Rahyll a écrit :Le Grümph a écrit :Même pas au niveau de "visiter un donjon ou pas". Il y a des jeux modernes pour visiter des donjons (comme Torch Bearer, qui n'est absolument pas OSR vu la structuration très rigide du truc) [SNIP].
C'est marrant parce que j'ai beau savoir que Torchbearer n'est pas un jeu OSR (Burning Wheel, L. Crane*, Forge, et les mécaniques bien évidemment), j'ai vraiment le sentiment quand je joue à Torchbearer (que j'aime beaucoup) de faire du donjon "comme dans le temps" (ce qui en réalité, ne veut absolument rien dire, me concernant, puisque je n'ai jamais trop fait de donjon ayant toujours eu horreur de ça). J'arrive à me mettre dans l'ambiance : peur que la torche s'éteigne, put** combien il reste de salle ?, etc. sans que ce soit gâché par la mécanique que je trouve hyper "pas fun" (intiative ? Bon, tu tapes ? D20, raté... Il te balance un sort... JS raté, bon tu perds 1D6 PV et tu as -3 sur ta prochaine action etc. etc.).
Du coup, pour moi Torchbearer, c'est l' "esprit" OSR mais avec une mécanique moderne "fun" (de mon point de vue, hein). Mais ce n'en est pas ! Weiiiiiiird.
En même temps, chacun ici voit midi à sa porte, entre LG qui parle de DD4 comme d'une étape dans son cheminement vers l'OSR mais refuse que Torchbearer en soit ou Yslaire qui présente son Coureurs d'Orage comme étant de l'OSR.
Dans son long post, Voralan a dit beaucoup de choses intéressantes même si j'ai du mal avec la posture anti-intellectuelle ou anti-Forgienne si répandue dans les (et historiquement logique : l'OSR s'est aussi en partie construit en réaction à the Forge).
Il me semble justement que la difficulté de définir ce qui ressort ou non de l'OSR tient à la nature même de ce mouvement qui a agrégé des personnalités, des jeux et des expériences très différentes, mais qui n'a jamais été "structuré" ou "unifié" comme a pu l'être The Forge.
A titre personnel, j'ai découvert ce mouvement sur le tard, à travers une multitudes de blogs que j'ai parcouru à rebours.
D'ailleurs, plutôt que les jeux, ce sont les blogs qui à mon avis représentent ce qu'il y a de plus intéressant dans le mouvement - les deux étant de toute manière souvent liés, des articles ou une série d'articles donnant lieu à un jeu ou à un supplément. J'en donnerai une liste en fin de message parce qu'il me semble que c'est là qu'est la mine.
L'OSR finalement se distingue par tout un tas d'éléments, en creux comme en plein.
On peut très bien les hiérarchiser et décider que le plus important c'est tel ou tel critère, ou l'absence de tel ou tel élément. C'est à mon sens ce que font pas mal de personnes sur ce forum qui estiment que le plus représentatif de l'OSR c'est la prédominance des actions et des paroles sur les jets de dés. C'est une vision, elle est tout à fait acceptable, mais elle s'applique à tout un tas d'autres styles de jeu qui ne sont pas OSR, et à l'inverse excluent de sa définition tout un tas de jeux ou de joueurs qui se revendiquent de l'OSR mais fonctionnent autrement.
On peut aussi accepter être face à un mouvement qui, comme tout mouvement, est protéiforme, nébuleux, avec des chapelles et des courants variés, et présente donc une palette assez large.
Ce que je retiens de l'OSR, ce sont donc plusieurs choses :
De l'archéologie expérimentale
Ce qui m'a d'abord intrigué, c'est de voir que contrairement aux clichés que j'avais en tête sur les clones et l'OSR, ce n'était pas du tout la chasse gardée des vieux barbons ronchons. La nostalgie a joué un rôle essentiel dans ce mouvement, mais ce n'est pas la seule force à l'œuvre. Il y aussi pour beaucoup l'envie d'aller voir de plus près ces jeux ou ces vieilles version de D&D qu'ils n'avaient finalement jamais pratiqué, et dont chacun se faisait une image sans les avoir jamais ni lu ni pratiqué.
C'est d'autant plus intéressant pour nous joueurs français qui avons été élevé par Casus Belli dans l'état d'esprit que Gygax et Arneson avaient inventé D&D et Greg Stafford le jeu de rôle...
Beaucoup ont découvert la simplicité de ces jeux, et surtout ce sont rendus compte qu'ils n'étaient pas comme ils les avaient imaginé : le Donj' des origines, avec ses XP gagnés en récoltant des trésors plus qu'en tuant des monstres, ses jets de moral, ses persos faiblards appelés à survivre, ... tout ça dessinait un jeu très différent du gros-bill et du moi vois/moi tue.
Cette découverte change la perspective : peut on redécouvrir le jeu tel qu'imaginé et pratiqué par ses créateurs il y a 40 ans ? Le jdr aurait-il pu connaître une autre voie de développement que celle qu'il a connu ?
L'OSR fait en quelque sorte oeuvre d'exégèse, certains se transforment en gardiens du temple quand d'autres poursuivent leurs réflexions sur cette base originelle. Il y avait dans tous ces jeux de idées ou des potentialités qui n'ont pas été retenues ou vraiment exploitées par 30 ans de production rôliste. C'est ainsi qu'on a pu voir revenir des outils comme les cartes à hexagones ou les tables aléatoires, traités et considérés différemment.
