Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

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scorpinou
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par scorpinou »

Dans mes recherches sur la criminalité, je suis tombé sur une mine de renseignement :
http://www.xavier-raufer.com/archives/mcc/

C'est austère, mais riche :)
Rosco
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par Rosco »

Plus c'est gros plus ça passe
cette semaine....

un négociant en métaux à été escroqué, il a achté du cuivre en turquie, 6000 tonnes, la cargaison a été controlé en turquie, arrivé en chine, le cuivre est devenue du caillou peint en couleur cuivre
different articles sur l'affaire
https://www.leprogres.fr/faits-divers-j ... es-peintes
https://www.leprogres.fr/faits-divers-j ... es-peintes
Gork est « brutal mè ruzé » et son frère Mork est « ruzé mè brutal »
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JoKeR
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par JoKeR »

Bonjour à tous et à toutes. Alors le crime organisé et la mafia en particulier c'est un de mes dadas que j'ai pas mal poussé à la fac (jusqu'à préparer un master sur le mouvement anti mafia de Palerme sans aller au bout du truc). Clairement ce qu'on en voit dans la culture populaire est rarement intéressant si on veut du crédible. Par exemple COPS et Shadowrun sont complètement clichés (tout en partant de quelques infos réalistes comme les noms et les organigrammes).

SI je devais résumer les plus gros clichés et erreurs sur les mafias (organisations larges, hiérarchisées, avec leur propre culture, un contrôle territorial, une règle du silence - "omerta"- punie de mort en théorie et des relais dans le monde officiel des affaires et de la classe politique, pour faire vite) :

- elles ne sont pas d'ancestrales organisations mystiques. La mafia ne date pas des vêpres sicilennes au moyen âge, le yakuza ne date pas du shogunat Togukawa, les triades ne remontent pas à d'antiques sectes boudhiste anti madnchoues. On peut remonter leur trace historiques et elles ne viennent pas de la grande misère violente du bas peuple mais d'associations criminelles impliquant la bonne société dans des zones prospères comme Palerme à la fin du XIXème.
Par contre elles fonctionnent en empruntant au registre des sectes avec initiation et tout le tointoin visant à ce que le membre soit mafieu avant toute autre chose (donc ses liens sociaux autres : famille, état, localité, etc. passent au mieux au second plan).

- Les différentes cellules collaborent entre elles à peu près autant qu'elles s'affrontent. Les "capo di tutti capi" sont chose rare. On retrouve plus souvent des "commissions" qui sont un organe de concertation plus que de direction, ou alors la forme que prend la domination de telle ou telle faction sur les autres. Pour beaucoup il n'y a pas d'instance officielle supervisant toute l'organisation mais juste des réseaux informelles entre les chefs (pas de commission de la Camora napolitaine par exemple).

- Elles ne sont pas toutes puissantes et doivent leur pouvoir à des accords avec certains individus ou groupe aux plus hauts échelons du monde politique et économique. Donc si elles font n'importe quoi ça se retourne contre elle (cf Cosa Nostra sicilienne qui se met à tuer des juges dans les années 1990 et manque de disparaître dans la décennie.

- Comme le disait Falcone (célèbre juge anti mafia mort en 1992) "c'est quand la mafia ne tue pas qu'elle est la plus dangereuse." Autrement dit quand tout va bien pour elle personne ne parle de la mafia. Jusque dans les années 1990 il y avait des juges siciliens qui niaient l'existence même de Cosa Nostra.

