisi ils ont été bouffés par les rats du brouillard de la mémoire alors l’appel a résonné et nous sommes venus jusqu’ici pour nous débarrasser de toutes ces blessures mémorielles qui font mal et qui font peur.

J’observe impuissant mes souvenirs moisis être jetés à la poubelle de la mémoire et je perçois un instant ce qui émet l’appel ce vers quoi mes souvenirs vont ce qui les aspire les attire. Un humain avec des mains griffues des pieds de géant un grand sourire et les yeux écarquillés de terreur, une forme humaine que je vois danser avec mes souvenirs qui lui donnent envie de danser, sourire à mes souvenirs heureux, être apeuré par mes souvenirs de peur et griffer sauvagement et piétiner violemment mes souvenirs sauvages tandis que je regarde.

Alors enfin j’entends et je sens mon dernier souvenir s’enfuir vers cet être indéfini, je sens cet être le prendre dans sa main et le regarder avec terreur et lui sourire avec bienveillance et le caresser de ses griffes mortelles puis faire une pirouette en riant et me renvoyer le souvenir vers moi en hurlant.

Je reçois le souvenir, sain, entier, purifié de l’oubli et de la moisissure et il se blottit au fond de mon cœur comme un chat venant se lover au chaud. Alors le souvenir du visage à la fleur et les larmes, parce que c’est lui tout ce qui me reste, se met à ronronner en moi, chaud et rassurant.


Jour 9 :

Un Cimetière – Aube – Pluie – Faim – Emprise – Asticot/Larve/Chenille – Péripétie (Occasion de progresser → Ta quête est changée du tout au tout)

La lumière qui point à l’est chasse la nuit, pourchasse les ombres et mes doutes. Alors les ombres se cachent dans les recoins et mes doutes se cachent dans les ombres mais j’y vois clair et j’avance en me laissant porter par mon instinct humain. J’avance à grands pas entre les arbres, me tenant plus droit que je ne l’ai fait depuis longtemps, depuis que j’ai vu le visage à la fleur la dernière fois. J’avance droit en oubliant mes doutes en oubliant mes membres endoloris en oubliant mes cicatrices mal refermées en oubliant la faim qui creuse mon ventre.

J’entends le gargouillement d’un ruisseau dévalant la pente douce entre les arbres et les buissons et les fleurs et je le rejoins et je me penche doucement sur le ruisseau et je bois avec ma main valide et ma main blessée en coupe. L’eau est fraîche. Quand je relève les yeux je vois un petit tas de pierres entre les racines d’un arbre très vieux, un petit tas posé là pas par hasard et j’ai l’impression que je le connais alors je m’en approche, je l’observe, je le renifle, je le touche du bout des doigts, doucement, comme si j’avais peur qu’il disparaisse mais il fait jour alors je n’ai pas peur.

Sous ma main la pierre est tiède et j’ai un doute mais elle semble bouger alors je la saisis un peu plus et je sens bien qu’elle bouge, qu’elle remue, qu’elle se craquelle petit à petit. Alors je soulève la pierre et la laisse reposer sur ma paume ouverte de ma main valide et je la regarde attentivement pendant que des craquelures se dessinent comme un œuf en train d’éclore.

J’observe, je sens que je devrais trouver tout ça étrange mais tout à l’air tellement plus rassurant dans la lumière du jour, je n’ai pas peur pendant que l’oeuf-pierre remue et émet des petits bruits de craquements, de chuintements. Un craquement plus fort annonce le fendillement de la surface de la pierre le long de toute la face supérieure, séparant cette surface en deux parties qui s’éloignent lentement l’une de l’autre comme deux couvercles, glissant sur le reste de la pierre qui remue aussi de plus en plus. Alors les deux moitiés de la surface de l’oeuf-pierre, s’ouvrant lentement, se déploient en deux ailes de pierre si fines que je vois à travers et quand je regarde le reste de la pierre je réalise que c’est un papillon de roche gros comme ma tête qui se tient dans ma main, libérant ses dernières pattes de la position recroquevillée, larvesque dans laquelle il était lorsqu’il était encore une pierre sur un tas de pierre.