Une esthétique
Ce retour aux sources n'est pas que ludique, il est aussi esthétique. Là où c'est le plus visible, c'est dans les illustrations. Le cliché sur les jeux OSR c'est que c'est illustré au crayon gras par des gamins de 5 ans. C'est malheureusement souvent vrai mais c'est l'arbre qui cache la forêt. Il y a une envie de retrouver une imagerie d'avant la couleur, d'avant photoshop, d'avant le manga et les jeux vidéos, avec quelque chose de plus sale, de plus rock'n'roll, plus psyché des années 70.
La relecture patiente de l''appendix N et des livres qui y sont cités fait partie de cette même démarche. Ils renvoient à une littérature et à des univers qui sont encore en friche, où l'horreur se mélange à la fantasy, où les frontières netre les genres sont encore floues, ou les histoires et les récits ne sont pas encore codifiés.
L'OSR, c'est aussi une fantasy d'avant l'uniformisation et la taxonomie, où un elfe ou un orque ne ressemble pas nécessairement à un perso de Warcraft, où un monstre n'est pas qu'une entrée identifiée dans un bestiaire mais bel et bien une aberration contre-nature, où un trésor n'est pas qu'un item interchangeable dans une liste mais un objet de pouvoir et de légende...
Un style de jeu
C'est le sujet dont on a le plus débattu ici, entre le "ruling, not rules" ou le "player's skills matters". C'est bien évidemment juste mais ce ne sont pas à mon sens les seuls critères qui définissent le genre.
Le déséquilibre volontaire et la difficulté élevée ont déjà été relevés ; j'y vois le fait que D1D soit l'enfant du wargame et non des jeux de société.
Il y a aussi le picaresque, la mortalité des persos, leur ruse et leur hargne de "murder hoboes" qui sont mis en avant plutôt qu'un aspect "sauveurs du monde", leur côté interchangeable, facilement remplacés par des henchmen, qui se traduit par la facilité à laquelle ils peuvent se réduire à un archétype (guerrier niv.2) résumé à d'infimes données techniques.
Et enfin il y a le dungeoncrawling... C'est peut être encore un héritage de Casus Belli, mais je trouve qu'on s'en défend beaucoup, alors que si on regarde bien, 90% de ce qui est mis en avant dans les règles du jeu, les modules proposés ou les divers CR de parties relèvent du dungeoncrawling. L'exploration, les pièges retors, les monstres errants, les passages secrets, ... tout ça fait partie intégrante de l'expérience OSR.
Un état d'esprit
Un dernier élément qui me semble caractériser l'OSR, c'est la philosophie Do it yourself qui y règne : tu as une houserule, propose la sur ton blog... Un scénar ? Publie le à compte d'auteur... Un jeu ? Ecris ta propre version de D&D si tu penses avoir quelque chose à rajouter au bouzin. Là-dessus, on n'est pas très éloigné des jeux indie, ce qui correspond aussi à l'émergence d'autres moyens de diffusion.
S'y retrouvent aussi des gens moins intéressés par le gameplay que par le gaming : au système sont privilégiés des scénars, des tables, des sandbox, ... Comme on n'a pas à se poser de question sur le système ou les règles, on peut lâcher sa créativité sur autre chose.
Pour finir, petit liste de site indispensables, à remonter jusqu'à leur origine :
http://dndwithpornstars.blogspot.fr/ le blog de Zak S., la star locale, auteur du génial Vornheim (cherchez les tags Cobalt reach, Tiamat ou Art, et lisez sa relcture inspirée d'une partie du bestiaire de DD5)
http://falsemachine.blogspot.fr/ le blog de Patrick Stuart = si China Miéville n'avait pas arrêté le jdr pour écrire des livres, ça donnerait ça (cherchez les tags un peu anciens Underdark/Veins of the earth qui sont censés donner naissance à un futur supplément pour LotFP)
http://dreamsinthelichhouse.blogspot.fr/ pas trop mis à jour l'année dernière, mais c'est l'exemple même (en réussi) des blogs OSR : des CR, des houserules, et surtout la pensée d'un MJ en mouvement sur ces projets
http://poleandrope.blogspot.fr/ un blog en jachère, un peu sur le modèle du précédent, par quelqu'un qui après avoir beaucoup joué à GURPS s'est tourné vers l'OSR naissant et a fini par écrire des modules pour DCC et le chouette Alphabet Dungeon
http://talesofthegrotesqueanddungeonesque.blogspot.fr/ comment ne pas se soucier des règles et de gameplay permet de pleinement se consacrer à ses marottes, ici la littérature gothique et plus largement l'horreur
http://tenfootpole.org/ironspike/ que des critiques, que des critiques de scénars, avec un ton et des arguments bien à lu mais qui synthétisent à mon avis parfaitement l'esprit OSR
http://apolitical.info/teleleli/ un peu abandonné, un blog présentant la cité de Teleli mais qui tient plus du Lovecraft des contrées du rêve que des Royaumes oubliés
http://www.tenkarstavern.com/ là, on est vraiment chez les grognards. A noter une série de posts dans mon souvenir intéressants sur l'histoire du mouvement quand il y a eu justement l'année dernière un mini-polémique sur ce qui est et n'est pas OSR