- Les mafieux ne respectent pas plus leur code de l'honneur que nous ne respectons nos valeurs morales, que nos hommes politiques respectent les lois et leurs serments et que les patrons d'entreprise respectent la libre concurrence. C'est un code moral et organisationnel : un moyen de contraindre les autres, de se reconnaître entre soi, d'instaurer une confiance relative et donc des accords plus pérennes et rentables que ceux des milieux criminels non mafieux. Mais plus on est puissant plus on peut s'en affranchir. L’interdiction de tuer des enfants de Cosa Nostra par exemple sert à ne pas avoir une mauvaise image dans la société. Mais les instances dirigeantes n'hésitent pas à le faire quand ça leur sert (intimidation de témoin, guerre de factions ou punition de repentis), comme l'histoire mentionnée en début de fil. 
Par exemple Toto Riina, le chef des Corléanais dans les années 70-80 a fait virer un de ses principaux concurent à cause du traffic de drogue... pour s'emparer du dit traffic une fois devenu capo di tutti capi. Bref ils sont aussi "honorables" que les chevaliers de Game of Throne.

- Une mafia n'est pas complètement hégémonique sur le crime du territoire qu'elle contrôle. Elle a même tout intérêt à ce qu'il y aie de la criminalité non mafieuse parce que comme ça elle se sert de ses réseaux d'info pour négocier avec la police. Et c'est un vivier de recrutement.

- la mafia ne recrute pas que dans les classes populaires. Quand les carabiniers siciliens arrête Rotolo, un des principaux boss des années 2000, ses deux principaux lieutenant sont respectivement entrepreneur et neurologue. Ici comme ailleurs on trouve plus de gens riches, bien éduqués et héritiers dans les hautes sphères.
Dernière modification par JoKeR le lun. avr. 05, 2021 6:24 pm, modifié 1 fois.
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JoKeR
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par JoKeR »

Côté sources si vous êtes motivés en français je vous conseille "Un pouvoir invisible" de Jacques De-Saint-Victor. C'est du travail d'historien tout en restant digeste, ça brasse large avec un focus sur l'Italie (mais aussi US, russie post soviétique, japon et extension italienne en europe). En fin de bouquin il parle aussi des liens avec la finance mondiale.

Vous pouvez aussi aller voir du côté de Salvatore Lupo, grand historien de Cosa Nostra. "Histoire de la mafia, des origines à nos jours."
Sa théorie du "power syndicate / business syndicate" est aujourd'hui retravaillée ou contestée mais elle reste une bonne base. L'idée c'est que la mafia a deux aspects : le power syndicate contrôle le territoire. C'est la mafia hiérarchique et militaire. Le business syndicate c'est la mafia des réseaux, notamment de drogue. Tout les mafieux de Cosa Nostra sont affilié à un power syndicate mais libres de faire du busines comme ça leur chante tant qu'ils font ça dans les règles. En général on est haut placé dans l'un ou l'autre. Busceta, le témoi clé du maxi procès de palerme etaité très puissant dans le business syndicate mais avait un rang de soldat de par ailleurs.

Je viens de lire "la mafia sicilienne de 1860 à nos jours" de John Dickie et c'est très intéressant, surtout le début parce qu'il cherche pas à épargner qui que ce soit. Et parce qu'il essaie de montrer ce que vivent les mafieux au quotidien et pas seulement la chronique de leurs activités criminelles.

Gomora de Saviano c'est vraiment excellent, c'est explicatif et sensible et ça montre beaucoup d'aspect culturel ou quotidien. Par contre le film est une trahison totale de l'oeuvre. C'est complètement esthétisé et ne parle que de trucs anecdotiques, voir change des faits et donc le sens de ce que le livre raconte. Après ça reste un beau film.

The Wire c'est BIEN, surtout la première saison pour le inside des gangs, la seconde pour les relations gangs / réseaux mafieux, la troisième et la quatrième pour le recrutement et la guerre de gangs. Mais c'est pas de la mafia.

Broadwalk Empire la première saison est très intéressante.

The Irishman est suspect en terme de véracité mais très intéressant en matière d'ambiance et de recrutement.

Côté jdr j'aime bien Hellywood parce que sans rentrer dans les détails on voit bien que la criminalité organisée ne se limite pas à la mafia et qu'elle n'existe qu'en alliance avec les autres pouvoirs de la ville.
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Ravachol
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par Ravachol »

Connaissez-vous la "Guerre des Sukas" ?