Puis le papillon frémit, frétille, étend ses pattes et ses ailes et s’envolent, léger et gracieux comme s’il était pas beaucoup trop gros et né d’une pierre au contact d’un monstre. J’entends alors d’autres craquements et je vois que toutes les pierres du tas de pierres sont en train d’éclore et de s’étendre et de devenir des papillons de pierre et de s’envoler dans un frétillement de légèreté et de délicatesse.

Perdu dans la fascination je mets beaucoup de temps avant d’entendre ce qui approche derrière moi alors que ça n’essaie pas de se cacher et que ça ne m’a pas encore vu. Mais alors j’entends quelque chose marcher sur une feuille morte ou un brindille et je sursaute et j’ai peur et mon cœur bat fort et vite dans ma poitrine mes yeux cherchent où me cacher mais le jour, la lumière cruelle m’empêche de trouver un recoin sombre alors je me cache derrière le vieil arbre au tas d’oeufs-pierres qui n’est plus là et je regarde ce qui arrive en tremblant.

Un humain, non, deux, sont en train d’arriver vers le ruisseau, presque droit vers moi, vraiment droit vers moi, alors je me ratatine encore un peu et je les entends qui s’approchent puis qui s’arrêtent et qui parlent, je sais qu’ils parlent et qu’ils sont humains et je sais que ce sont des mots que j’entends parce que le souvenir du visage à la fleur et aux larmes me le dit mais je ne comprends pas ce qu’ils disent ni qui ils sont.

« Jo, le cairn, il est plus là ! » « Allons bon, qui est-ce qui a fait ça ? » « Je sais pas- Attends, tu as vu ça ? »

J’entends la surprise la peur dans leur voix alors j’ai peur parce que je me dis qu’ils m’ont vu et vont me trouver me chasser et me blesser, que peut-être c’est la Bête qui les envoie pour me tuer enfin.

« C’est toi qui a touché au cairn ? »

La créature me regarde et s’approche vers moi l’air terrifiant, menaçant, terrifié, je me recroqueville encore, tellement que mes genoux me rentrent dans les côtes mais je vois bien que c’est trop tard pour me cacher.

« Allez, montre-toi ! » « Mark, attends, on dirait… »

Alors je me tends, je serre les poings et je serre dans ma main une pierre alors quand la créature fait encore un pas vers moi je bondis sur mes pieds en lançant la pierre de toutes mes forces et je la vois voler à toute vitesse et atteindre le front les sourcils le nez et l’œil de cette créature-humain et immédiatement elle chancelle, elle crie, elle saigne, des jets de sang partent de son visage et elle tombe en arrière vers le ruisseau alors je me jette sur l’autre créature qui tends ses griffes vers moi pour me menacer.

« Non, attends ! Mark… »

Je profite qu’elle tourne la tête vers l’autre pour lui sauter dessus la faire tomber à son tour, la griffer au visage au corps lui arracher les cheveux, la mordre aux joues à l’épaule au torse et elle se débat mais la douleur l’empêche de réagir et la peur me rend plus fort, alors je laboure de mes griffes ses yeux ses côtes ses cheveux puis je me penche et je la mords, plante mes crocs très fort dans son cou et je sens le sang chaud, salé, qui jaillit tout de suite à travers la peau sans poil dans ma bouche et mes yeux et la créature pousse un cri terrifiant, monstrueux et je me relève et je la regarde gigoter, se vider de son sang qui jaillit qui s’écoule qui rougit le sol le ruisseau les buissons les fleurs, à chaque battement du cœur déjà presque vide je vois la mare de sang s’épaissir et grandir et les yeux, les yeux de la créature me fixent et m’observent et me voient et avant de mourir j’ai l’impression qu’ils me reconnaissent parce que la créature essaie de faire du bruit avec sa bouche mais n’y parvient pas et elle se secoue encore un peu et je la regarde mourir, mourir, mourir, j’attends le moment j’attends le souvenir j’attends de comprendre parce que c’est la première fois que je tue une créature-humain alors je veux voir son souvenir.