Les "voleurs dans la loi" (les vor v zakon) est une branche de la mafia russe apparu dans les années 30. Leur crédo était de respectait "la loi", un ensemble de traditions et de codes propre aux voleurs, et de ne pas se mêler de politique. Aucun contact avec les autorités.
Mais voila, durant la deuxième guerre mondiale, Staline propose aux prisonniers une amnistie si ils acceptent de combattre dans l'armée. C'est contraire aux principes, mais certains acceptent. Manque de bol pour eux, Staline n'est pas vraiment du genre à tenir ses promesses, et à la fin de la guerre, ils retournent dans les goulaks.

Ces "balances" (sukas en russe) sont très mal accueillie. Débute alors une guerre des gangs qui va durer plus de 10 ans.
Les sukas sont moins nombreux, mais se sont affranchis des règles. Collaborer avec les matons par exemple, n'est plus tabou. Ils obtiennent des postes à responsabilité, comme chef de baraquement, et usent de leur influence pour riposter.
Ce sont finalement les sukas qui "gagnèrent" la guerre. Après 1956, la déontologie des voleurs russes a donc complètement changé.
J'ai diplomatie comme compétence. Ça fait combien de dégâts ?
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JoKeR
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par JoKeR »

La réthorique de "avant on avait un code mais aujourd'hui il n'y a plus de règles, les nouveaux aux commandes ne respectent rien" se retrouve dans toutes les mafias et à toutes les époques. On idéalise le passé pour se justifier et dire que c'est les jeunes qui déconnent. Le point commun des nouveaux sans déontologie / honneur/ loi / ... est souvent d'être les nouveaux boss. Et le points communs des critiques est souvent de parler publiquement ou de collaborer avec la justice (contraint ou par intérêt dans la plupart des cas).

Par exemple Tomaso Busceta arrêtait pas de dire que les Corléonais ne respectaient plus rien. Et il est vrai qu'il y avait des nouveautés dans leur façon de faire, des règles nouvelles, d'autres abandonnées. Mais fondamentalement c'était la mafia et son utilisation centrale de la violence et de l'intimidation comme outil d'acquisition du pouvoir et d'accumulation d'argent. Et quinze ans plus tôt c'est Buscetta lui-même et ses comparses qui changeaient les règles du jeu en déclenchant une guerre des gangs, en se lançant dans le trafic de drogue sensément interdit à partir de ses réseaux de trafic de clopes et instituait la "Coupole" (ou commission inter province) pour cour circuiter le pouvoir des boss au profit des trafiquants.

Autre légende : les mafieux qui ne parlent jamais aux forces de l'ordre et à l'état. En fait ils le font tout le temps. Mais pas tous, seulement les boss, souvent par l'intermédiaire de  notables ou de bureaucrates ou directement pour discréditer ou "vendre" leurs ennemis dans l'organisation.

Pour reprendre la question russe : les vory v zakone se sont développé et organisés à la fin de la russie tsariste dans un contexte qui n'est pas sans rappeler la Sicile, le mezzogiorno italien, Hong Kong ou le japon de l'ère Meiji : industrialisation ultra rapide sans réseau bourgeois / affairiste stable dans un état autoritaire affaiblit. Du coup les "entrepreneurs de violence" marchaient bien. Et là comme ailleurs ils se sont opposés aux bolchéviks, car les communistes (au sens large) ont toujours posé un grave problème aux mafieux : ils organisent le prolétariat et le peuple contre l'état, ce qui fait que les mafieux ne peuvent plus 1/ servir d'intermédiaire 2/ recruter 3/ exploiter des groupes sociaux traditionnellement désorganisés.
Mais du coup dès cette période ils avaient des accords avec la police politique et des entrepreneurs et aristo sans scrupules.
En conséquence de quoi avec l'URSS ils se sont retrouvé au goulag avec les "blancs".

Puis il y a l'épisode que tu racontes. Mais c'est plus une guerre de factions que de "tradition".