Je regarde la créature mourir et j’ai faim, j’ai faim du goût de son sang et j’ai faim de sa chair et j’ai faim de son souvenir alors quand enfin son cœur s’arrête et le flot de sang qui s’étend jusqu’au ruisseau cesse de grandir, je ferme les yeux pour mieux voir.

Et alors je vois. Je me vois. Moi qui suis humain. Je me vois c’est moi, moi qui suis humain la créature-humain me connaissait et m’avait vu, comme le bébé cerf mais là c’est moi qui suis un bébé dans le souvenir et d’un coup le souvenir s’arrête en me laissant m’effondrer au bord de l’inconscience, tremblant du contrecoup du souvenir de ce que j’y ai vu de ce que j’y étais.

Je reprends conscience quand j’entends une vois au loin. La voix du visage à fleur. Je la reconnais et je sens mon cœur sur le point de s’arrêter tellement le souvenir est douloureux quand il s’éveille, mais la peur reprend le dessus et j’entends la voix qui appelle à nouveau. Je vois le cadavre de ma mère devant moi et mon père en train de reprendre conscience dans le ruisseau mais encore complètement sonné alors avant qu’il ne soit trop tard avant que le visage ne puisse à nouveau me voir et pleurer et hurler je pars je fuis je veux disparaître et ne jamais revenir ne jamais revenir jamais revenir.

FIN


Fiche de Personnage :

Destin fatal : Je tuerai mes parents, ou ils me tueront

Chasser : Je chasse les souvenirs, le passé, la Bête et la nourriture

Se faire chasser : La Bête est toujours à mes trousses

Question : Qui suis-je ?

Certitude : Je suis un monstre

Croyance : J’ai été humain, autrefois

Vertu : J’ai peur

Vice : J’ai faim

Souvenir qui hante : Un visage

Symboles : Noir/Ombre - Griffes/Crocs

Quête : Je ne veux plus être moi



Commentaires de Thomas :

Un grand merci pour cette partie solo ! Cela m'a fait un grand plaisir de voir une partie entière de Bois-Saule en textuel, de surcroît rédigée avec un souci littéraire !

Mes commentaires :

A. « Alors je dors enfin, réchauffé par la mare du sang du cerf et par son corps encore chaud qui refroidit à côté de moi. Alors je ferme les yeux avec force parce qu’après ça je sais qu’il n’y aura pas de rêve. »
On sent bien le réconfort / coup de théâtre

B. « Les poils, les muscles, le sang, le tripes, les os, tout se mélange et tout se brise sous mes crocs. Quand ça atteint mon estomac, le souvenir qui me heurte est noir, rempli de bruits et d’odeurs mais la chauve-souris était jeune alors le souvenir n’est pas très fort et maintenant j’ai moins faim. »
Vraiment super de tenir compte de la loi du souvenir et très bien traité !

C. « Ça pue. Mon nez se fronce avant que mes yeux ne voient d’où ça vient à travers la nuit. Ça pue la mort et la décomposition, ça pue la vase et la pourriture, ça pue la grenouille, l’humidité, l’eau sale, l’urine, le roseau moisi, la terre noyée à en crever, ça pue la puanteur d’un marais. »
J'adore :)

D. «  j’avance en me laissant porter par mon instinct humain »
J'adore l'expression !

E. « Puis le papillon frémit, frétille, étend ses pattes et ses ailes et s’envolent, léger et gracieux comme s’il était pas beaucoup trop gros et né d’une pierre au contact d’un monstre. J’entends alors d’autres craquements et je vois que toutes les pierres du tas de pierres sont en train d’éclore et de s’étendre et de devenir des papillons de pierre et de s’envoler dans un frétillement de légèreté et de délicatesse. »

L'image de l'éclosion des papillons de pierre est super cool et tout à fait typique de l'emprise.

F. Très bonne chute :) Et je vois que ça raccorde au destin fatal !

G. Plutôt habile d'avoir mis la feuille de personnage en dernier, çà nous réserve de la surprise. Je constate par ailleurs que tu l'as très bien exploitée.
Outsider. Énergie créative. Univers artisanaux.
Ma page Tipee.
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