Par la suite les vory ont "prospéré" (autant que faire se peut) dans les goulags tandis que des réseaux de marché noirs se structuraient à l'extérieur. Avec la perestroika ceux-ci ont eut le vent en poupe alors que les vory commençaient à sortir des camps. Ca a pas mal chauffé avant que les accords se trouvent et les nouvelles alliances se forgent. Mais ils ont vite eut mieux à faire que de se taper  dessus. Quand l'URSS est tombée tout les russes se sont retrouvé avec des "parts" de l'état et leur rachat s'est fait dans des conditions scandaleuses avec plus d'extorsion et d'arnaque que d'autre chose. Les mafieux se sont taillé une belle part du gateau, d'où leurs grands nombres dans les rangs des oligarches.

NB : je sort tout ça de tête, il y a probablement quelques erreurs ou imprécisions.
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Qui Revient de Loin
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par Qui Revient de Loin »

Merci, JoKer, c'est très intéressant.
Je ne vois pas trop comment exploiter ça en JDR, où les clichés et les aspects romancés sont plus féconds, mais c'est très intéressant.

Sais-tu si l'archétypale "guilde des voleurs" a existé au moyen-âge, sous une forme ou sous une autre ? Etait-ce une sorte de mafia ?
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nerghull
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par nerghull »

C'est typiquement la dynamique de the Wire quand tu veux gamifier ça. Les vieux de la vieille usent de cette réthorique pour montrer à quel points les jeunes qui veulent prendre leur place et grimper les échelons un peu trop vite sans baiser les bonnes mains sont des sauvages.... quand bien même ils ont utilisé les mêmes méthodes pour arriver à leur place.
Dans un setting "tous pourri" comme celui de la criminalité, c'est un très bon enfumage que pourrait utiliser un vieux padre sur les PJs pour les lancer contre ses jeunes concurrents qui lui font peur. L'occasion également pour les PJs, au fil de leurs passe d'arme avec la jeune génération de se faire des contacts dans les autres de la vieille garde, ce qui n'ont pas atteint le trône et qui tiennent barrent ou boutique. Autant de gens qui pourront leur apporter un peu de recul, leur montrer à quel point la vieille garde et la nouvelle sont semblable, la seule chose qui change c'est qui a le pouvoir et qui veut le prendre.
Donc plutôt dans du jeu à choix (im)moral, sans surprise.

(Pour les balances et la collaboration avec la justice, ils le font tous. Mais quand t'es boss c'est "du business" pour "la paix du commerce". Mais bon c'est vachement plus difficile à justifier quand tes petites saloperies te pête à la gueule alors que ta position est instable :P )
Dernière modification par nerghull le mar. avr. 06, 2021 9:20 pm, modifié 2 fois.
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JoKeR
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par JoKeR »

Alors pour l'utilisation en jdr :

- si tu la joues à la tenga (et franchement si je devais faire une campagne mafieuse sur base historique je partirait de ce jeu sans hésiter) tu peux mettre tes PJs entre les deux factions, leur bourrer le mou des deux "propagandes" et leur faire se rendre comtpe petit à petit que blanc bonnet et bonnet blanc...
Ou commencer une campagne en pleine guerre de factions et puis faire arriver une opportunité auquel tout le monde peut avoir accès sans se marcher dessus (donc pas la drogue, plutôt un gros changement étatique à exploiter) et voir tout le monde se mettre d'accord. Y compris avec les enfoirés qui ont tué toute la famille d'un des PJs.
Ou le parrain mentor qui a une super réputation et qui en fait balance ses adversaires aux flics et ensuite fait zigouiller des mafieux pour avoir un beau frère flic.

Ou s'ils jouent les forces de l'ordre se faire berner par le discours "avant on avait un code".

Pour la guilde des voleurs :

- rien de tel à ma connaissance. Donc à priori non. Mais je suis nettement moins calé en histoire antique et médiévale qu'en moderne, contemporaine et récente. Et surtout si ça avait existé ça n'aurait pas laissé beaucoup de traces donc difficile d'être catégorique.

- Cela étant l'archétype de guilde à la donj' / fritz lieber / ... est hautement improbable. Disons que c'est aussi historique que le "medieval" de donj'. Une société criminelle est complètement intégrée à son environnement géographique et historique. Donc si tout le reste ne correspond pas à l'histoire, ben la "guilde" non plus. Pas la bonne culture, le bon modèle économique et politique, pas la même justice, etc.

- A l'époque moderne (15ème-18ème) il y a eut des bandes puissantes qui ont put résister au pouvoir quelques, surtout vers la fin, surtout en milieu urbain. Notamment les fameuses "cours des miracles". Mais elles n'ont jamais eut la pérennité d'une mafia. Elles tenaient souvent à une circonstance exceptionnelle (faiblesse du pouvoir aristocratique), à un leader charismatique, etc. et se sont effondré sans se reproduire.

- Il faut voir que les structures criminelles les plus sophistiquées, celles qu'on appelle mafia, sont la rencontre de beaucoup de chose dans un contexte bine particulier, qui se structurent sur quelques décennies jusqu'à faire système. D'où leur résilience. Pour la Cosa Nostra (qui s'appelait pas comme ça au début) c'est la rencontre entre :
- une tradition de bandes de brigands organisés et en réseau autour de l'abigeat (vol de bétail) mais dirigées en sous mains par de puissants propriétaires féodaux qui les détruisaient quand ils n'en avaient plus besoin ou qu'elles faisaient trop de bruit ;
- un affaiblissement de l'aristocratie du royaume de Naples qui dans une large majorité confie ses propriétés de l'ouest de la Sicile (la mafia ne s'implante sérieusement dans l'est que dans les années 1970) à des intendants qui s'embourgeoisent et lorgnent sur les terres dont ils ont la charge ;
- une bourgoisie républicaine organisée en société secrète sous l'influence maçonique française suite à l'époque naopléonienne, dans des "sectes" très secrètes car opposées à une police politique ultra répressive ;
- la fin brutale de la féodalité en quelques décennies sans que les structures des médiations et de gouvernance modernes aient put s'ancrer dans les institutions et les pratiques. Du coup mise en place "défectueuse" de l'état moderne dont les lacunes sont exploitées par ces premiers "entrepreneurs de violence".

- or dans les mondes et les époques médiévales si le pouvoir royal / ducal / comtal / ... apprend qu'il y a une organisation criminellel qui existe il y a deux situations :
- ou bien cette organisation peut être utile et utilisée et c'est fait. Mais du coup les relations entre le pouvoir officiel et le pouvoir criminel sont complètement asymétrique
- ou bien cette organisation n'est pas utile ou ne peut être utilisée.
Dans les deux cas quand le pouvoir officiel en a marre il est juge, jury et exécuteur. Il envoie des troupes et il pend haut et court. Et comme il n'y a pas de relai (une bourgeoisie locale forte et indépendante) entre les criminels et ce pouvoir, les criminels ne peuvent pas négocier et tôt ou tard on les balance et c'est direction les galères.
(NB : ceci n'est pas un plaidé pour une réponse policière à la quesiton de la criminalité organisée. Cette réponse a déjà montré maintes fois son inefficacité. Ceci n'est possible que dans un état autoritaire avec une "justice" discrétionnaire et un usage de la force très arbitraire)

edit : je sais pas si je suis très clair ^^;
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par Oneirokritikos »

@JoKeR, que connais-tu de la spécificité du crime organisé en Corée du Sud contemporaine ? J'avais vaguement lu que c'était trés différent du Japon.
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par JoKeR »

Et bien je me suis posé les mêmes questions récemment et j'ai pas d'info précise sur la criminalité sud coréenne malgré mes contacts en Corée. De ce que je peux en voir je suis pas sûr qu'il y aie une "spécificité". La Corée du Sud était un régime dictatorial (pardon "autoritaire mené par un général mystérieusement suicidé pour rétablir la démocratie afin que sa fille soit élue et réélue avant d'être destitué parce que trop de scandales de corruption & co") jusqu'à la fin des année 80 (et faut attendre la fin des années 90 pour que ça se stabilise). De plus elle est un enjeu majeur pour les USA et tellement farouchement anti communiste qu'ils ont pas eut besoin de liens occultes avec le crime organisé comme au Japon.
Bref je pense pas qu'il y aie quelque chose qui se rapproche d'une mafia (j'enrage je retrouve plus la définition du crime organisé selon la conférence de Naples en 1994 qui reste un bon départ). Ce sont donc probablement des groupes qui vont de la bande de cambrioleurs aux réseaux de blanchiment d'argents, en passant par la prositution, le deal, etc. Mes ami.e.s corén.ne.s me disent que la police est très corrompue.

De ce que j'ai lu ou entendu (donc info à prendre avec des pincettes) il y a notamment de la prostitution, du paris clandestin et les trafics de drogues sont pas mal internes. En effet la repression contre le cannabis, la coke et l'héroïne est très sévère alors que les amphet et autre joyeusetés chimiques sont plus courantes et produites sur place. D'autre part la culture coréenne est quand même pas hyper inclusive des étrangers donc les groupes criminels étrangers ne peuvent qu'être marginaux et auront besoins de contacts locaux.

La différence avec la Japon est donc grande. Les yakuzas sont parmis les mafieux les plus puissants au monde, avec comme particularité d'avoir pignon sur rue, même si ça s'est calmé depuis la répression en 1997. Il n'empêche que lors du désastre de Fukushima le plus grand clan du japon a communiqué sur ses oeuvres de soutien et de participation au "maintient de l'ordre". Par communiquer je veux dire "le boss a fait une déclaration médiatique officielle". C'est impensable ailleurs.
Les yakuzas contemporains prospèrent depuis l'après 2GM grâce au système politique clientéliste (ils vendent des voix aux politiciens qui les protègent, en gros), grâce aux liens avec l'armée et surtout d'ancien criminels de guerre d'extrême droite et le fait qu'ils se soient vendus comme casseurs de communistes à la CIA (comme les mafia italiennes, américaine et les Loups Gris turcs).
Comme toute mafia ils servent d'instrument de "gouvernance" occulte et violent à la classe politique et économique. Au japon pendant longtemps il n'y avait pas de lois permettant l'expulsion. On payait donc les yakuzas pour expulser les gens (ou provoquer des "accidents"). D'autre part le Yakuza a réussit à mettre en place une bourse parrallèle dans les années 70-80. Et on les embauchait pour intimider les conseils d'administration (tu "vends" des parts à des gros bras qui viennent menacer physiquement l'opposition lors des réunions). Leur influence financière n'a pas d'équivalent à ma connaissance et a été une des raisons de la crise dela fin des années 1990 qui a "stoppé" l'essort japonais et poussé le gouvernement à enfin prendre des lois anti yakuza (et donc à les chasser des CA et à casser la bourse noire.
Bref le yakuza ce sont des "gumi" de milliers voir dizaines de milliers de membres qui dominent la criminalité japonaise.

En Corée à ma connaissance il n'y a rien de tel. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait pas de groupe criminel très puissants mais ils ne sont pas unis, ne se reproduisent pas tels quels et composent avec les autres criminels en permanence.

edit : la question de l'influence yakuza en Corée est intéressante. Les relations entre les deux pays sont très complexes et conflictuelles. Il y a beaucoup d'hostilité mais aussi beaucoup de liens, notamment économiques. Donc une présence ou une influence ne serait pas étonnante. Mais probablement pas de contrôle territorial.
Dernière modification par JoKeR le mer. avr. 07, 2021 9:28 am, modifié 2 fois.
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par JoKeR »

Sur le site posté par Scorpinou il y a un article sur les yakuzas. Je l'ai pas lu et la présentation du master et les intervenants ne m'inspirent pas confiance (pas d'historien, pas de sociologues, principalement des flics et des juges qui manquent souvent de culture en sciences humaines et de recul critique sur l'état et son rôle). Mais ça sera quand même probablement mieux renseigné que moi (au moins plus récemment).

Et sinon un petit fun fact. En  1994  l'ONU à la conférence de Naples désigne le crime organisé comme la plus grande menace du monde. L'Italie relevait enfin le défi suite au maxi procès de Palerme puis à l'assassinat des juges Falcone et Borselino. Fin 90 les japonais réagissent aussi. Le FBI fait tomber famille après famille aux US.
Et puis en 2001... l'attention se porte sur le terrorisme et là on se rend compte que les seuls informateurs sur les talibans exportateurs de pavot sont... des mafieux. Tant pis pour la lutte anti mafia. Dès 2002 elle n'est plus la priorité. Et pourtant en matière de dégâts de par le monde elle fait bien plus de morts et de dégâts que tout les terrorismes réunis.
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par JoKeR »

Autres inspirations :

Election 1 & 2 de Johnny To. Le 1 est mon film de mafia préféré. Le 2nd est intéressant aussi dans ce qu'il montre de relations avec l'état et les services secrets. To étant un réalisateur de HK il connaît personnellement le milieux des tongs (qu'on appelle triades et que je vous conseille de continuer à appeler triades parce que même dans de l'historique, faire partie de la brigade anti-tong, ça ne fait pas sérieux. Been there, done that ^^

J'ai un bon souvenir de Les promesses de l'ombre, notamment sur le coût humain de vivre dans l'ombre.

Pour l'angle anti mafia je conseille "I cento passi" (les cents pas) sur l'histoire pas trop romancée de Pepino Impastato, fils de mafieux et précurseur de la lutte anti mafia. Dans la vraie vie son père était nettement moins sympa (mais l'a quand même protégé longtemps).

Côté livre de fantasy mes deux références sont :

Les salauds gentilhommes : outre que c'st une des meilleures séries de ces dernières années, avec des super scénar et des dialogues géiaux, les deux premiers tomes mettent en scène des organisations criminelles relativement crédibles (pour autant qu'on puisse l'être dans une oeuvre de fantasy sans attache historique).

le cycle de Vlad Taltos : surtout les 4 premiers tomes (les seuls traduits en français). Le héros est un boss mafieux et on voit un peu tout : introduction, règles, ascenssion, guerres de gangs, etc. Là encore super intrigue et dialogues truculents. Pas "réaliste" mais cohérent.

Ces deux là font une bonne base pour de l'inspi de guilde des voleurs à la Nightprowler.
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par nerghull »

Pour la Corée une spécificité : les boîtes de nuit (et les clubs et les bordels j'imagine) qui acceptent les étrangers sont très séparés des autres au point d'avoir leur propre écosystème. Clairement la faune des patrons et des sécuritas dans les clubs "pour blancs" de Busan était plus proche des européens de l'est qui font la protection à Marseille que du yakuza.
Et ce n'est pas pour autant un truc marginal, clairement les cosmopolite brassent du pognon (et de la schnouff) en quantité.
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Dinho
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Re: Inspi Magouilles, crime et pas botanique...

Message par Dinho »

JoKeR a écrit : mer. avr. 07, 2021 12:30 am la question de l'influence yakuza en Corée est intéressante. Les relations entre les deux pays sont très complexes et conflictuelles. Il y a beaucoup d'hostilité mais aussi beaucoup de liens, notamment économiques. Donc une présence ou une influence ne serait pas étonnante. Mais probablement pas de contrôle territorial.

Et vice et versa on dirait !

Je m'excuse d'avance de ne pas trouver de bonne source mais j'avais entendu parler de la "mafia coréenne" au Japon (j'utilise les guillemets car je n'ai justement pas d'éléments permettant de la qualifier de mafia selon la définition), les Kkangpae. Elle aurait profité de la désorganisation d'après guerre pour s'implanter dans l'archipel avant de se heurter aux clans yakuzas locaux, eux aussi en pleine expansion. J'ai l'impression qu'elle aurait plutôt tendance à être féodée (il y a sans doute un terme plus juste) voir absorbée par les clans locaux. Au point qu'on trouve beaucoup de coréens chez les yakuzas. Le photographe Yang Seung Woo, ancien criminel, donne un aperçu assez intime de ce milieu (ce qui permet de constater qu'en plus des maisons de jeu, qui sont souvent tenues par des coréens, les Kkangpae touchent aussi à la prostitution).

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Dans un touuuuut autre registre et pour ce qui est du sol Coréen, j'ai trouvé ces deux figures : Kim Jwa-jin et son fils Kim Du-han. Dû à leur aura, beaucoup de points sur leur vie et leur impact sur les organisations criminelles coréennes sont très romancés, romantiques, que dis-je ? Romanesques ! ^^ Mais c'est peut-être là où on peut rejoindre le JdR car il y a dans leur bio un sacré paquet d'aventures et dans leur caractère une bonne source d'inspiration pour vos personnages.

Kim Jwa-jin
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Leader indépendantiste à l'époque de l'occupation japonaise, le destin et les valeurs de Kim Jwa-jin se sont forgés au croisement du crime, de l'anarchisme et de la lutte pour l'indépendance. Issu de la petite noblesse, la légende raconte qu'à l'âge de 18 ans il serait devenu le premier propriétaire à émanciper ses serfs. Dans les années 10, il monte de fausses sociétés et plusieurs escroqueries pour financer la lutte pour l'indépendance. Selon les Kkangpae, il aurait mené la lutte anti-japonaise aussi sur le front criminel, tentant de s'opposer à l'implantation des yakuzas. Mais il est surtout connu pour ses victoires de guérilla anti-japonaise qui lui vaudront d'être assassiné en 1925 par l'occupant.
Un bon exemple de l'archétype romantique du bandit idéaliste.

Kim Du-Han
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Fils illégitime du précédent, Kim Du-han se garde bien de suivre le destin de martyr de son père. A la libération, il ira même jusqu'à collaborer avec la dictature pour purger la Corée du Sud des communistes. Son enfance est également aux antipodes. Manquant d'être vendu comme esclave par son oncle, il connaît la mendicité avant de gravir à la force de ses poings les premiers échelons de sa carrière de criminel. Il s'illustre également dans les guerres de gangs contre les yakuzas (la légende raconte qu'il aurait été capable d'éliminer tout un gang à lui tout seul à mains nues !). Mais ce sont surtout son charisme et son machiavélisme qui le placeront à la tête de la mafia coréenne dans les années 50 et 60. Après la dictature, il devient député et son ombre plane sur chacun des nombreux scandales de corruption de la jeune République mais, autant à l'aise sur le plan médiatique que sur les plans criminel, économique et politique, il conserve une popularité à toute épreuve grâce aux nombreux films et dramas à sa gloire.
Un personnage qui parvient à condenser en lui-même les archétypes du patron multimillionnaire, du politicien corrompu et imbu de son image, du capo del tutti capi parti de rien pour arriver au sommet et du street fighter en costume rayé.


Voilà pour votre curiosité ou votre prochain scénar dans les bas-fonds de Seoul ^^

Et si je peux me permettre de te solliciter à mon tour JoKer ^^, j'en profiterais bien pour te demander si tu n'aurais pas des informations ou des ouvrages à me conseiller sur les milieux du crime parisien entre la fin du Second-Empire et le début de la IIIème République ?
Je me suis un peu renseigné sur les apaches, mais c'est un phénomène plus lié à la Belle Époque qui commence juste après la période qui m’intéresse.
Je me suis procuré l'Atlas du Crime à Paris : du Moyen-Âge à nos jours de Dominique Kalifa et Jean-Claude Farcy, mais j'ai peur qu'il survole la période en se concentrant sur les transformations dans les domaines de la presse et de la police et pas tant des milieux criminels en eux-même.
 
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